Coût du blocage des sites « pirates » : nouvel échec de Free devant le Conseil d’État

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Coût du blocage des sites « pirates » : nouvel échec de Free devant le Conseil d’État

Coût du blocage des sites « pirates » : nouvel échec de Free devant le Conseil d’État

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Free n’allait pas lâcher si facilement « le morceau ». Dans une énième tentative devant les juridictions, l’opérateur tentait d’obtenir enfin un texte. L’enjeu ? Être indemnisé des sommes mobilisées pour le blocage des sites contrefaisants réclamés par les ayants droit. Le Conseil d’État a néanmoins rejeté sa demande. Explications.

L’article 336-2 du Code de la propriété intellectuelle fut introduit dans notre droit à l’occasion des débats Hadopi, sur amendement du député et rapporteur Franck Riester.

Que prévoit cet article ? Avec lui, en présence d’une contrefaçon en ligne, le juge peut ordonner « toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser une telle atteinte », ce, « à l'encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier ». L’expression de blocage ou de filtrage n’apparaît pas, mais elle entre dans les prescriptions rendues possibles par ce texte qui peut être dirigé contre n’importe quel acteur, dont les FAI.

Depuis, ce fameux article 336-2 du Code a été mainte fois mobilisé par les industries culturelles notamment en mars dernier à l’encontre de plusieurs sites de streaming et direct download.

À chaque fois qu’un tel dossier apparaît à la barre, des opérateurs, et particulièrement Free, soulèvent la question de la prise en charge des coûts. Quand une décision de blocage leur tombe dessus, les FAI se voient en effet astreints à déployer d’abord des infrastructures, mais aussi du personnel pour finalement répondre aux vœux des ayants droit.

Free avait tenté de purger ce débat une fois pour toutes en réclamant du Premier ministre et du ministère de la Culture une disposition réglementaire « mettant en place un mécanisme de compensation des surcoûts supportés par les fournisseurs d'accès à internet ».

Un serpent de mer

Le thème est un véritable serpent de mer depuis la loi Hadopi. La justice européenne avait jugé néanmoins en 2014 que les sites pirates pouvaient parfaitement être bloqués aux frais des FAI, sauf situation exceptionnelle.

En 2017, la Cour de cassation confirmait cette ligne : ce n’est que « dans l’hypothèse où une mesure particulière devait s’avérer disproportionnée, eu égard à sa complexité, à son coût et à sa durée, au point de compromettre, à terme, la viabilité du modèle économique des intermédiaires techniques, qu’il conviendrait d’apprécier la nécessité d’en mettre le coût, en tout ou en partie, à la charge du titulaire de droits ».

Le 24 avril 2019, le Conseil d’État avait pour sa part rejeté la demande de question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Free.

Le Conseil constitutionnel avait en effet déjà validé l’article en question lors de l’examen de la loi Hadopi en 2009. Impossible de le saisir une nouvelle fois. Free estimait néanmoins que l’évolution de la jurisprudence précitée justifiait le réexamen plaidé. Vainement. La juridiction administrative n’a pas trouvé de circonstances nouvelles suffisamment épaisses pour justifier une transmission de QPC.

Rejet sans surprise

Free ne s’est pas avoué vaincu et a poursuivi cette procédure au fond soulevant une atteinte à la liberté d’entreprendre : le voilà astreint à supporter des frais, et donc devenir auxiliaire de justice le tout au bénéfice des ayants droit, alors que cette activité ne correspond pas à son objet social.

Le Conseil d’État va rejeter l’argument en s’appuyant sur l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 27 mars 2014.

Le droit de l’Union européenne ne s’oppose pas en effet à une telle prise en charge, pourvu que le fournisseur d’accès soit libre des moyens à mettre en œuvre et que cette mesure ne porte « pas atteinte à la substance même du droit à la liberté d’entreprise » et qu’elle n’impose pas des « sacrifices insupportables ».

« Le principe de la prise en charge par les fournisseurs d'accès à internet du coût des mesures ordonnées par le juge judiciaire sur le fondement de l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle ne peut être regardé comme méconnaissant, par lui-même, le principe de la liberté d'entreprise » conclut le Conseil d’État.

Pour que son recours puisse prospérer, Free aurait donc dû apporter des éléments solides, démontrant que « ces coûts seraient, eu égard à la fréquence, au nombre et à la complexité des opérations en cause, d'une importance telle qu'ils mettraient en péril la viabilité économique des opérateurs ».

Un principe de prise en charge désormais acté

Dans la même veine, la juridiction administrative n’a pas vu d’atteinte au droit de propriété, ni même au principe de non-discrimination. Free avait en effet mis à l’index la différence de régimes entre les dispositions relatives à la conservation des données de connexion et ce fameux 336-2.

« Il résulte de tout ce qui précède que la société Free n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir des décisions de refus du Premier ministre et du ministre de la Culture d'adopter des dispositions réglementaires mettant en place un mécanisme de compensation » expose le Conseil d’État avant de rejeter ce recours. 

« Le principe de la prise en charge par les FAI du coût des mesures de blocage L.336-2 CPI de sites ordonnées par le juge judiciaire est acté » commente Me Alexandre Archambault

Commentaires (7)


Dit simplement, la ferme et obéi. :transpi:



(reply:1837867:Ami-Kuns)




Et ils vont simplement obéir avec un bête blocage DNS non ? :transpi:


Le coût d’un réseau “china mad in france” serait lui contestable…



(quote:1837872:Kazer2.0)
Et ils vont simplement obéir avec un bête blocage DNS non ? :transpi:




La qualitay, ça se paye. :francais:



(quote:1837872:Kazer2.0)
Et ils vont simplement obéir avec un bête blocage DNS non ? :transpi:




Ils font au niveau de ce qu’ils sont payés :D



(quote:1837867:Ami-Kuns)
Dit simplement, la ferme et obéi. :transpi:




Dit simplement : Merci NXI pour cet article :D


@Marc Rees Merci pour vos articles de qualité; Une question récurrente me vient sur la mise en application de la loi Hadopi via les FAI qui ont la responsabilité et le cout du blocage. Est ce qu’il a été envisagé de faire d’appliquer le même principe pour les contenus dit “haineux” ? Ne peut on pas considérer que la protection des ayants droits est excessive à lorsque dans un même temps, la protection du simple citoyen n’est pas du tout assuré ?


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