Comme prévu, Stéphane Héliot s'exprimait ce soir, à l'occasion d'un Shadow News, sur le redressement judiciaire dont Blade fait l'objet. Mais aussi sur les espoirs de l'équipe pour les mois à venir.
Ce mardi 2 mars 2021, le Tribunal de Commerce de Paris a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire concernant Blade SAS, société éditrice de Shadow. Un administrateur judiciaire a donc été nommé, l'entreprise étant en période d'observation jusqu'au 2 septembre.
Blade en redressement, 2CRSi réagit, l'équipe s'exprime
Ce n'était pas une surprise, la startup étant en difficulté ces derniers mois. Une levée de fonds était attendue en fin d'année, elle n'a pas été réalisée. Avec plusieurs millions d'euros par mois de dépense, c'était la suite logique. Comme nous l'avions évoqué dans un précédent article, les équipes ont été informées mardi soir de la procédure.
De son côté, son actionnaire et principal partenaire 2CRSi, a fait savoir qu'il restait propriétaire des serveurs mis à disposition de Blade SAS, qu'ils pourrait donc récupérer, avec un risque d'impayé dans le cadre du redressement estimé à 10,8 millions d'euros en date du 28 février 2021 (intérêts compris). Ajoutant que la filiale américaine Blade Corp lui doit également pas moins de 23,3 millions de dollars. Voici le détail des chiffres communiqués :

C'est dans ce contexte que Stéphane Héliot, l'un des cofondateurs de l'entreprise, était ce soir aux côtés de Victor Grimoin pour un Shadow News un peu spécial, pour s'expliquer auprès des clients de cette nouvelle difficulté et les rassurer, ainsi que pour afficher la volonté de l'entreprise de trouver un repreneur pour l'aider à se développer.
Des dettes et un besoin de cash
Car le service Shadow perdure et reste utilisable par les clients d'ici à une éventuelle reprise. Une procédure qui peut être rapide, mais nécessitera tout de même quelques mois pendant lesquels les créances sont mises en attente.
Les employés vont bien entendu être payés, bien qu'ils aient été prévenus en début de semaine que ce serait avec quelques jours de retard pour le mois de mars. Sur le court terme, rien ne change donc. Mais tout le monde espère que l'on saura rapidement qui propose de racheter la startup et dans quelles conditions.
Car sa situation est plus que délicate. Ses dettes se chiffrent en dizaines de millions d'euros. Un repreneur n'acceptera sans doute pas de régler ce passif en voyant dans le même temps 2CRSi reprendre ses serveurs et se retrouver avec un service inutilisable. C'est tout l'enjeu de la procédure ouverte cette semaine.
« Je suis très confiant sur le rachat »
Ce qui ressort clairement de la communication de ce soir, c'est qu'un repreneur présenté comme sérieux et solide semble déjà clairement identifié par l'équipe. Elle s'est refusée à en dire plus pour le moment, évoquant seulement le fait qu'il s'agit d'un acteur français/européen dans le secteur de l'entreprise, aux « grandes ambitions ».
Héliot présente d'ailleurs la procédure collective en cours comme « une levée de fond spéciale », qui viendrait se substituer à celle qui n'a pas eu lieu par la voie classique. Une façon un peu étonnante de voir les choses, ne serait-ce que parce que, comme il le rappelle, tous les investisseurs historiques vont ici perdre leur mise.

Le plan de cession semble déjà dans toutes les têtes et pourrait être finalisé sous deux mois. Il sera alors temps de mettre en place une nouvelle stratégie. Là aussi rien n'a été évoqué pour le moment. Interrogé sur la transparence de la startup dans sa communication, qui n'a pas toujours été au rendez-vous, le co-fondateur considère qu'ici elle « communique presque un peu trop tôt », ne pouvant encore rien dire sur l'essentiel, qui tient de l'inconnu.
Mais quelques sujets ont néanmoins été évoqués de manière disparate. Comme la question de la baisse de prix de Shadow Boost, perçue désormais comme l'un des éléments qui n'a pas arrangé la situation financière de la société. Mais aussi la gestion des dépenses : « il y a des choses que l'on paie trop cher dans ce que l'on achète aujourd'hui, on doit gérer notre argent de manière plus rigoureuse ». Et d'évoquer les tentatives de résolution des problèmes du système de stockage, avec des éléments déployés parfois pour un million d'euros lors d'essais.
L'arrivée du nouvel investisseur est donc également vue comme une manière de faire table rase du passé sur ces sujets, d'apprendre des erreurs commises. « C'est une chance de faire bien ce que l'on n’a pas toujours bien fait jusqu'à présent », ajoute Stéphane Héliot qui est confiant sur le fait que l'équipe aura enfin les moyens de ses ambitions dans un cadre sans doute plus structuré.
Shadow veut croire à son renouveau
Dans la foulée de cette intervention, en français puis en anglais, Blade a diffusé un communiqué et une FAQsur le même thème. L'entreprise s'y veut positive pour la suite : « d’ici quelques semaines, nous aurons pris un tournant stratégique d’envergure pour l’entreprise, son équipe et le développement de son activité ».
Elle évoque « une nouvelle ère » et le besoin « de repartir sur des bases nouvelles ». Pour l'équipe, il n'y a pas de doute : son ambition de créer un service de « PC dans le cloud » il y a cinq ans était la bonne, l'idée « en phase avec son temps », la demande est là, les géants américains se sont presque tous lancés sur ce créneau, même si certains ont déjà ralenti la voilure, comme Google avec Stadia.
Elle évoque son avance technologique, ses 2/3 de clients à l'étranger, les milliers en file d'attente. « Il faut désormais s’assurer qu’il se réalise, en retrouvant des marges de manœuvre financières pour investir et construire une croissance durable et rentable ». Elle évoque là aussi l'adossement « à un investisseur solide » sans donner de nom.
« Fort de notre expérience, nous connaissons mieux les conditions du succès », promet Blade. On apprend au passage que la procédure collective concernera aussi la filiale américaine.
« Ainsi, l’aventure de Shadow va se poursuivre », conclut le communiqué. « Cette opération nous donne même l'occasion de l’accélérer. Pendant cette période de transition, nous continuerons de développer notre technologie et d’assurer le meilleur service à nos utilisateurs et notre communauté, qui sont la clé de réussite du projet ».