Les plateformes collaboratives de type Airbnb ou Blablacar seront-elles bientôt tenues de déclarer au fisc les revenus générés par leurs utilisateurs ? C’est en tout cas ce que vont tenter d’imposer cet après-midi plusieurs députés de la majorité, au travers d’amendements au projet de loi de finances pour 2017.
Cette poignée d’élus de l’aile gauche du Parti socialiste, menée par Pascal Cherki, veut instaurer « une obligation de déclaration automatique sécurisée (DAS) ». Le problème ? De nombreux utilisateurs de sites de mise en relation (pour le partage de voitures ou d’appartement par exemple, ou pour la fourniture de services de type coiffure ou bricolage) échappent aujourd’hui à l'administration fiscale.
« En théorie, les revenus tirés par les utilisateurs de leurs activités sur ces plateformes sont imposés dans les conditions de droit commun – le plus souvent à l’impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), mais aussi à l’impôt sur les sociétés dans le cas d’une société présente sur une plateforme. » Sauf qu’en pratique, ces gains « sont très rarement déclarés, très rarement contrôlés, et in fine très rarement imposés. Il en résulte une perte de recettes pour l’État, une insécurité juridique pour le contribuable, et une concurrence déloyale pour certains secteurs » expliquent ces parlementaires.
L’idée : que les plateformes transmettent chaque année à Bercy une déclaration mentionnant notamment, « pour chacun de leurs utilisateurs présumés redevables de l’impôt en France », le « montant total des revenus bruts » perçus par l’internaute au titre de ses activités sur la plateforme en ligne, « ou versés par l’intermédiaire de celle-ci ». Cela « permettrait à l’administration fiscale d’alimenter la déclaration pré-remplie des contribuables, et de calculer l’impôt dû en fonction des règles applicables à chaque catégorie de revenu », annoncent les auteurs de ces deux amendements (voir ici et là).
Une réforme retoquée lors des débats sur la loi Numérique
Ce que ne disent pas ces députés, c’est que la réforme proposée avait été votée au Sénat en avril dernier, dans le cadre de l’examen du projet de loi Numérique. Le gouvernement s’y était d’ailleurs opposé (en vain), au motif que les plateformes seront bientôt tenues d’adresser chaque année à leurs utilisateurs un récapitulatif des montants bruts de leurs transactions. L’exécutif avait également insisté sur le fait que « les plateformes n’ont pas toujours d’obligation de vérification d’identité – contrairement aux banques et aux employeurs », ce qui pourrait poser « des problèmes de protection de la vie privée ».
La mesure avait finalement été retirée en commission mixte paritaire.
Rappelons enfin que l'administration fiscale dispose en outre d’un droit de communication inscrit notamment à l’article L96 G du Livre des procédures fiscales. Un outil utilisé pour traquer les éventuels resquilleurs, et qui utilisent par exemple Airbnb.