Au Sénat, la Commission de la Culture a adopté le principe d’une redevance sur les moteurs d’images dans le projet de loi Création. Une « taxe » réintroduite après sa suppression par les députés.
Le sénateur Leleux tient à sa « taxe » sur Google Images. Introduite en première lecture, la ponction avait été réduite en poudre à l’Assemblée nationale. Il faut dire que le gouvernement avait dénoncé une possible contradiction avec la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne pour qui, si une œuvre est déjà librement disponible sur Internet, l’établissement d’un hyperlien vers ce contenu n’est pas soumis à une nouvelle autorisation des ayants droit.
Un système de gestion de droits obligatoire
Au Sénat, Jean-Pierre Leleux tient malgré tout à imposer un tel système de gestion de droits obligatoire scandé, comme il le décrit, en trois étapes :
- La publication d’une image sur un site Internet entraîne automatiquement la mise en gestion de son droit de reproduction et de représentation sur un moteur de recherche au profit de sociétés de gestion de droits d’auteur agréées
- Ces SPRD se chargent de négocier des conventions avec les moteurs de recherche pour fixer un barème de rémunération et son mode de calcul (sur cinq ans, ndlr) ; elles collectent ensuite les redevances pour les reverser aux auteurs
- En cas d’échec des négociations, les règles sont fixées par une commission paritaire présidée par un représentant de l’État et dont les décisions sont publiées au Journal officiel.
Concrètement, Google et les autres moteurs auraient à payer une redevance pour le seul référencement des images mises à disposition des internautes. Cette somme serait déterminée par contrat entre les sociétés de gestion collective et les moteurs, ou, à défaut d’accord, par une commission administrative inspirée de la Commission copie privée.
La lettre d'un collectif contre la redevance Google Images
Pour trouver les sources de cette idée, il suffit de remonter par exemple à 2013, lorsque la Société Auteurs des Arts visuels et de l’Image Fixe (SAIF), une des sociétés de gestion collective du secteur de l'image, avait justement proposé pareille ponction...
En mars dernier, un collectif d’internautes, consommateurs, bibliothèques, start-ups, FAI et d’autres grandes entreprises du secteur (Asociacion de Usarios de Internet, Bitkom, Center for Democray & Technology, Centrum Cyfrowe, Communia, Computer & Communications Industry Association, Copyright for Creativity, Creative Commons, DigitalEurope, IGEL, OpenForum Europe, le Syndicat de l’Industrie des Technologies de l’Information, Tech’in France) a adressé à la ministre de la Culture une lettre pour dire tout le mal qu’il pense de cette initiative.
Pour les signataires, cette redevance aurait « un impact sur de nombreux services numériques et applications mobiles, allant des moteurs de recherche aux modèles de Creative Commons et à Europeana, la bibliothèque numérique européenne ». Avec elle, « des activités quotidiennes et élémentaires des internautes, comme le fait de publier en ligne une image ou de créer un lien redirigeant vers cette image [feraient] l’objet d’importantes incertitudes juridiques », tout en isolant la France des autres pays.
L’amendement a malgré tout été adopté en commission de la Culture au Sénat, instance chargée de préparer le texte pour son examen en séance. S’il survit à cette étape, il devra être arbitré en commission mixte paritaire puisqu’il y a désaccord avec les députés. En bout de course, c’est d’ailleurs l’Assemblée nationale qui aura le dernier mot. La taxe Google ne devrait donc pas survivre au projet de loi. Sauf (grande) surprise.