Cette année, une chose nous a marqués dans le cadre de notre participation au MWC de Barcelone, sans que ce soit directement lié à ce qui se passe sur le salon : le cas Xiaomi. Car le constructeur chinois renforce son implantation en Europe, produits et boutiques à l'appui. Et cela ne fait que commencer.
Cette édition 2018 du Mobile World Congress de Barcelone est assurément celle de la 5G. Cette nouvelle technologie, omniprésente, sera proposée par tous nos opérateurs à partir de 2020 et commencera à arriver dans nos appareils d'ici l'année prochaine. On la trouve surtout sur des stands d'Intel et de Qualcomm qui se tirent la bourre pour être plus 5G que le voisin.
Le MWC au-delà des tendances les plus visibles
Cette année, on note d'autres tendances déjà évoquées, de l'arrivée d'Android Go à l'utilisation croissante d'Android One (sans surcouche). Un contre-coup face au poids de plus en plus important des applications et à l'énervement des utilisateurs sur la fragmentation du système de Google.
Et bien que des initiatives récentes tendent à réduire le phénomène (notamment le projet Treble), on est encore bien loin d'une situation ne serait-ce qu'acceptable pour un système de cette ampleur.
On pourrait également évoquer le « notch », largement décrié par certains sur l'iPhone X et qui arrive sur des smartphones Android tels que le View 2 (Pro) de Wiko ou le T2 Pro d'Ulefone.
Mais nous avons finalement été marqués par un autre évènement lors de nos premiers jours à Barcelone : l'implantation de Xiaomi.
Un premier pas en Europe
Il y a encore quelques années, on se demandait ce que le constructeur chinois venait faire au salon de Barcelone, si ce n'est nous narguer. La société organisait en effet une conférence de presse et disposait d'un stand pour dévoiler des smartphones intéressants, une gamme de produits assez diversifiée... sans les proposer en Europe.
À l'époque, Hugo Barra promettait à qui voulait l'entendre que l'internationalisation de la marque qu'il représentait n'était qu'une question de temps. Il avait raison, mais il aura fallu attendre qu'il quitte la société et quelques années pour que la situation évolue vraiment.
Le Xiaomi MI5 et ses prix pas vraiment en euros lors de son annonce au MWC en 2016
C'est à la fin de l'année dernière que Xiaomi a annoncé la nouvelle : une installation en Espagne, avec de la vente directe en ligne. Depuis, la société a fait du chemin et on peut voir sur son site qu'outre le revendeur chinois AliExpress, on retrouve la marque chez les géants Amazon ou PcComponentes et des boutiques physiques telles qu'Auchan, Carrefour, El Corte Inglés, la Fnac ou encore Media Markt.
Lors de notre arrivée à Barcelone, nous avons pu effectivement constater que les produits du constructeur étaient largement mis en avant au Carrefour de Gran Via 2, le centre commercial situé à quelques pas du parc des expositions où se tient le MWC chaque année.
Des Mi Store en Espagne
Mais ce n'était là qu'une première étape. Car lorsqu'on entre dans ce centre commercial, un logo « Mi » est affiché. Dans un premier temps nous pensions que c'était un dispositif publicitaire à l'occasion du salon, d'autant qu'un corner Xiaomi était improvisé dans les allées de la grande surface. Mais en réalité c'était un peu plus que ça.
Car ce 24 février, juste avant l'ouverture du MWC, une boutique Xiaomi (Mi Store) ouvrait ses portes au rez-de-chaussée de Gran Via 2. Il s'agit de l'une des trois boutiques autorisées à afficher les couleurs de la marque, les deux autres ayant été ouvertes à Madrid en novembre dernier (voir ici ou là). L'intérieur est standardisé, clairement inspiré des Apple Store mais avec un espace tout de même assez réduit.
Les revendeurs sont identifiés par un t-shirt rouge (et non bleu), sont là pour vous renseigner, et un petit coin est aménagé autour d'une télévision. Mais ne cherchez pas de grand espace où vous poser avec votre appareil pour suivre des formations le samedi après-midi, où à vous faire facturer sur un coin de table. C'est surtout la surface d'exposition des produits, avec de grandes tables en bois clair, et l'organisation des volumes principaux qui ont été reprises.
Dans ces boutiques, Xiaomi peut afficher toute l'étendue de sa gamme de produits. Le constructeur travaille en effet avec de nombreux partenaires pour proposer des appareils assez diversifiés. Vous trouverez donc aussi bien des smartphones que des sacs à dos, des souris, des routeurs Wi-Fi, trottinettes électriques et autres... serviettes de bain.
Les tarifs sont bien entendu plus élevés qu'en Chine, mais restent relativement raisonnables, les imports étant plus onéreux à cause des frais de douane. Sans parler d'un vrai bénéfice : un support assuré au niveau local.
Quels tarifs pour les produits Xiaomi en Europe ?
La TVA espagnole est assez proche de celle pratiquée en France (21 %), mais les tarifs peuvent être plus élevés chez nous sur les appareils disposant d'une grosse capacité de stockage, redevance copie privée oblige.
On trouve ainsi le Redmi 5 pour 129/159 euros, le Redmi Note 4 à 169/199 euros, le Redmi 5 Plus pour 179/199 euros, le Mi A1 pour 209/229 euros et le Mi Mix 2 pour 499/699 euros. Sont également présents de nombreux accessoires, pas forcément proposés sur la boutique en ligne Mi.com.
