Blocage : la Cour de cassation confirme la prise en charge des coûts par les FAI et moteurs

Blocage : la Cour de cassation confirme la prise en charge des coûts par les FAI et moteurs

Allostreaming, épisode final

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Marc Rees

Publié dans

Droit

07/07/2017 5 minutes
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Blocage : la Cour de cassation confirme la prise en charge des coûts par les FAI et moteurs

Épilogue dans l’affaire Allostreaming. La Cour de cassation vient de rejeter le pourvoi des fournisseurs d’accès qui se plaignaient d’avoir été contraints de supporter les frais de blocage d’une ribambelle de sites « pirates ». 

Le 15 mars 2016, à la demande des sociétés de défense de l’industrie audiovisuelle, la Cour d’appel de paris ordonnait le blocage de la galaxie Allostreaming (allostreaming.com, alloshowtv.com, alloshare.com, allomovies.com, etc.).

Sur le nerf de la guerre, elle jugeait surtout « légitime et conforme au principe de proportionnalité qu’ils contribuent financièrement aux mesures de blocage ou de déréférencement ». Elle demandait alors aux principaux fournisseurs d’accès français et aux moteurs de supporter ces frais. 

Stupeur pour SFR, Numéricâble, Free, Bouygues télécom, Darty télécom, Orange qui, bien évidemment, se sont pourvus en cassation pour espérer refermer la brèche. Malgré un déluge d’arguments, la Cour de cassation vient de sanctuariser l’arrêt de la Cour d’appel, lui-même très inspiré par la décision Telekabel rendue le 27 mars 2014 par la Cour de justice de l’Union européenne. 

Payer ces frais, c'est contribuer à la lutte contre le piratage

Dans son arrêt rendu hier, la haute juridiction juge que rien ne s’oppose à ce que ces coûts soient supportés par les FAI, même si les sommes sont « importantes ». Au contraire même, « nonobstant leur irresponsabilité de principe, les fournisseurs d’accès et d’hébergement sont tenus de contribuer à la lutte contre les contenus illicites et, plus particulièrement, contre la contrefaçon de droits d’auteur et de droits voisins, dès lors qu’ils sont les mieux à même de mettre fin à ces atteintes ».

Dans le même temps, elle balaye une jurisprudence fameuse du Conseil constitutionnel régulièrement appelée à la rescousse par les intermédiaires techniques. Pour mémoire, le 28 décembre 2000, les neuf Sages posaient que « s'il est loisible au législateur, dans le respect des libertés constitutionnellement garanties, d'imposer aux opérateurs de réseaux de télécommunications de mettre en place et de faire fonctionner les dispositifs techniques permettant les interceptions justifiées par les nécessités de la sécurité publique, le concours ainsi apporté à la sauvegarde de l'ordre public, dans l'intérêt général de la population, est étranger à l'exploitation des réseaux de télécommunications ». Ils en déduisaient que les dépenses en résultant ne pouvaient incomber directement aux FAI.

Mais cette jurisprudence est inapplicable selon la Cour de cassation : selon le droit européen, ces intermédiaires doivent concourir à la défense des intérêts des titulaires de droits, intérêts de nature privée.

Une prise en charge sauf sacrifices insupportables

Avant de rejeter leur pourvoi, la Cour relève que ce n’est que « dans l’hypothèse où une mesure particulière devait s’avérer disproportionnée, eu égard à sa complexité, à son coût et à sa durée, au point de compromettre, à terme, la viabilité du modèle économique des intermédiaires techniques, qu’il conviendrait d’apprécier la nécessité d’en mettre le coût, en tout ou en partie, à la charge du titulaire de droits ».

Ces lignes posées, c’est donc à bon droit que la cour d’appel a jaugé les intérêts en présence : d’un côté des FAI qui ne sont pas vraiment à la rue, de l’autre des syndicats professionnels « déjà menacé » par les sites de streaming qui pourraient ne voir leur situation « qu’être aggravé par l’engagement de dépenses supplémentaires qu’ils ne pouvaient maîtriser ». Face à une telle décision, il reviendra donc à chaque FAI, chaque moteur de démontrer concrètement que les mesures de blocage ou de déréférencement imposent « des sacrifices insupportables », dont le coût « mettrait en péril leur viabilité économique »

Seul rayon de soleil pour les intermédiaires, la même haute juridiction, sur l’autel de la liberté d’entreprendre, estime que les intermédiaires doivent avoir la liberté d’opter pour la technologie de blocage de leur choix.

Autant dire que cet arrêt sera un bon marchepied pour les actions futures ou en cours des sociétés de gestion collective et leurs syndicats de défense. D’ailleurs, le 16 juillet 2016, le TGI de Paris a jugé que le coût des mesures de blocage de TorrentReactor, TorrentHound, LimeTorrents et TorrentFunk ne pouvait « être mis à la charge des [FAI] qui ont l’obligation de les mettre en œuvre ». La juridiction s’était appuyée sur la jurisprudence constitutionnelle désormais balayée par la Cour de cassation.

Écrit par Marc Rees

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Introduction

Payer ces frais, c'est contribuer à la lutte contre le piratage

Une prise en charge sauf sacrifices insupportables

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Commentaires (11)




la cour d’appel a jaugé les intérêts en présence : d’un côté des FAI qui ne sont pas vraiment à la rue

Comme si les AD été à la rue.<img data-src=" />


j’aurais aimé que ces pauvres ad à la rue nous fassent la liste de leur patrimoine et des leurs revenus annuels comptes off-shore inclus


Au final, on peut s’attendre à ce que les FAI utilisent le blocage DNS (à priori le moins cher) et que tout cela soit contournable en 3 secondes (8.8.8.8 pour le plus connu ou OpenDNS).



