Un décret et cinq arrêtés pour imposer l’indice de réparabilité

Un 10 en réparabilité ?
Droit 7 min
Un décret et cinq arrêtés pour imposer l’indice de réparabilité
Crédits : iStock/Witthaya Prasongsin

Très attendu, l’indice de réparabilité était annoncé pour le 1er janvier 2021 dans la loi anti gaspillage de février 2020. Un décret et cinq arrêtés précisent désormais ses rouages, en élaborant des barèmes pour des appareils spécifiques.

Dans une volonté de donner plus d’informations aux consommateurs en amont d’un achat, l’indice de réparabilité concerne les « équipements électriques et électroniques ». Le décret du 29 décembre 2020 vient ainsi compléter le Code de l’environnement en précisant les personnes visées par cet indice tout en élaborant un barème.

Sont concernés les « producteurs, importateurs, distributeurs ou autres metteurs sur le marché d’équipements électriques ou électroniques et les vendeurs de ces mêmes équipements ainsi que ceux utilisant un site internet, une plateforme ou toute autre voie de distribution en ligne dans le cadre de leur activité commerciale en France ».

Cet indice ne concerne pas que la vente dite « physique », les sites de vente en ligne ne pourront donc pas y déroger. Par ailleurs, le vendeur en ligne devra afficher « l’indice de réparabilité de manière visible dans la présentation, et à proximité de son prix » (article 1).

En d’autres termes, impossible encore pour une plateforme de le faire figurer simplement sur la boîte ou de manière discrète sur la photo du produit. Par ailleurs, pas possible non plus de déconnecter cet indice du prix : l’idée est de minimiser le risque pour le consommateur de ne pas le trouver immédiatement.

Cet indice enfin, ne concerne évidemment que « l’acte d’achat d’un équipement neuf » (article 1 du décret).

Un barème pour les gouverner tous

Les grandes lignes du barème apparaissent dans le décret évoqué plus haut :  une note sur 100, qui sera traduite en note sur 10, est établie à partir de 5 notes sur 20 prenant en compte la durée de disponibilité de la documentation technique, celle des pièces détachées et leur délai de livraison, le rapport entre leur prix de vente et celui de l’appareil, le caractère démontable de celui-ci ainsi que des critères spécifiques à chaque catégorie d’équipements.

Quatre arrêtés ont été publiés au Journal officiel le même jour pour détailler ces barèmes spécifiques. Un cinquième vient préciser les modalités d’affichage.

Difficile de tricher sur l'affichage de l'indice

Voici les couleurs choisies pour l’indice, respectant les codes exacts, définies dans l’arrêté (en code Pantone, transcrites ici en HEX/HTML):

indice réparabilité codes couleurs

La taille de la police de cette note sur 10 doit être « au moins équivalente à la taille de la police des chiffres du prix en rayon » (article 3) .

S’agissant des paramètres ayant permis d’arriver à cet indice, ils doivent être présentés conformément au tableau suivant, dans un « format numérique non modifiable », aux dimensions 21 par 29,7 cm (article 4) :

paramètres indice réparabilité

Donner un accès simplifié à la documentation technique

Quatre arrêtés s’attachent à donner les critères spécifiques à la notation d'autant de catégories d’équipements électriques et électroniques, connus pour leur obsolescence particulièrement rapide, qu’elle soit logicielle ou matérielle :

Leurs barèmes respectifs prennent notamment en compte la « mise à disposition sans frais de la documentation technique et relative aux conseils d’utilisation et d’entretien », qui a pour but de maximiser la qualité d’utilisation et la durée de vie de l’appareil en question.

Par exemple, un ordinateur portable vendu avec une documentation relative à la « détection des pannes et [aux] actions requises » disponible pendant moins de quatre ans se retrouverait à 0/10 dans le sous-critère dédié.

Renforcer la mise à disposition des pièces détachées

Un des points d’attention particulièrement saillants est relatif à l’accès aux pièces détachées. Leur prix est l'un des facteurs pris en compte.

Pour les lave-linges, par exemple, une note au prix des pièces détachées est déterminée en fonction du rapport au prix neuf de l’appareil. Si ce rapport est inférieur à 0,1 (soit 10 %) alors la note est maximale. Par exemple, une machine qui coûterait, disons 100 euros dont un des joints d’étanchéité à remplacer coûterait moins de 10 euros obtiendrait la note de 100 (rapportée sur 10, donc 10/10 sur ce point).

