L'Organisation internationale du travail et le think tank d'IBM estiment que les intelligences artificielles pourraient créer plus d'emplois qu'elles n'en détruiront. Les personnes ayant appris à s'en servir seront, à ce titre, bien plus protégées que les autres. Les femmes, a fortiori dans les pays pauvres, seraient par contre particulièrement exposées.
« L'intelligence artificielle générative devrait augmenter plutôt que détruire des emplois », titre l'Organisation internationale du travail (OIT), l'agence « tripartite » réunissant des représentants des gouvernements, employeurs et travailleurs de 187 Etats membres des Nations Unies.
Dans une étude de 55 pages, l'OIT explique en effet que « la plupart des emplois et des industries ne sont que partiellement exposés à l'automatisation et sont plus susceptibles d'être complétés que remplacés par la dernière vague d'IA générative, telle que chatGPT » :
« Par conséquent, l'impact le plus important de cette technologie ne sera probablement pas la destruction d'emplois, mais plutôt les changements potentiels de la qualité des emplois, notamment l'intensité du travail et l'autonomie. »
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Tout dépend cela dit du type d'activités, et de responsabilités, exercées. L'OIT estime par exemple que « seule une petite partie des tâches » effectuées par les cadres, professionnels et techniciens « est considérée comme très exposée ».
A contrario, le travail de bureau s’avère être la catégorie « la plus exposée » aux technologies d’intelligence artificielles, avec près d'un quart des tâches considérées comme « très exposées » et plus de la moitié des tâches présentant un niveau d'exposition « moyen ».
La double peine des femmes, dans les pays peu développés
Tout dépend également du niveau de développement, tant économique que technologique, de son pays de résidence. L'OIT constate ainsi que 5,5 % de l'emploi total dans les pays à revenu élevé est « potentiellement exposé » aux effets d'automatisation de la technologie, alors que dans les pays à faible revenu, le risque d'automatisation ne concerne qu'environ 0,4 % de l'emploi.
L'étude révèle en outre que les effets potentiels de l'IA générative sont susceptibles de différer sensiblement pour les hommes et les femmes, la part de l'emploi féminin pouvant être affectée par l'automatisation étant plus de deux fois supérieure, du fait de la surreprésentation des femmes dans les emplois de bureau, en particulier dans les pays à revenu élevé et intermédiaire :
« Les emplois de bureau étant traditionnellement une source importante d'emplois féminins au fur et à mesure que les pays se développent économiquement, l'IA générative pourrait avoir pour conséquence que certains emplois de bureau ne voient jamais le jour dans les pays à faible revenu. »

Un taux de croissance du chiffre d'affaires supérieur de 15 à 36 %
Une étude de l'Institute for Business Value (IBV), le think tank et organisme de recherche d'IBM, avance de son côté que « l'IA ne remplacera pas les personnes, mais les personnes qui utilisent l'IA remplaceront celles qui ne le font pas ». L'étude estime que 40 % d'entre eux risquent a contrario d'être remplacés, dans les trois prochaines années, par des travailleurs ayant appris à utiliser les IA dans leurs métiers.
Pour parvenir à cette conclusion, l'IBV a interrogé 3 000 hauts responsables dans 28 pays, et 21 000 salariés dans 22 d'entre eux. 87 % des cadres interrogés pensent ainsi que les employés sont plus susceptibles d'être augmentés que remplacés par les IA génératives.
77 % des cadres interrogés déclarent que les postes de débutants subissent déjà les effets des IA génératives, et que cette tendance va s'intensifier au cours des prochaines années. Mais seuls 22 % des répondants déclarent la même chose pour les postes de direction ou de cadres supérieurs.
Elle estime en outre que les entreprises qui adoptent la technologie et qui parviennent à se recycler pour s'adapter aux changements d'emploi induits par la technologie « enregistrent un taux de croissance du chiffre d'affaires supérieur de 15 % en moyenne », et celles qui se concentrent sur l'IA « enregistrent un taux de croissance du chiffre d'affaires supérieur de 36 % à celui de leurs homologues ».
Donnez plus de sens au travail en plaçant les employés aux commandes
Des chiffres qui varient, cela dit, en fonction du type de métier exercé. 97 % des cadres estiment que les employés des chaines d'approvisionnement sont plus susceptibles d'être augmentés que remplacés, contre 93 % pour les employés des métiers du risque et de la conformité, 93 % de la finance, 77 % des services à la clientèle et 73 % du marketing.
Les salariés interrogés déclarent de leur côté que l'engagement dans un travail utile est le facteur le plus important pour eux, au-delà de la rémunération et de la sécurité de l'emploi - plus important que les conditions de travail flexibles, les opportunités de croissance et l'équité.

En outre, près de la moitié des salariés interrogés estiment que le travail qu'ils effectuent est bien plus important que la personne pour laquelle ils travaillent ou celle avec laquelle ils travaillent régulièrement.
« Donnez plus de sens au travail en plaçant les employés aux commandes », exhorte l'étude d'IBM, pour qui « il est important d'impliquer les employés dans ce processus » :
« L'IA a le potentiel de transformer l'expérience des employés. Elle peut automatiser les tâches répétitives, permettre aux gens de se concentrer sur ce qui les passionne, libérer leur temps pour le développement des compétences ou l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée, et potentiellement créer de nouveaux rôles professionnels et parcours de carrière passionnants. »