L’imbroglio autour de l’iPhone 12 touche à sa fin. Après des retournements de situation, Apple annonce finalement qu’une mise à jour arrive, que l’ANFR s’empressera de vérifier. L’iPhone 12 reste en attendant interdit à la vente… mais certains revendeurs le proposent toujours.
iPhone 12 vs ANFR : vous avez les bases ?
Comme prévu, Apple tenait mardi sa conférence de presse annuelle pour lancer sa nouvelle gamme de smartphones : les iPhone 15. Juste avant, l’ANFR – avec l’appui médiatique du ministre Jean-Noël Barrot – demandait le retrait temporaire de l’iPhone 12 pour dépassement de DAS.
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Pour rappel, l’Agence nationale des fréquences prélève en effet chaque année des dizaines de terminaux dans le commerce et mandate un laboratoire pour mesurer le niveau d’exposition aux ondes. Dans ce cas précis, le DAS « membre » a été mesuré à 5,74 W/kg, soit 1,74 W/kg au-dessus de la limite de 4 W/kg.
L’ANFR vérifie la conformité du DAS
Précision importante : l’ANFR ne juge pas de la dangerosité du niveau de DAS, mais vérifie uniquement sa conformité. « Pour accéder au marché européen, les constructeurs de téléphones portables doivent constituer un dossier permettant de prouver qu’ils satisfont aux obligations définies par les directives de l’Union européenne (UE). Le respect des valeurs limites du DAS est imposé par la directive européenne 2014/53/UE (directive RED) », rappelle l’Agence.
Aucun contrôle préalable n’est effectué, mais les États membres peuvent procéder à des vérifications a posteriori. En France, c’est l’ANFR qui s’en occupe pour les radiofréquences : « Par sondage, l’ANFR vérifie la présence des mentions obligatoires et notamment celles concernant le DAS dans les documents d’accompagnement du téléphone. Elle a aussi la possibilité de prélever des terminaux sur les lieux de vente, de demander que lui soit communiquée l’intégralité du dossier d’auto-certification du constructeur, puis de faire vérifier, par des mesures réalisées par des laboratoires accrédités, les allégations en matière de DAS ». C’est ce qui s’est passé avec l’iPhone 12, comme avec des centaines de terminaux avant.
Comme nous l’avons déjà expliqué à plusieurs reprises, l’Agence ne peut pas sanctionner un dépassement de DAS, elle a uniquement ce pouvoir en cas de récidive (par exemple si le correctif ne permet pas de revenir dans les limites réglementaires) avec une amende administrative de… 7 500 euros. Les financiers de Samsung doivent encore en rigoler, peut-être moins les responsables marketing.
Pour Apple, l’iPhone 12 serait conforme à la norme en vigueur
La question du délai entre les mesures et la communication de l’ANFR ne semble pas avoir de réponse pour le moment, mais on peut supposer qu’Apple n’a pas spécialement dû répondre à l’Agence ou proposer des solutions pour avancer. Mais face au tapage médiatique, avec en prime Jean-Noël Barrot qui se disait prêt « à ordonner le rappel des iPhone 12 en circulation » et l’effet boule de neige que cela pouvait engendrer en Europe, Apple ne pouvait pas rester silencieux.
Dès le lendemain, le fabricant contestait les mesures réalisées par l'ANFR : « D'après ses propres tests, son produit est tout à fait conforme à la norme en vigueur […] L'entreprise américaine précise qu'elle poursuivra ses discussions avec l'agence française des fréquences pour démontrer que l'appareil répond aux normes », expliquait l’AFP en se basant sur un communiqué du fabricant.
Plusieurs points peuvent expliquer cette différence : erreur de mesure (cela peut arriver, même si c’est peu probable), norme différente prise en compte, smartphone testé avec deux versions différentes d’iOS (ce qui peut changer de manière plus ou moins importante le DAS), etc.
L’ANFR confirme sa position et apporte des précisions
Hier, l’ANFR répondait avec des « informations complémentaires ». L’Agence rappelait la réglementation, notamment que les appareils sont « évalués au contact du corps pour le DAS « membre » – c’est-à-dire un téléphone tenu à la main ou dans une poche de pantalon ». Le DAS tronc est pour sa part mesuré à 5 mm. Peut-être un début d’explication…
Le DAS membre est récent dans l’arsenal de l’ANFR. En 2017, Gilles Brégant, directeur général de l’ANFR, nous expliquait attendre un « texte qui nous permettra de rendre ce DAS membre à 4 W/kg obligatoire et dans ce cas on s'empressera de le mesurer ». Le texte est finalement arrivé au Journal officiel en 2019, avec une entrée en vigueur en juillet 2020. L’iPhone 12 a été commercialisé quelques mois plus tard, en octobre 2020.
