Cela fait bientôt trois ans que nous suivons avec attention la lente migration des services de replay français vers les standards du web. Avec le passage de 6play à HTML5, nous arrivons néanmoins à la fin d'un cycle. Mais il y a encore fort à faire pour que l'internaute se sente à l'aise.
En juillet 2016, nous faisions un constat amer : alors que le service d'accès aux contenus TV Molotov devenait accessible sous Linux, les différentes chaînes de TV françaises ne se donnaient toujours pas cette peine.
Pire, on retrouvait encore la technologie Flash d'Adobe ou Silverlight de Microsoft chez certaines. Une dépendance à des plugins tiers qui n'était plus acceptable alors que HTML5 était déjà largement répandu et les DRM étant gérés tant par Chrome que Firefox. Des services de SVOD comme Netflix avaient d'ailleurs sauté le pas depuis un moment.
Un an plus tard, les choses semblent aller mieux. Même M6, assez en retard sur ce point, vient de migrer le lecteur vidéo de 6play vers une nouvelle version exploitant HTML5. Nous avons donc passé en revue le support de Linux à travers Chrome 62 et Firefox 57, sous Ubuntu Budgie 17.10.
L'occasion de voir également comment ont évolué d'autres pratiques du secteur.
HTML5 (presque) partout, quelques petits réglages parfois nécessaires
Première bonne nouvelle : HTML5 est désormais un standard exploité par toutes les grandes chaînes de la TNT qui proposent un service de replay. De TF1 à M6 en passant par Arte, France.tv, NRJ12 ou RMC Découverte, nous avons été capables de lire des contenus aussi bien sous Firefox que sous Chrome, tant que les DRM étaient activés. Seule exception : le direct des chaînes du groupe TF1 nécessite toujours Flash.
Comment savoir si tout fonctionne correctement ? L'équipe de développement de 6play, toujours assez réactive et accessible, nous a conseillé ce matin de nous rendre sur deux pages :
Cela vous permettra de voir rapidement si un élément vous manque, que ce soit au niveau des codecs ou des EME/MSE. Pour rappel, les DRM doivent être volontairement activés dans Firefox pour que certains contenus puissent être lus.
Cette activation peut vous être proposée directement par le navigateur. Vous pouvez aussi le faire manuellement en vous rendant dans le menu hamburger en haut à droite de la fenêtre, puis Options > DRM. Si des problèmes persistent, rendez-vous dans la section Plugins du gestionnaire de modules (CTRL+MAJ+A). Ici, vous devrez trouver OpenH264 et Widevine, qui doivent être placés sur la valeur Toujours activer.
Une expérience publicitaire toujours aussi décevante, quelques bonnes idées
On appréciera au passage que cette nouvelle génération de services intègre parfois de petites fonctionnalités bien pratiques. 6play permet par exemple, comme d'autres, de reprendre automatiquement un programme là où il avait été arrêté. Une solution que l'on ne retrouve pas toujours dans le replay en ligne des chaînes.
Il en est de même pour ce qui est de la répétition publicitaire, qui semble désormais limitée dans le temps dans le service de M6. Une fois le premier bloc de pre-rolls (toujours aussi indigeste) passé, vous pouvez naviguer d'un programme à l'autre sans avoir à nouveau de la publicité qui s'affiche. Une pratique appréciable, mais qui ne dure pas très longtemps.
De manière globale, l'internaute se retrouve toujours dans une situation de quasi harcèlement publicitaire. Ce, même pendant la lecture d'un direct qui contient lui-même de la publicité... allez comprendre. Ici, c'est Arte qui fait figure de bon élève et n'abuse pas. M6 et TF1 généralisent de leur côté la mise en place de pages publicitaires interstitielles qui demandent quelques secondes avant de pouvoir être passées.
Canal+ laisse trainer un pavé publicitaire, TF1 croit bon d'ajouter quelques éléments Outbrain au passage. Après tout, il n'y a pas de petits profits. Dans ce dernier cas vous pourrez découvrir « l'astuce géniale qui allégera votre facture d'électricité », comment « la femme de Zinédine Zidane affole la Toile » (par Orange Tendances) ou « le coup de gueule de Martin Weill à propos des rumeurs sur sa vie privée » sur le Huffington Post. Bref, du lourd !
Le tout vient bien entendu s'additionner aux pre-rolls classiques qui durent jusqu'à plusieurs minutes. Pour un simple extrait de 153 secondes, comptez 30 secondes de publicité sur MyTF1. Chaque extrait aboutira au même résultat. Bref, il y a encore du travail pour que l'internaute soit un minimum respecté dans l'écosystème du replay « gratuit ».
Ces groupes semblent d'ailleurs oublier que les bloqueurs de publicité sont de plus en plus utilisés. Certaines chaînes tentent néanmoins de passer outre, mais c'est le plus souvent sans effet. Lors de nos essais, seules Canal+ et NRJ12 affichaient un message expliquant que le contenu vidéo est bloqué, qui n'était pas (encore ?) contourné.
Mais dans tous les cas, des outils comme Captvty existent, permettant aux internautes de récupérer l'intégralité de ces programmes, accessibles à tous en ligne, sous la forme de vidéo à stocker sur leur ordinateur ou leur NAS.
HTTPS se répand... l'inscription obligatoire aussi
Sur le terrain des bonnes nouvelles, on note également que presque l'intégralité des chaînes est passé sur une diffusion et un accès via HTTPS. Ce n'est pas le cas de RMC et des chaînes du groupe Next Radio TV, ainsi que de celles du groupe NRJ.
Dans ce second cas, c'est plus problématique puisqu'une connexion est nécessaire pour accéder au contenu. Ainsi, les utilisateurs transmettent leur mot de passe au serveur en clair, ce qui est une pratique plutôt détestable, surtout en 2017. Elle reste malheureusement encore trop répandue.
Cela nous fait arriver à une autre déception : celle de la pratique de la connexion obligatoire qui s'étend. Après 6play, MyTF1 et NRJ12 ont sauté le pas, contrairement à France.tv qui l'avait pourtant annoncé. L'objectif ? Mieux cibler les publicités. Celles-ci ne dépendent en effet plus seulement des cookies et autres solutions de tracking, mais aussi de votre compte et de votre consommation de contenus sur la plateforme.
Certains demandent également des informations complémentaires. NRJ exige ainsi un code postal et un pays de résidence, la date de naissance et le sexe de l'utilisateur. M6 et TF1 se contentent d'un email et d'un mot de passe.
Molotov : toujours pas de version Web
Notre dernier regret concernera Molotov, un an après que le service a montré la voie en matière d'usage et de diversité des plateformes gérées. En effet, il n'est pas possible d'accéder au service à travers un simple navigateur et il faut toujours passer par une application, même sous Linux, macOS ou Windows... qui n'est qu'un Chromium packagé.
Etant donné le support de HTML5 et des DRM désormais généralisé, on ne peut que le regretter, surtout que cela permettrait de simplifier l'usage. Heureusement, un développeur a pensé aux clients de Molotov et propose une petite extension autorisant une utilisation depuis Chrome ou Firefox : Cocktail.
Espérons néanmoins que celle-ci ne sera bientôt inutile et que le service se voudra plus ouvert.