Bref, les “pauvres” AD (ceux qui bloquent la chronologie des médias, oui ça aussi) qui se frottent les mains de pas avoir à payer vont se retrouver face à une passoire gratuite. Inopposable car l’obligation de moyens aura été remplie. Bien fait.




selon le droit européen, ces intermédiaires doivent concourir à la défense des intérêts des titulaires de droits, intérêts de nature privée.



Merveilleux. <img data-src=" />




D’ailleurs, le 16 juillet 2016, le TGI de Paris a jugé que le coût des mesures de blocage de TorrentReactor, TorrentHound, LimeTorrents et TorrentFunk ne pouvait « être mis à la charge des [FAI] qui ont l’obligation de les mettre en œuvre ». La juridiction s’était appuyée sur la jurisprudence constitutionnelle désormais balayée par la Cour de cassation.



Y a quand-même un truc qui me chiffonne là.

La jurisprudence constitutionnelle n’est-elle pas supérieure à la cour de cassation ? (dans la pyramide des normes)


Malheureusement non : “Contrairement à d’autres tribunaux compétents en matière constitutionnelle tels que la&nbsp;Cour suprême des États-Unis, le Conseil constitutionnel français ne se situe au sommet d’aucune hiérarchie de tribunaux, ni judiciaires ni administratifs.”



En gros, le conseil constitutionnel peut être saisi si une LOI, à l’origine d’une DECISION, semble contraire à la constitution (donc le fond). En revanche, la cour de cassation a le dernier mot sur la forme, càd l’interprétation qu’elle fait de ladite loi (et encore, c’est plus compliqué). Mais la cour de cassation peut être saisie deux fois, devant un parterre de juges différents. Au vu du dosser (quand la moyenne des juges est de 60a), c’est mal barré…








RedWave a écrit :



Malheureusement non : “Contrairement à d’autres tribunaux compétents en matière constitutionnelle tels que la Cour suprême des États-Unis, le Conseil constitutionnel français ne se situe au sommet d’aucune hiérarchie de tribunaux, ni judiciaires ni administratifs.”



En gros, le conseil constitutionnel peut être saisi si une LOI, à l’origine d’une DECISION, semble contraire à la constitution (donc le fond). En revanche, la cour de cassation a le dernier mot sur la forme, càd l’interprétation qu’elle fait de ladite loi (et encore, c’est plus compliqué). Mais la cour de cassation peut être saisie deux fois, devant un parterre de juges différents. Au vu du dosser (quand la moyenne des juges est de 60a), c’est mal barré…





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les fournisseurs d’accès et d’hébergement sont tenus de contribuer à la lutte contre les contenus illicites et, plus particulièrement, contre la contrefaçon de droits d’auteur et de droits voisins, dès lors qu’ils sont les mieux à même de mettre fin à ces atteintes





ah… on s’approche d’une redéfinition du statut de FAI/Hosting basée sur “être le mieux à même de”.








RedWave a écrit :



Au final, on peut s’attendre à ce que les FAI utilisent le blocage DNS (à priori le moins cher) et que tout cela soit contournable en 3 secondes (8.8.8.8 pour le plus connu ou OpenDNS).





Si c’est pour rester sur une solution de concentration de l’info, ça donnera juste la prochaine cible aux AD.

Orienter vers la configuration d’un serveur DNS serait plus constructif et pérenne. <img data-src=" />



Simple : les FAI annoncent +10€/mois sur les abonnements pour prendre en charge les coûts liés au piratage.

Ensuite, comme la copie privée, les utilisateurs vont croire qu’ils payent pour compenser ça, et donc iront de plus belle chercher le dernier Marvel sur Piratin.com.

Résultat les ayants droits porteront encore plus plainte, les FAI devront encore plus en supporter le coût, etc donc …. loop.

Ainsi en moins d’un an, les abonnements Internet en France coûteront un SMIC par mois, empêchant les pauvres (c’est les seuls qui piratent, tout le monde le sait) de s’abonner.

Et donc plus de piratage.



Voilà.



PS : à tous ceux qui en viendraient à exploiter cette solution, sachez qu’elle est brevetée avec une rémunération de 2500€ à chaque idée traversant la tête indiquant voulant l’exploiter. Toute personne lisant ce message doit ainsi payer la redevance.

J’accepte les espèces, chèques, carte bancaires, virement, etc.








SebGF a écrit :



Simple : les FAI annoncent +10€/mois sur les abonnements pour prendre en charge les coûts liés au piratage.

Ensuite, comme la copie privée, les utilisateurs vont croire qu’ils payent pour compenser ça, et donc iront de plus belle chercher le dernier Marvel sur Piratin.com.

Résultat les ayants droits porteront encore plus plainte, les FAI devront encore plus en supporter le coût, etc donc …. loop.

Ainsi en moins d’un an, les abonnements Internet en France coûteront un SMIC par mois, empêchant les pauvres (c’est les seuls qui piratent, tout le monde le sait) de s’abonner.

Et donc plus de piratage.



Voilà.



PS : à tous ceux qui en viendraient à exploiter cette solution, sachez qu’elle est brevetée avec une rémunération de 2500€ à chaque idée traversant la tête indiquant voulant l’exploiter. Toute personne lisant ce message doit ainsi payer la redevance.

J’accepte les espèces, chèques, carte bancaires, virement, etc.





Je valide tant que tu ne me demandes pas de payer en nature.