Fin mars, la France métropolitaine comptait près de 13 000 sites 5G en service, dont plus de 8 000 pour Free Mobile. En termes de déploiement, Free et Orange mettent en service bien plus d’antennes sur les 3,5 GHz que leurs concurrents. De son côté, Nantes vient de sauter le pas de la 5G, tandis que Lille temporise encore.
Cela fait presque cinq mois que la 5G a été lancée en France, après une longue procédure d’enchères. La dernière étape s’est déroulée le 20 octobre, avec les enchères de positionnement. Depuis le 18 novembre, Bouygues Telecom, Free Mobile, Orange et SFR peuvent ainsi déployer de la 5G en France.
Ils ne se sont pas fait attendre, avec une avalanche de communiqués de presse dans les premières semaines (et mois) pour jouer à celui qui en a le plus. Sébastien Soriano, ex-président de l’Arcep, nous expliquait que cette dernière prenait « la main » sur l’ANFR concernant le bilan mensuel du déploiement de la 5G, car il « y a là une spécificité […] Des opérateurs font valoir qu’il y aurait une vraie et une fausse 5G, il y a donc des enjeux de présentation ».
Depuis le lancement de la 5G, on se retrouve donc avec deux observatoires : l’ANFR pour les autorisations et les sites techniquement opérationnels, l’Arcep pour ceux ouverts commercialement. Il s’agit dans le second cas des sites fournissant un service à un client muni d’une carte SIM et d’un terminal compatibles.
Dommage encore une fois de ne pas avoir une certaine unité entre les deux institutions. Quoi qu’il en soit, le gendarme des télécoms a actualisé son observatoire avec des données (transmises par les opérateurs) datées du 31 mars 2021. D’un mois sur l’autre, de petits ajustements ou correctifs peuvent avoir lieu, ce qui peut expliquer un léger décalage par rapport au tableau de fin février.
Deux tableaux récapitulatifs de cinq mois de déploiement
Fin mars, près de 13 000 sites 5G étaient ouverts commercialement chez l’ensemble des opérateurs. Free Mobile caracole toujours en tête avec plus de 8 000 sites (+1 030 en un mois). L’opérateur réutilise massivement les fréquences de 700 MHz pour apporter une large couverture à la population, mais avec des débits moindres que dans les 3,5 GHz, car la quantité de fréquences disponibles est moins importante.

Si l’on ne prend en compte que la bande des 3,5 GHz – celle au cœur de la 5G –, Free Mobile n’a « que » 824 sites en services, soit 262 de plus en un mois. Cela représente 10 % de l’ensemble de ses sites 5G, mais ce chiffre est en hausse de six points par rapport au premier observatoire de l’Arcep.
Free Mobile est en seconde position sur les 3,5 GHz, derrière Orange qui est en tête depuis le début des déploiements : l’opérateur historique revendique 1 105 sites (+297 en un mois). Bouygues Telecom et SFR sont un cran en retrait, avec respectivement 491 (+166) et 418 sites (+134) 5G sur les 3,5 GHz.
Sur les 2 100 MHz, Bouygues Telecom dispose du plus grand nombre de sites en services et c’est aussi l’opérateur en activant le plus au fils des mois.
Dans le tableau ci-dessous, vous retrouverez les chiffres des opérateurs sur leurs sites 5G dans les 700 ou 2 100 MHz, avec le détail de chaque bande de fréquence. Sont également présents les chiffres (parfois ajustés) des précédents observatoires et les progressions mensuelles des opérateurs.