Quoi qu’il en soit, l’Agence réaffirmait sa position : « les contrôleurs de l’ANFR vont s’assurer que l’iPhone 12 est effectivement retiré de tous les points de vente, en boutique et en ligne ». À partir de mardi, Apple dispose de 15 jours pour appliquer un correctif (ou lancer une procédure de rappel, ce qui est bien plus rare). Dans le cas contraire, « l’ANFR imposera à la société Apple de procéder au rappel de tous les appareils vendus sur le marché français ». Bref, la marque à la Pomme ne semble pas avoir droit à l’erreur.
Toujours interdit à la vente, l’iPhone 12 encore proposé par certains
Toujours dans ce communiqué, l’ANFR joue les pompiers et rassure un peu les utilisateurs : « La non-conformité détectée ne justifiait pas un rappel immédiat : toutefois, Apple doit faire en sorte que, très rapidement, l’iPhone 12 respecte le seuil limite de DAS « membre » ». À partir de quel niveau de non-conformité un rappel immédiat serait-il lancé ? Bonne question…
Un rapide tour chez les revendeurs confirme le retrait de l’iPhone 12 des boutiques en ligne… mais pas partout. Rue du Commerce et Rakuten par exemple continuent de proposer le smartphone à la vente. L’Agence rappelle qu’« Apple est responsable de la fin de commercialisation de l’iPhone 12 quel que soit le circuit de distribution (interne ou tiers) », mais que « les distributeurs doivent mettre fin à la commercialisation même en l’absence d’instruction d’Apple ».
L’Agence prend les devants : « L’iPhone 12, même reconditionné, est concerné par les mesures de l’ANFR. Les reconditionneurs sont des distributeurs, par conséquent, ils sont tenus d’appliquer les dispositions […] ».
Des régulateurs européens à l’affût
L’Agence en profite pour élargir le sujet au niveau européen :
« il convient de rappeler que les mesures correctives doivent permettre à l’iPhone 12 d’être conforme non pas seulement en France, mais sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne. Si la France avait un doute sur la conformité de ce téléphone dans les autres États membres, elle notifierait les autres États membres et la Commission européenne, qui ont déjà été informés de cette situation, afin qu’ils prennent les mesures nécessaires.
Cette procédure dite de « sauvegarde » élargira aux autres États membres les effets de la décision française, sauf décision contraire de la Commission européenne, suite à des objections de cette dernière ou des États membres formulées à son encontre ».
Aux Pays-Bas, le régulateur a examiné le rapport de l’ANFR et a précisé qu’il pourrait prendre une mesure similaire si besoin, comme le rapportait Reuters. Même chose en Belgique, précisaient nos confrères dans la foulée. Bon nombre de régulateurs européens suivent de près ce dossier, à n’en pas douter.
Une mise à jour arrive, l’ANFR la testera dans les 15 jours
Finalement, retournement de situation ce vendredi : « Nous publierons une mise à jour logicielle pour les utilisateurs français afin de tenir compte du protocole utilisé par les autorités françaises de régulation […] Nous sommes impatients que l'iPhone 12 continue à être disponible en France », affirme Apple à l’AFP.
C’est une nouvelle fois Jean-Noël Barrot qui monte au créneau pour donner des précisions : « Après discussions […] le constructeur Apple m'a assuré qu'il mettrait en place dans les prochains jours une mise à jour sur l'iPhone 12 […] L'ANFR se prépare à tester rapidement cette mise à jour qui permettrait à terme de rendre le modèle conforme ».
L’Agence justement explique qu’elle « demandera au laboratoire accrédité dans un délai de 15 jours d’évaluer à nouveau les valeurs de DAS dudit téléphone. Si ces mesures correctives permettent de rendre le téléphone conforme, le retrait temporaire du marché est levé ».
Enfin, l’ANFR précise que les « iPhone 12 mini, l’iPhone 12 Pro et l’iPhone 12 Max sont conformes aux exigences du marché européen ». On s’étonne simplement de voir l’iPhone 12 mini alors que la conformité est « en cours », comme l’iPhone 13, sur son site open data. .