Il y a bien entendu la très connue Mi TV Box (79,99 euros), mais aussi des routeurs 802.11ac comme le Mi Routeur 3 (AC1200) à 24,99 euros, un répéteur Wi-Fi compact à 7,99 euros, des selfie sticks dès 8,99 euros, des batteries externes pour 9,99/14,99 euros (5 ou 10 Ah), les sacs à dos pour 24,99 euros.
Pour une serviette de bain, comptez 17,99 euros, tout de même ! Le Mi Electric Scooter est proposé pour 349,99 euros.
Les produits de Xiaomi déjà disponibles en France
Face à cette montée en puissance chez nos voisins, on peut se demander quand Xiaomi compte s'étendre en Europe, et notamment sur le marché français. Techniquement, c'est déjà le cas.
Outre les petits malins qui ont tenté de surfer sur l'import ces dernières années, on peut compter sur un acteur de poids, qui vise spécifiquement le marché français depuis 2017 : Gearbest. Comme beaucoup de marques chinoises avant elle (notamment Huawei / Honor), le revendeur s'est fait connaître par ses produits et services, mais surtout en se payant une couverture médiatique importante.
Mais pas question de publications sponsorisées cette fois. Pour une boutique en ligne, l'acquisition de trafic est encore plus simple : il suffit d'aligner un programme d'affiliation très généreux et la plupart des médias suivent comme un seul homme. Dans le cas de Gearbest, la boutique n'a pas hésité à proposer de fortes commissions auxquelles peuvent venir s'ajouter des bonus et autres produits gratuits à mettre en avant. Si vous la voyez un peu partout depuis environ un an, c'est principalement pour cela.
Or, Gearbest a décidé de passer la seconde en France et d'y implanter un entrepôt. Une chance pour toutes les marques chinoises qui veulent se faire un nom chez nous. Avec le dispositif de « communication » de Gearbest et ses tarifs très attractifs, il peut être très facile de vendre des produits dans l'Hexagone et écouler des références en masse.
Xiaomi ne s'y est d'ailleurs pas trompé et multiplie les promotions chez Gearbest, relayées de manière récurrentes chez nos différents confrères. Un petit passage sur Google News (!) permet de le vérifier.
Le Chinois s'est fait un nom, poussant les revendeurs déjà largement présents en France à référencer directement ses produits. Ainsi, on trouve des références vendues et expédiées directement par Amazon France. Il en est de même pour de nombreuses boutiques, de Boulanger à Materiel.net en passant par Conforama.
Les tarifs varient parfois fortement, notamment du fait de la redevance pour copie privée, mais ils sont bien proposés en direct par ces boutiques, pas via un sombre intermédiaire dans une marketplace. Pour le moment, c'est surtout le cas des smartphones, pas des autres produits de la marque. De plus, aucune vente directe n'est proposée par le site de Xiaomi, qui n'a pas encore de page en français.
Bientôt une arrivée plus franche dans l'Hexagone ?
Se pose alors la question de franchir cette nouvelle étape, qui consisterait à proposer de la vente en ligne et des Mi Store chez nous. Cela demande un peu plus de préparation et de logistique que de passer par des intermédiaires déjà largement présents sur le territoire.
Il faut en effet recruter des équipes pour assurer la promotion sur place, adapter le site, organiser des évènements, gérer le support technique, les relations avec la presse et les partenaires. Cela ne nécessite pas forcément de bureaux français, mais c'est un plus indéniable pour que tout se passe au mieux.
Interrogé sur le sujet, Xiaomi nous confirme son intérêt pour la France, marché où ses produits se vendent bien malgré sa présence partielle. Mais la société se refuse à nous confirmer toute date pour le franchissement d'une nouvelle étape, aucun plan n'étant arrêté. Numerama évoque de son côté une arrivée « probablement en avril 2018 » pour la mise en place d'une équipe chargée de la communication.
Surtout, il faudra préparer le terrain pour que tout se déroule dans les meilleures conditions. Car même si Xiaomi est connue de ceux qui cherchent avant tout le meilleur rapport fonctionnalités/prix, ou des adeptes de l'import, c'est loin d'être le cas du grand public. Et une fois sur place, la marque devra se battre sur un marché où les acteurs sont déjà nombreux, et présents depuis quelques années : Alcatel, Archos, Honor, Nokia/HMD, Wiko ou encore Nubia/ZTE.
En janvier, un autre constructeur chinois a d'ailleurs décidé de stopper les frais : Meizu.
Le début d'une aventure européenne, 2018 comme réel point de départ
Bref, Xiaomi n'en est qu'au début de son périple. Il lui faudra sans doute encore plusieurs mois pour déployer réellement ses ailes sur le marché européen, et jouer dans la cour des grands face à ses autres concurrents chinois.
Il sera aussi intéressant de voir quelles sont les gammes de produits qui passent progressivement nos frontières. La société s'est associée avec Microsoft autour de ses efforts d'internationalisation et de promotion de ses ordinateurs portables, qui ne sont pas proposés en Espagne pour le moment (claviers obligent ?).
Une chose est sûre, l'année 2018 et le MWC de Barcelone auront été l'occasion pour Xiaomi de montrer à l'Europe sa volonté de compter sur le continent. Au-delà de ces espoirs, reste maintenant à transformer l'essai et à réellement convaincre les utilisateurs... sur la durée.