L’ALPA, association de lutte contre la piraterie audiovisuelle, a lancé une vague de demandes de déréférencement à l’attention de Google. Sa cible ? Les services d’abonnements « IPTV », qui permettent de profiter à prix cassés des abonnements proposés par des acteurs comme Canal+, visiblement sans l'autorisation des chaînes.
Avec la profusion des offres, la situation pour les consommateurs est financièrement intenable. S’abonner à plusieurs bouquets payants, c’est alourdir d’autant la facture mensuelle, imposant un choix selon la fortune et les goûts de chacun.
Reniflant la belle affaire, plusieurs sites se sont développés pour mettre sur le marché des packs à prix fracassés. Tell-iptv propose ainsi, pour une quarantaine d’euros l’année, « une Playlist de + 3 200 chaînes internationales et 7 000 vidéos à la demande en Français (Films, séries, documentaires, enfants, anime, sport… etc.) en HD et Full HD et 94 films en 4K ».
Les listes des chaines disponibles comprend toutes celles accessibles en Belgique, Suisse, Espagne, Portugal, Italie, Allemagne, Pays-Bas, Canada, mais aussi en Afrique, aux États-Unis ou encore en Inde. Pour la France, remarquons dans le lot, Canal+HD, Sky Sports, Bein Sports, EuroSport.
Des abonnements à vie pour moins de 200 euros
France-IPTVBox propose une « smartbox » accompagnée là aussi d’un lot d’abonnements, le tout contre la modique somme de 92 euros pour un an. Là encore, on retrouve un large éventail de chaînes IPTV françaises, avec, outre celles déjà citées, les offres Disney, National Geographic, et des centaines d’autres… Les tarifs fondent à 39 euros pour celui qui ne voudrait que d'un accès.
Abonnement-iptvdeluxe présente des formules similaires : « 3200 chaines Full HD/HD/SD+7020 VODS films en Full HD et 4K & et séries à jour », le tout compatible avec les box Kodi, l’Android TV, les télévisions connectées Samsung ou LG et autres smart TV. Chez IPtv-france, on trouve même un abonnement « à vie » pour la bagatelle de 199 euros...
Plusieurs demandes de déréférencement adressées par l'ALPA
L’ALPA, association de lutte contre la piraterie audiovisuelle, a vu d’un très mauvais œil la profusion de ces offres en ligne. Ces dernières semaines, elle a adressé une salve de demandes de déréférencement à Google (lot 1, lot 2, lot 3, lot 4, lot 5, lot 6 , etc.). Le moteur américain a été prié par exemple de désindexer 32 URL du site iptv-france.com, 36 URL concernent Ubox-tv.com, ou bien encore 8 adresses dans le giron de Shopiptvpro.com.
Voilà qui explique pourquoi, à la requête « abonnement smartiptv », Google indique désormais avoir supprimé 54 résultats, « en réponse à plusieurs réclamations reçues dans le cadre de la loi Digital Millennium Copyright Act (DMCA, loi de protection des droits d'auteur aux États-Unis) ».
Nulle surprise dans cette réaction. En septembre 2017, comme nous l’avions révélé, la Hadopi avait déjà adressé une note aux sociétés de gestion collective pour les alerter des box « Kodi », et avant tout ses « add-ons », des extensions permettant de consommer des flux audiovisuels en contournant la porte des abonnements. « Le modèle économique des chaines payantes de cinéma ou de sports, de même que celui des offres de vidéo à la demande, sont gravement menacés » craignait alors la Rue du Texel.
En avril 2017, la Cour de justice de l'Union européenne avait considéré que l'éditeur de Filmspeler, boitier chargé d’add-ons dédiés au piratage des contenus, réalisait bien un « acte de communication au public ». Soit la première marche vers une éventuelle action en contrefaçon.
La même année, Canal+ s’émouvait d’ailleurs à la porte du ministère de la Culture du piratage de son « offre globale » par ces solutions qui proposent « un accès à la quasi-totalité des bouquets payants français (Canal+, BeIN, OCS) et étrangers (Sky, BT Sports, HBO, etc.) pour quelques euros par mois ».
Le projet de loi audiovisuel et les nouveaux pouvoirs de la Hadopi
Plus récemment, en mai 2019, la même Hadopi répétait publiquement ce même message, signalant au passage que plus d’un utilisateur sur deux d’IPTV illicites s’est désabonné d’une offre légale payante, pour migrer vers ce versant plus sombre.
Dans l’avant-projet de loi Hadopi 3, lui aussi révélé par nos soins, est prévue la possibilité pour l’autorité de dresser la liste des services en ligne illicites. Cette liste, qu’elle soit rendue publique ou non, devrait être adressée systématiquement au procureur de la République, en prévision d’éventuelles poursuites. En l'état, elle sera destinée également à nourrir les accords passés avec les intermédiaires de la publicité ou du paiement pour couper les vivres de cet écosystème (« follow the money »).
Le député LREM Éric Bothorel a annoncé hier s'intéresser au sujet de l’IPTV illicite. « Nous devons nous doter d’une réponse adhoc pour mettre fin à ses pratiques illégales en détournement de flux. J’y travaille en vue du prochain véhicule législatif adéquat. »