À l’inverse, un lave-linge dont le rapport du prix d’une pièce détachée sur le prix de celui-ci neuf est de 0,3 ou plus, obtiendra une note de zéro.

Pour les notes comprises entre 0,1 et 0,3, un tableau d’équivalence est disponible.

Concernant la disponibilité des pièces détachées des téléphones mobiles multifonctions, cette fois, des grilles de notation incitent les producteurs et distributeurs à allonger la durée de disponibilité des pièces pour faciliter leur accessibilité avec des délais de livraisons les plus courts possible.

Ainsi, un téléphone mobile possédant un connecteur de charge disponible moins de quatre ans en pièce détachée après l’achat obtiendrait un zéro pointé. Même chose si le délai de livraison de cette pièce est supérieur à 11 jours ouvrables, à compter du jour de la commande.

Par ailleurs, une note est attribuée à la « démontabilité » des pièces de l’appareil en question. Ainsi, un téléviseur dont la télécommande nécessiterait plus de quatre étapes pour avoir un « accès unitaire à la pièce » en question, obtiendra zéro, la note maximale de 3/3 étant obtenue si cet accès est possible en une seule étape.

Cet indice de réparabilité est un des points centraux de la loi anti-gaspillage de l’année dernière. De sa réussite dépendra le succès du chantier entamé par le ministère de la Transition écologique en matière de réutilisation et d’économie circulaire.

L'objectif du ministère est clair :  « atteindre 60 % de taux de réparation des produits électriques et électroniques d’ici 5 ans ». Et de compléter sur sa page de promotion de la loi anti-gaspillage : « À moyen terme, les travaux sur l’indice de réparabilité permettront de l’enrichir afin de tendre vers un indice de durabilité ».

Aller progressivement vers un indice de durabilité 

Cet indice de durabilité devra être communiqué sans frais « aux vendeurs et à toute personne qui en fait la demande », ainsi que « les paramètres ayant permis de l'établir » à compter du 1er janvier 2024.

Il était absent du projet de loi déposé par Brune Poirson. Il a été introduit à travers un amendement déposé par le sénateur Frédéric Marchand (LREM). L’objet de l’amendement initial donne quelques informations complémentaires sur sa nature : « Il s’agit d’une attente forte des citoyens français et européens. L’indice s’évalue selon une grille de critères standardisés, vérifiables et reproductibles. Les résultats de l’indice de durabilité et de chacun de ses critères sont rendus publics par le metteur sur le marché, ainsi qu’un rapport sur la méthodologie employée ».

Il prendra donc une forme ressemblant sensiblement à celle de l’indice de réparabilité, avec des attentes plus fortes qui pèseront sur les producteurs et les distributeurs des produits concernés. Il se nourrira des résultats de trois ans de pratique de l’indice de durabilité. 

Dans la version finalement adoptée, la loi anti-gaspillage prévoit que l’indice de durabilité inclura de « nouveaux critères tels que la fiabilité et la robustesse du produit ».

Que ce soit pour une vente physique ou en ligne, les vendeurs devront là encore informer « par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre procédé approprié de l'indice de durabilité de ces produits ». Un décret en Conseil d’État, prévu pour le 1er juillet 2023, viendra préciser les appareils concernés ainsi que les modalités d’application.

En attendant, voici les objectifs que se donnent les parlementaires dans le travail de définition de cet indice : « Idéalement, l’indice de durabilité devrait ainsi représenter un faisceau d’indices donnant une vision générale comprenant : réparabilité, fiabilité du service après-vente (garanties étendues et modalités d’intervention), robustesse du produit, éco-conception ainsi qu’une dimension logicielle (durée de disponibilité du support technique, réversibilité des mises à jour…) ».

Côté contraintes, le rapport du travail parlementaire sur la loi anti-gaspillage insiste sur le fait que cet indice « n’aurait pleinement de sens que s’il pouvait être associé à une sanction légale ». Mais, sur ce point, le législateur se confronte à la durée légale de conformité au niveau européen, à savoir deux ans :

« Cette durée légale peut être étendue sur le papier mais le fait que la charge de la preuve revient au producteur est d’harmonisation maximale, ce qui signifie qu’il est impossible d’aller au-delà par le moyen d’une réglementation nationale. Dans ces conditions, la mise en œuvre effective d’un indice de durabilité devrait prioritairement relever du droit européen, et en particulier des directives relatives à l’éco-conception des produits ».

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