Notre procédure CADA commence à porter ses fruits envers la Commission copie privée. Plusieurs comptes rendus ont été diffusés voilà quelques heures sur le site du ministère de la Culture. Il retrace l’avènement du barème Molotov, outre la question des marchés publics touchants aux études d’usages.
Nous avons lancé voilà plusieurs semaines une demande d’accès aux documents administratifs sur le seuil du ministère de la Culture. La Commission copie privée, instance de la Rue de Valois où se retrouvent 12 représentants des ayants droit, 6 des consommateurs et 6 des industriels, est en principe tenue de diffuser les comptes rendus de ses séances.
Ces documents sont intéressants puisque cette commission est la forge de la redevance copie privée. Une manne qui a rapporté l’an passé aux représentants des ayants droit 260 millions d’euros payés par les consommateurs ou les professionnels non remboursés, bref tous ceux qui ont acheté des supports vierges soumis à cette ponction sans beaucoup d’explications.
Souci : en 2017, seuls deux comptes rendus n’étaient disponibles que jusqu’à très récemment sur le site du ministère. Selon un décompte réalisé fin août, il y avait déjà 11 séances plénières. Manquaient donc à l’appel un bon nombre de séances.
Trois comptes rendus libérés
Nous avons donc sollicité communication de l’ensemble des comptes rendus pour l’année 2017, ainsi qu’un lot d’informations dont les convocations, documents annexés et ceux distribués aux participants ou échangés entre membres au cours de ces réunions.
Sans bruyante annonce, le ministère de la Culture a ajouté un lot de trois nouveaux comptes rendus à sa page dédiée.
Ces séances des 21 février, 14 mars et 18 avril avaient pour sujets principaux le barème des NPVR (dit barème Molotov.tv) et la préparation des études d’usages sur quatre segments : les box, les disques durs externes, les tablettes et les smartphones.
Le barème NPVR de la Fédération française des télécoms non entendu
Pour la partie NPVR, Orange, SFR et Bouygues se sont succédés autour de la table. La Fédération française des télécoms a plaidé (vainement) pour un barème le plus bas possible, en tout cas moindre que celui des box. Il a été réclamé un barème maximal de 0,28 euro par mois pour 100 Go, sur lequel aurait été appliquée en plus une décote de 40 % pour tenir compte des limitations existant sur le NPVR, soit 0,168 euro.
Le barème Molotov ayant été diffusé, on ne peut qu’admirer le coup d’épée dans l’eau : pour cette tranche, une somme de 0,417 € sera collectée par Copie France, société des ayants droit.
Le choix de l’Institut CSA face à Médiamétrie
Dans le compte rendu du 18 avril, une bataille s’est aussi opérée sur la société en charge des futures études d’usages. Ces études sont primordiales puisque de ces enquêtes dépendent des données à partir desquelles sont calculés et négociés les futurs barèmes d’assujettissement.
Pour faire simple, industriels et consommateurs ont plaidé pour confier cette mission à Médiamétrie, quand les ayants droit n’ont d’yeux que pour l’institut CSA. Alors que la première société voulait réaliser des études d’usages à distance, par téléphone, la seconde préfère le porte-à-porte.
Au fil de cette séance, Stéphane Elkon (AFNUM, Alliance Française des Industries du Numérique) a soutenu que « la méthodologie de CSA présente un risque de sur-déclaration du sondé en matière de copies privées par peur d’être en infraction ».
Et pour cause, lors des précédentes enquêtes, toutes payées par les ayants droit, l’institut CSA avait demandé à fouiller le disque dur des personnes interrogées pour connaître la volumétrie des fichiers protégés. Dans le même temps, il était demandé aux sondés d’identifier leurs sources d’approvisionnement.
De longue date, les industriels considèrent que cette technique a tendance à minimiser le nombre de copies de source illicites, tout en maximisant celles de sources licites. Or, ces dernières sont les seules à être prises en compte pour la détermination des barèmes de la copie privée. Lorsqu’un enquêteur intervient pour le compte d’une autorité relevant du ministère de la Culture, la peur du gendarme ne serait jamais loin.
À cet argument, Idzard Van Der Puyl, représentant de Copie France, a opposé qu’au contraire, « lorsque l’enquête est effectuée en face à face, c’est plutôt un risque de sous déclaration auquel il faut s’attendre ». Sans autres explications que celles vantant la qualité de ces prestations.
Finalement, l’Institut CSA l’a emporté. Les douze voix des ayants droit aidées de la voix du président ont permis à la commission d’opter démocratiquement pour ce prestataire pourtant plus onéreux que Médiamétrie.