Bilan de la consultation citoyenne de Nantes
Aprés Paris le mois dernier, c’est au tour de Nantes de donner le coup d’envoi de la 5G, sous conditions. Il est notamment question de « ne pas allumer les antennes 5G présentes dans un rayon de 100 mètres des écoles et des crèches avant la remise du rapport de l’ANSES »… en retard, puisqu’il devait arriver au premier trimestre.
La métropole permettait aux citoyens de s’exprimer sur la question de la 5G entre les 1er et 27 mars. 404 contributions seulement ont été envoyées, un chiffre qui semble faible compte tenu de la densité de population dans cette zone. Dans son bilan, la métropole explique que les retours dépassent « le contexte du débat sur la 5G […] En effet, de nombreuses contributions questionnent plus largement le numérique, dépassant les seuls enjeux de la 5G et de son déploiement ».
Comme toujours en pareille situation, on retrouve une chanson bien connue : « de nombreux contributeurs pointent l’existence de zones blanches sur le territoire, préconisant d’abord de terminer le déploiement des technologies actuelles (4G et fibre optique) afin d’assurer un accès égalitaire au numérique ».
Une synthèse a été mise en ligne. Elle regroupe les « différents arguments et propositions exprimés par les contributeurs », mais attention : les arguments sont repris « sans mise en perspective scientifique ». On y trouve donc un florilège de commentaires divers sans aucune vérification. Pas sûr que cela fasse avancer le débat.
Dans les risques, on a pêle-mêle : « augmentation des cancers », « dépendance aux réseaux sociaux », « pollution spatiale », « de nouveaux services pas utiles », « manque de transparence », etc. Les « opportunités » sont du même genre : « une surveillance assurée », « attractivité de la ville », « amélioration des soins de santé et de la recherche », « augmentation des vitesses de téléchargement », etc.

En attendant le rapport de l’ANSES, un autre sur les « aspects techniques et sanitaires » de la 5G a été mis en ligne. Il est cosigné par plusieurs services de l'État. Olivier Merckel, responsable de l’unité évaluation des risques liés aux agents physiques de l’Anses, a déjà donné une information importante sur le futur rapport : « on ne peut pas démontrer qu’il n’y a pas de risques, on ne pourra jamais [...] la science ne peut pas donner une réponse totalement tranchée sur ces questions ».
La liste des villes ayant mis en place un moratoire sur la 5G et sautant le pas augmente doucement, parfois avec des mesures supplémentaires imposées aux opérateurs. D’autres résistent encore, comme Lille qui attend le rapport de l’ANSES. Cela n’empêche pas les opérateurs de préparer le terrain avec des antennes 5G en place, mais pas actives pour le moment. Laurent Vitoux, délégué régional d’Orange, explique à 20 minutes qu’il « y a des antennes allumées dans des communes à la périphérie de Lille qui peuvent sans doute permettre de capter de la 5G ».
La carte 5G de Free n’indique toujours pas les débits
Enfin, on regrette que Free Mobile ne propose toujours pas d’information plus précise à ses clients concernant les débits de sa 5G en fonction des fréquences. Certes la carte de couverture indique bien s’il s’agit de 3,5 GHz ou de 700 MHz, mais sans aucune précision sur les différences à l’usage pour les clients.
Orange et SFR indiquent pour leur part les débits maximums de chaque bande de fréquences – Orange les précise même de manière visible avant la carte –, tandis que Bouygues Telecom donne des niveaux de performances (Gb/s vs plusieurs centaines de Mb/s).
Sébastien Soriano s’était montré très actif sur le sujet de l’information faite aux consommateurs : « il est clair que je déconseille très fortement à un opérateur de ne pas suivre les recommandations de l’Arcep, car si c’était le cas, on le ferait savoir publiquement et fort […] J’ai fait passer le message personnellement aux quatre opérateurs ».
Il n’est par contre plus président de l’Arcep, remplacé par Laure de La Raudière qui semble pour le moment bien occupée par la « jungle » dans la fibre optique. On attend donc sa position sur les cartes de couverture 5G.
La liste des sites à 240 Mb/s au point mort
Enfin, l’Arcep n’a toujours pas mis à jour sa « cartographie des sites 240 Mb/s par opérateur » puisque les données datent toujours du 30 septembre 2020. Cette limite de 240 Mb/s vient des obligations inscrites dans les licences 5G des quatre opérateurs nationaux.
Il y est précisé qu’ils doivent « assurer l’augmentation des débits fournis par les réseaux mobiles » – que ce soit en 4G ou en 5G – en respectant trois paliers : 75 % des sites en 2022, 85 % fin 2024 et 100 % fin 2030.
Pour le moment, les pourcentages sont les suivants :
- Bouygues Telecom : 21 707 sites en service dont 12 147 au moins à « 240 Mb/s », soit 56 %
- Free Mobile : 19 048 sites en service dont 15 673 au moins à « 240 Mb/s », soit 82 %
- Orange : 25 816 sites en service dont 18 062 au moins à « 240 Mb/s », soit 70 %
- SFR : 22 538 sites en service dont 13 669 au moins à « 240 Mb/s », soit 60 %