Redevance TV : le sale tour de passe-passe gouvernemental

Comment travestir une hausse fiscale
Droit 4 min
Redevance TV : le sale tour de passe-passe gouvernemental
Crédits : Leonardo Patrizi/iStock

Le psychodrame de la redevance TV étendue aux box a été clos par François Hollande. Le gouvernement a cependant décidé de compenser le manque à gagner par une légère hausse de l’actuelle contribution et une autre plus importante de la taxe sur les fournisseurs d’accès. Une mesure qui risque de revenir économiquement au même, voire d'être plus rentable pour France Télévisions et les radios publiques.

La semaine dernière, François Hollande a refusé toute extension de la redevance TV aux box, l’un des projets défendus par la ministre de la Culture. Cette porte étant refermée, il fallait donc trouver d'autres solutions afin de nourrir les caisses des chaines et radios publiques. Dans une interview au Journal du Dimanche, Fleur Pellerin a donc été priée de détailler les arbitrages gouvernementaux.

Déjà, une hausse forte de cette redevance – très visible aux yeux des contribuables - a été écartée compte tenu des promesses présidentielles sur la pression fiscale. Autre option balayée : la réintroduction de la publicité après 20 heures sur France Télévisions : « J’ai le cœur de ne pas déstabiliser les autres médias, en télévision, radio ou presse écrite, qui auraient été touchés par ce rétablissement de la publicité en soirée » claironne la ministre, anticipant déjà le contentement de TF1 ou M6.

La redevance TV augmente d’un euro, la taxe sur les FAI de 33 %

Au lieu et place, l’exécutif a décidé d'une part une hausse d’un seul euro, la note passant de 136 euros à 137 euros. Depuis la loi de finances pour 2009, la contribution à l'audiovisuel public est indexée sur l’indice des prix à la consommation, engendrant ainsi une hausse du prélèvement dès que l’inflation grimpe. Le choix gouvernemental a donc été de laisser cette disposition législative jouer sans l'ombre d'une perturbation.

Mais ce n’est pas la seule idée retenue : l’exécutif a en effet opté dans le même temps pour une hausse de la taxe sur les fournisseurs d’accès, dite taxe Copé, un dispositif validé par la justice européenne. « En complément, nous augmenterons à la marge la taxe que paient les opérateurs d’accès à l’Internet, qui passera de 0,9 % de leur chiffre d’affaires à 1,2 % » poursuit la ministre.

Cette hausse de 33 % sera intégralement affectée à l’audiovisuel public, et Fleur Pellerin croit que les opérateurs ne vont pas la répercuter sur les épaules de leurs abonnés : « la concurrence sur les prix est forte dans ce secteur et les Français changent facilement d’opérateur, je ne crois pas que les entreprises prendront le risque d’augmenter leurs tarifs. D’autant qu’elles sont en meilleure santé économique qu’il y a deux ou trois ans ; et elles bénéficient des initiatives que nous avons prises en faveur de la fibre et de la 4G. »

Orange dénonce un mépris, Free anticipe une hausse des abonnements

Cette deuxième voie a été choisie sans concertation avec les opérateurs qui l'ont apprise ce dimanche en lisant le JDD. À l’AFP, citée par la Tribune notamment, Stéphane Richard, patron d’Orange, fait part de sa colère : « C'est une forme de mépris par rapport à notre secteur, à notre industrie. On considère que l'on peut bien payer ça en plus. Une fois de plus le secteur est pris pour une vache à lait ».

Celui-ci révèle au passage la promesse de François Hollande faite il y a quelques mois aux opérateurs « aucun prélèvement supplémentaire sur les opérateurs qui ne soit affecté à l'investissement dans le secteur des télécommunications ». Raté ! « Nous sommes assez stupéfaits par cette décision. Il y a un problème de confiance et de cohérence dans la parole publique », ajoute dans les Échos, Didier Casas, le président de la Fédération française des télécoms.

Selon le numéro un d’Orange, ces 33% de hausse représentent « une ponction supplémentaire de l'ordre de 100 millions d'euros pour une entreprise comme Orange (…) C'est le montant qu'on pensait investir pour fibrer une ville comme Nantes ». Bref, c’est tout sauf neutre et il ne serait pas étonnant que ce dossier revienne devant la Cour de justice de l'Union européenne.

Quant à Free, le FAI prend déjà à contre-pied les pronostics de la ministre de la Culture : Il « est naïf de penser que ce nouvel impôt ne sera pas in fine payé par le consommateur » assure-t-on, laissant craindre une hausse des abonnements à venir voire des investissements en moins.

Une hausse répercutée sur les abonnés, un impôt supplémentaire déguisé

Si cette hausse est répercutée sur les abonnés, il n’y aura certes juridiquement pas de hausse d’impôt sur les contribuables. Mais économiquement, cela revient au même, voire pire : le levier de la taxe Copé va non seulement étendre la redevance aux box, même dans les foyers dépourvus de télévision, mais de plus, sollicitera davantage ceux des abonnés qui détiennent déjà une télévision.

Le gouvernement peut se délecter de son petit plan : il respecte en façade l’engagement présidentiel de ne pas augmenter les impôts. Visiblement toujours, il n’augmente que d’un euro la redevance par le biais de l’inflation, et surtout il laisse aux FAI le soin d’assumer l’impopularité de cette augmentation déguisée.

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