Les pistes du Parlement européen pour se débarrasser de l'obsolescence programmée

Lady DEEE
Droit 5 min
Les pistes du Parlement européen pour se débarrasser de l'obsolescence programmée
Crédits : e-Waste Curtis Palmer (CC BY 2.0)

Ce n’est qu’un texte, sans conséquence juridique, mais non dénué de poids politique. Le Parlement européen vient d’adopter une résolution pour lutter contre l’obsolescence programmée.

C’est une première. Les eurodéputés ont adopté une résolution pour « une durée de vie plus longue des produits », en égrainant une série d’avantages pour les consommateurs et les entreprises. Batterie défectueuse irremplaçable, matériel non réparable bon pour la poubelle, appareil indémontable… les exemples de ce type fleurissent en cette période où la propriété d’un bien se confine à un seul droit d’usage, piloté par les constructeurs.

Greenpeace, récemment, tapait du poing sur la table dénonçant un vrai « virus » frappant le secteur des nouvelles technologies : « Les réparations, quand elles sont possibles, coûtent très cher et nécessitent souvent des outils spéciaux, notamment pour ôter certaines vis. C’est le cas, entre autres, de l’iPhone d’Apple, du R9m d’Oppo et du P9 d’Huawei ». Et l’ONG de s’interroger : « ces entreprises emploient les cerveaux les plus brillants du monde. Serait-ce trop leur demander de prendre en compte la fragilité et les ressources limitées de notre planète ? »

Robustesse, réparabilité, évolutivité

Du côté du Parlement européen, la question a fait sens. Dans une longue résolution mise en ligne aujourd’hui, les eurodéputés souhaitent que la Commission européenne se saisisse de cette question pour « encourager, dès que possible, l’adoption de critères de résistance minimum couvrant entre autres la robustesse, la réparabilité et l’évolutivité pour chaque catégorie de produits dès leur conception ». De même, ils suggèrent un soutien aux fabricants de design modulaire « facilement démontable et interchangeable ».

Le document vise tous les secteurs d’activités, mais n’oublie pas de pointer un doigt accusateur aux opérateurs en raison des déchets électroniques générés par les modems, routeurs et autres décodeurs de télévision. Un rappel douloureux alors qu’ « en vertu du règlement (UE) 2015/2120, les consommateurs ont déjà le droit d’utiliser le terminal de leur choix lorsqu’ils changent d’opérateur ».

De par le choix de ce véhicule, une résolution, le Parlement européen ne peut se limiter qu’à encourager, inciter, inviter la Commission européenne et les États membres à des actions volontaristes. Ils dégomment pour l’occasion l’inamovibilité des batteries et des LED, l’absence de standardisation des pièces détachées et des outils nécessaires à la réparation, outre les contraintes logicielles apposées sur ces appareils afin d’empêcher le recours à un réparateur indépendant.

L'impression 3D oui, mais attention aux contrefaçons

Dans leurs vœux, ils souhaitent aussi voir arriver des batteries dont la durée de vie corresponde idéalement à celle du produit. L’œil toujours sur l’avenir, l’impression 3D suscite leur intérêt, du moins à condition de garantir « la sécurité des produits ainsi que la protection des droits d’auteur et de lutter contre la contrefaçon ».

Les solutions préconisées ne se limitent pas à promouvoir la longévité des produits. Les eurodéputés s’intéressent aussi à l’économie du secteur, estimant nécessaire un coup de pouce aux structures d’aide à la réparation comme des Repair Cafés, des ateliers de réparation autonome, lesquels peuvent « favoriser la durabilité des produits et, parallèlement, renforcer la sensibilisation aux produits durables et la confiance des consommateurs en ces produits ».

Plusieurs pistes sont mises sur la table pour améliorer également l’information du consommateur : par exemple, un label européen volontaire, qui mettrait à l’honneur la durabilité, les capacités de modulation des produits. Autre idée : une possible « désignation de la durée de vie utile escomptée d’un produit en fonction de critères normalisés ». La résolution prône également une uniformisation des informations inscrites dans les manuels quant à la durabilité, l’évolutivité et la réparabilité d’un produit. Les propositions vont parfois loin comme celle consistant à envisager d’aligner l’affichage de la durée de vie sur la durée de garantie légale.

Une garantie liée à l'appareil, non à l'utilisateur

Juridiquement, le Parlement européen souhaite l’avènement d’une définition de l’obsolescence programmée dans l’Union. Une telle définition permettrait d’aiguiser les législations consuméristes nationales à l’encontre des fabricants pris les doigts dans le pot de confiture. Enfin, parmi la longue liste de cette résolution, les parlementaires aimeraient que la preuve d’un acte d’achat soit facilitée pour le consommateur. Comment ? Simple : « en liant la garantie à l’objet et non à l’acheteur, et en encourageant en outre la généralisation des reçus électroniques et des systèmes de garantie numériques ».

Le texte contient aussi toute une série de recommandations relatives à l’obsolescence des logiciels : il demande une transparence de la part des fournisseurs et des fabricants concernant « la période minimum durant laquelle les mises à jour de sécurité pour les systèmes d’exploitation sont disponibles ». Autre suggestion, que les mises à jour logicielles essentielles « soient réversibles et accompagnées d’informations sur leurs conséquences sur le fonctionnement de l’appareil, et que les nouveaux logiciels essentiels soient compatibles avec les logiciels de génération antérieure ».

La situation en France

En 2016, sept associations, dont l’UFC-Que Choisir, avaient déjà lancé une consultation en ligne  pour lutter contre l’obsolescence programmée. On retrouvait déjà des propositions similaires comme l’idée d’instaurer un principe de réversibilité du système d'exploitation, notamment en cas de ralentissement. 

Toujours en France, une loi de 2015 avait cette fois défini l’obsolescence programmée par « l'ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à réduire délibérément la durée de vie d'un produit pour en augmenter le taux de remplacement ». Sans grande conséquence jurisprudentielle. 

A l'étranger, iFixit bataille depuis de longues années pour noter la réparabilité des appareils passant sous ses mains, avec des scores atteignant parfois zéro (ici et ). En France...

Vous n'avez pas encore de notification

Page d'accueil
Options d'affichage
Abonné
Actualités
Abonné
Des thèmes sont disponibles :
Thème de baseThème de baseThème sombreThème sombreThème yinyang clairThème yinyang clairThème yinyang sombreThème yinyang sombreThème orange mécanique clairThème orange mécanique clairThème orange mécanique sombreThème orange mécanique sombreThème rose clairThème rose clairThème rose sombreThème rose sombre

Vous n'êtes pas encore INpactien ?

Inscrivez-vous !