Voici la première image de Sagittarius A*, le trou noir super massif au centre de notre galaxie

Mmm des donuts !
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Voici la première image de Sagittarius A*, le trou noir super massif au centre de notre galaxie
Crédits : ESO/José Francisco Salgado (josefrancisco.org), EHT Collaboration

Le trou noir Sagittarius A* a aussi droit à sa « photo », le fruit d’un travail de longue haleine (5 ans). Désormais, les scientifiques disposent des images de « l'un parmi les plus grands, l’autre parmi les plus petits trous noirs supermassifs de l'Univers ». Une nouvelle campagne d’observation a été lancée en mars de cette année.

Il y a trois ans, Event Horizon Telescope publiait la toute première image d’un trou noir : M87*. C’était une publication très importante pour le monde de l’astrophysique. 200 scientifiques étaient impliqués, ainsi que huit télescopes sur quatre continents. Des dizaines de Po de données plus tard, la première image apparaissait sur l’écran des chercheurs. 

M87* vs Sagittarius A* : un petit proche ou un gros loin

Elle soulevait une question : pourquoi se focaliser sur M87* qui se trouve à plus de 50 millions d’années-lumière, alors que notre galaxie compte un trou noir en son centre – Sagittarius A* – qui n’est « qu’à » 27 000 années-lumière de notre planète ?

Sagittarius A*
Crédits : EHT Collaboration

Pour rappel, la masse de Sagittarius A* est d'environ de 4 millions de fois celle du Soleil, tandis que M87* est bien plus imposant avec… 6,5 milliards de fois notre étoile. Néanmoins, vue depuis la Terre, la « taille » relative des deux trous noirs est relativement proche : le plus massif se trouve aussi bien plus loin. « Les trous noirs sont les seuls objets que nous connaissons où la masse est proportionnelle à la taille. Un trou noir mille fois plus petit qu'un autre est également mille fois moins massif », précise l’European Southern Observatory (ESO).

 « Première preuve visuelle directe » que Sagittarius A* est un trou noir

Sheperd S. Doeleman (directeur du EHT) expliquait que le trou noir au centre de notre galaxie bouge plus rapidement dans le ciel que M87*, ce qui complique les observations. Il gardait néanmoins espoir d'obtenir une image un jour… et c’est désormais le cas ! Cette image est d’ailleurs « la première preuve visuelle directe » que Sagittarius A* est bien un trou noir, indique l’ESO… ce dont personne ne doutait plus depuis des années.

« Bien que nous ne puissions pas voir le trou noir lui-même, car il est complètement sombre, le gaz incandescent qui l'entoure en révèle la signature : une région centrale obscure (appelée ombre) entourée d'une structure brillante en forme d'anneau. Cette nouvelle image montre la lumière déformée par la puissante gravité du trou noir, qui est quatre millions de fois plus massif que notre Soleil », explique l’ESO. Cette découverte fait évidemment l’objet d’une publication scientifique dans The Astrophysical Journal Letters.

« Nous avons été stupéfaits de voir à quel point la taille de l'anneau correspondait aux prédictions de la théorie de la relativité générale d'Einstein […] Ces observations sans précédent ont considérablement amélioré notre compréhension de ce qui se passe au centre même de notre galaxie, et offrent de nouvelles perspectives sur la façon dont ces trous noirs géants interagissent avec leur environnement », affirme le scientifique Geoffrey Bower (Institut d'astronomie et d'astrophysique, Academia Sinica, Taipei).

Sagittarius A*
Crédits : ESO

Un donut sur la Lune observé par huit télescopes

Comme pour M87*, l'EHT a utilisé huit observatoires radio un peu partout sur la planète. Ils sont reliés entre eux afin de former un seul télescope virtuellement « de la taille de la Terre ». Les données ont été récoltées durant plusieurs nuits en 2017… au même moment que les images de M87*. Ce dernier était par contre une « cible plus facile et plus stable », ce qui explique la différence de délai dans le traitement des images.

Durant la conférence, une scientifique explique que le trou noir « apparaît dans le ciel avec la même taille qu'un beignet sur la Lune ». Le visuel dont il est question aujourd’hui « est une moyenne des différentes images que l'équipe a extraites ».

Si différents… et pourtant si proche sur les bords

Sera Markoff (coprésidente du conseil scientifique de l'EHT et professeur d'astrophysique théorique à l'université d'Amsterdam) donne quelques détails : « Nous avons deux types de galaxies complètement différents et deux masses de trous noirs très différentes, mais près du bord, ces trous noirs semblent étonnamment similaires […] Cela nous indique que la relativité générale régit ces objets de près, et que toutes les différences que nous voyons plus loin doivent être dues à des différences dans la matière qui entoure les trous noirs ».

Si Sagittarius A* arrive deux ans après M87*, c’est que créer l’image du premier « était considérablement plus difficile à réaliser ». Chi-kwan ("CK") Chan, (observatoire Steward, université d'Arizona), donne des explications : « Le gaz à proximité des trous noirs se déplace à la même vitesse – presque aussi vite que la lumière – autour de Sgr A* et de M87*. Mais alors que le gaz met des jours, voire des semaines, à décrire une orbite autour du grand M87*, il ne met que quelques minutes à le faire autour de Sgr A*, beaucoup plus petit. Cela signifie que la luminosité et la configuration du gaz autour de Sgr A* changeaient rapidement pendant que la collaboration EHT l'observait – un peu comme si l'on essayait de prendre une photo claire d'un chiot qui court après sa queue ».

Laurel contre Hardy

Plus de 300 chercheurs et 80 instituts à travers le monde ont travaillé pendant cinq ans pour mettre au point des outils complexes en utilisant des supercalculateurs pour analyser les données. Dans le même temps, ils ont compilé « une bibliothèque sans précédent de trous noirs simulés à comparer aux observations ».

« Les scientifiques sont particulièrement heureux de disposer enfin d'images de deux trous noirs de tailles très différentes, ce qui leur permet de comprendre comment ils se comparent et contrastent », se réjouit l’ESO. « Nous disposons d'images de deux trous noirs – l'un parmi les plus grands l’autre parmi les plus petits trous noirs supermassifs de l'Univers – ce qui nous permet d'aller beaucoup plus loin que jamais dans la vérification du comportement de la gravité dans ces environnements extrêmes », ajoute Keiichi Asada.

Trou noir M87* Sagittarius A*
Crédits : EHT collaboration (acknowledgment: Lia Medeiros, xkcd)

Une autre campagne de mesures en mars 2022

L’ESO termine en ajoutant que l’EHT a lancé une campagne d'observation en mars 2022 qui a mobilisé encore plus de télescopes « que jamais auparavant ». Combiné avec les « importantes mises à niveau technologiques », cela permettra aux scientifiques « de partager des images encore plus impressionnantes ainsi que des films de trous noirs dans un avenir proche ».

Lors de la campagne de mesures en 2017, les huit télescopes impliqués étaient les suivants : Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (ALMA), Atacama Pathfinder EXperiment (APEX), IRAM 30-meter Telescope, James Clerk Maxwell Telescope (JCMT), Large Millimeter Telescope Alfonso Serrano (LMT), Submillimeter Array (SMA), UArizona Submillimeter Telescope (SMT) et South Pole Telescope (SPT).

Depuis, l'EHT en a ajouté trois à son réseau mondial : Greenland Telescope (GLT), NOrthern Extended Millimeter Array (NOEMA) et UArizona 12-meter Telescope on Kitt Peak.

Nous n’avons pas plus de détails pour le moment, et il faudra certainement encore attendre des mois (voire des années) pour découvrir le fruit de cette campagne d’observation.

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