Qualcomm et d’autres s’associent pour accélérer « le développement de l'écosystème et du matériel RISC-V », une architecture libre. Les détails manquent encore, mais la cible est claire, même si elle n’est jamais citée dans le communiquée : Arm et ses licences payantes.
Cinq sociétés – Robert Bosch GmbH, Infineon Technologies AG, Nordic Semiconductor, NXP Semiconductors et Qualcomm Technologies – viennent d’annoncer la création d’une entreprise commune. Son but est de « faire progresser l'adoption de RISC-V à l'échelle mondiale en permettant le développement de matériel de nouvelle génération ».
Une alliance basée en Allemagne
Le nom de cette entité – basée en Allemagne – n’est pas précisé. Sa création est évidemment soumise aux approbations réglementaires habituelles, mais cela ne devrait pas poser de problème, tant l’Europe cherche à progresser dans le monde des semi-conducteurs, aussi bien sur les questions de souveraineté de que de parts de marché face aux géants américains et asiatiques.
Un appel aux volontaires
Le communiqué de presse commun n’est pas des plus détaillés. Il se contente d’indiquer que les travaux se concentreront pour commencer « sur l'automobile, mais avec une extension éventuelle pour inclure le mobile et l'IoT ».
Bien sûr, cette « alliance » lance un large appel aux industriels, dirigeants et gouvernements afin d’unir leurs forces « pour soutenir cette initiative qui contribuera à accroître la résilience de l'écosystème des semi-conducteurs ». RISC-V International, en charge du jeu d’instruction éponyme, compte plus de 3 000 membres, dont les géants habituels : Google, Intel, Qualcomm, Tencent, AMD, Marvell, NVIDIA, Alibaba, etc.
Qualcomm vs Arm : je t’aime, moi non plus
La présence de Qualcomm n’est pas une surprise, principalement pour deux raisons. Tout d’abord, et comme le rappelle la société, elle « investit dans RISC-V depuis plus de cinq ans » et intègre déjà cette technologie dans plusieurs de ses plateformes commerciales. On rappellera d’ailleurs que Qualcomm est entrée au capital de SiFive en 2019, un concepteur de puces RISC-V.
Ensuite, elle est en guerre ouverte contre Arm depuis quelque temps. Il faut dire qu’Arm a ouvert les hostilités en attaquant Qualcomm en justice et en l’accusant d’utiliser illégalement certaines de ses technologies, suite au rachat de Nuvia. Bonne ambiance, alors que Qualcomm est l’un de ses principaux clients et qu’il exploite les technologies Arm depuis longtemps au sein de ses puces Snapdragon pour les terminaux mobiles.
Pour ne rien arranger, Arm prévoirait de changer son modèle de licence pour faire payer des « royalties » aux fabricants de smartphones (en fonction du prix de leurs terminaux), et pas uniquement aux fabricants de puces comme le rapporte le Financial Times. Un changement de paradigme déjà évoqué par Qualcomm dans son procès face à Arm en octobre dernier, selon Android Authority.
Le tout se déroule sur fond d’entrée en bourse pour Arm (qui appartient à SoftBank), qui devrait avoir lieu en septembre. Amazon pourrait être l’investisseur principal, Apple, Intel, NVIDIA et Samsung devraient aussi être de la partie. Bref, des histoires de gros sous qui inquiétent les constructeurs de smartphones.
Avantages de RISC-V : une architecture de jeu d'instructions libre et ouverte
C’est là que RISC-V peut tirer son épingle du jeu : il s’agit d’une architecture de jeu d'instructions ouverte et libre, où chacun peut ajouter ses propres instructions. Elle était initialement développée par l’université de Berkeley en 2010. Elle est disponible en version 32 à 128 bits et peut gérer un très grand nombre de cœurs. Bref, un concurrent sérieux aux solutions d’Arm.
RISC-V est encore très jeune face aux architectures d’Arm, qui occupent de plus largement le marché des terminaux mobiles ; passer de l’un à l’autre ne se fera pas d’un claquement de doigts. Cette nouvelle alliance permet dans tous les cas d’envoyer un message clair et direct à Arm.