Selon nos informations, 273 millions d’euros ont été collectés en 2020, en pleine crise sanitaire. C’est 13 millions de plus qu’en 2019. Si les chiffres 2021 sont encore incertains, Copie France peut s’enorgueillir d’avoir réalisé encore une bonne année, alors qu’elle milite pour l’extension de cette ponction aux téléphones et tablettes reconditionnés.
La « rémunération » pour copie privée amassée en 2020 n’a pas vraiment connu la crise sanitaire chez les ayants droit. La société civile, dont sont membres l’ensemble des sociétés de gestion collective comme la SACEM, a aspiré 295 millions d’euros l’an passé, en données brutes.
Ce chiffre intègre notamment les contentieux gagnés, rattachés comptablement à des années précédentes. Purgé, le montant net s’élève à la bagatelle de 273 millions d’euros.
Les smartphones, véritable poule aux œufs d’or
Dans cette masse, la copie privée sonore représente plus de 50 % du total, contre une trentaine de pourcentages pour la copie privée audiovisuelle. Le reste étant partagé entre l’écrit et les arts visuels.
Cette année encore, les téléphones et tablettes sont les deux sources principales de la manne, à plus de 67 % pour les premiers et près de 15 % pour les secondes. Loin derrière, les box, clefs USB et autres disques durs externes ne représentent que des miettes.
À eux seuls, ces téléphones ont permis aux ayants droit de collecter près de 180 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 37 millions d'euros venus du monde des tablettes tactiles.
On comprend du coup la volonté des ayants droit d’étendre la redevance aux smartphones et tablettes reconditionnés afin d’augmenter la surface de frappe.
La question des reconditionnés
Un dossier doublement sur le feu : d’une part, en commission copie privée où, avec le soutien de la Rue de Valois, le président et ces bénéficiaires s’affairent pour boucler un barème spécifique sur ces supports d’occasion, et d’autre part à l’Assemblée nationale.
Les grandes manœuvres sont en effet lancées pour arracher de la proposition de loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, une disposition déjà adoptée au Sénat. Un article 14 bis B indique en effet que « la rémunération pour copie privée n’est pas due non plus lorsque les supports d’enregistrement sont issus d’activités de préparation à la réutilisation et au réemploi de produits ayant déjà donné lieu à une telle rémunération ».
En clair, le texte vient casser leur rêve doré, en interdisant de prélever deux fois la ponction culturelle sur les biens remis sur le marché par les reconditionneurs.
Ajoutons que les ayants droit plaident aussi pour l’extension du prélèvement qu’ils touchent aux ordinateurs fixes, portables et autres disques durs. Des travaux sont en cours en Commission Copie privée, celle chargée d'établir barèmes et assiettes. L’assurance de gonfler la coquette fortune, même si ces supports ont surtout le vent en poupe chez les pros.
Des professionnels faiblement épargnés encore l'an passé
Rappelons que les professionnels n’ont en principe pas à payer la redevance. Plus exactement, le système mis en place les oblige à supporter cette charge, puis à lancer une demande de remboursement.
Toujours selon les informations de Next INpact, en 2020, il y a eu péniblement 1 065 demandes de remboursement traitées par Copie France, pour une moyenne de 906 euros par dossier, soit un total de 964 890 euros.
Il est vrai qu'une autre voie existe : celle de l’exonération, qui évite aux pros de se lancer dans des démarches administratives tout en mobilisant la trésorerie. Sur les 12 mois de l’année passée, Copie France estime les montants exonérés à 11,4 millions d’euros, en tout.
En amassant les deux chiffres, on parvient à une addition qui flirte avec les 12,4 millions d’euros.
L’étude d’impact associée à la loi de 2011 qui a ouvert ces procédures d’exonération et de remboursement, tablait sur une fourchette de rétrocession située entre 20 et 30 % des sommes perçues chaque année.
En 2020, ces 12,4 millions d’euros rendus aux professionnels ne représentent que 4.54 % des 273 millions d’euros collectés. Loin des 54,6 et 81,9 millions d’euros estimés par l’étude d’impact. La différence a donc été conservée par les industries culturelles.