Ubuntu 22.04, nouvelle version LTS du système, sortira ce jeudi. Pour les actuels utilisateurs d’Ubuntu 20.04, dernière LTS en date, il y a donc une opportunité de mise à jour immédiate. Voici tout ce qu’il faut savoir sur cette question pas si simple.
Il y a, dans les grandes lignes, deux populations d’utilisateurs d’Ubuntu. D’abord les personnes récupérant chaque nouvelle mouture tous les six mois. Auquel cas l’arrivée d’une LTS – Long Term Support – n’est qu’une version parmi d’autres. De l’autre côté, celles et ceux préférant rester sur des LTS uniquement.
Cette préférence s’explique aisément. De la même manière que beaucoup préfèrent la stabilité aux dernières nouveautés, de nombreuses personnes restent sur les LTS, pour les mêmes raisons. Ces versions spécifiques, sortant tous les deux ans en avril, sont en effet supportées cinq ans. Pendant ce cycle, Canonical évite tout changement radical, le système ne recevant par défaut que des correctifs de sécurité et de stabilité.
Aussi, quand une nouvelle LTS arrive, la question se pose : faut-il mettre à jour ? On peut prendre son temps pour y réfléchir. Après tout, les personnes sur Ubuntu 20.04 n’en sont qu’à deux ans de support écoulés sur cinq. Autre point important, Canonical ne propose une nouvelle LTS en mise à jour qu’une fois la première « version à point » publiée. Dans le cas présent, ce sera Ubuntu 22.04.1, dans plusieurs mois.
Avant de plonger dans le « comment », faisons un détour par le « pourquoi » : y aura-t-il des bénéfices à migrer tout de suite vers la nouvelle version ?
D’Ubuntu 20.04 à 22.04, une liste dense d’améliorations
Ne tournons pas autour du pot : oui, les bénéfices sont significatifs. Deux années représentent une longue période en informatique et les améliorations ont été nombreuses depuis Ubuntu 20.04, bien plus que depuis la 21.10.
Si vous êtes sur Ubuntu 20.04, les changements seront légion. Ils commenceront dès l’installation, puisque le nouvel installeur, basé sur Fluttr, est inauguré avec la version 22.04, alias Jammy Jellyfish. L’ancien était très vieux et est avantageusement remplacé, avec des gains en performances et fiabilité selon Canonical. En outre, il possède une entrée dédiée à la réparation des installations existantes.
Ils seront également esthétiques, avec le nouveau logo, le fond d’écran attitré, l’arrivée de la couleur d’accentuation ou encore les multiples modifications survenues sur le thème par défaut, les icônes, etc. L’ensemble visuel sera donc modernisé, y compris pour les écrans de connexion et verrouillé.
Migrer signifiera aussi basculer vers GNOME 42, alors qu’Ubuntu 20.04 est actuellement sous la version 3.36. Il faudra revoir en partie ses habitudes, puisque GNOME 40 avait initié la disposition horizontale des bureaux, plusieurs manipulations changeant du même coup. La bibliothèque libadwaita, finalisée, a permis une transition des applications intégrées vers GTK4. Du moins dans la version classique, car Canonical a préféré garder les anciennes en GTK3, dont le code est plus qu’éprouvé. Cette digue, mise en place pour rester dans l’esprit LTS, sera sans doute supprimée pour Ubuntu 22.10.
Les autres changements sont nombreux, avec par exemple le panneau révisé des paramètres et sa nouvelle section dédiée au multitâche (on pourra notamment y définir les coins actifs et le comportement des bureaux virtuels en cas d’écrans multiples), le nouvel outil de captures d’écran, quelques évolutions ergonomiques dans Fichiers ou encore un remaniement profond de l’interface de Logiciels (qui en avait bien besoin).
On ne parle ici que des changements visibles. Ubuntu 22.04 apporte bien sûr des composants nettement plus récents que ceux de la 20.04, dont le noyau Linux 5.15, lui aussi LTS. Les personnes concernées pourront aussi compter sur une session Wayland par défaut prenant en charge désormais le pilote NVIDIA propriétaire.
Citons cependant au moins un changement qui ne sera pas du goût de tout le monde : le passage de Firefox en paquet snap. Décision de Mozilla, soutenue bien sûr par Canonical, le changement entraîne une hausse globale de la sécurité, le navigateur s'exécutant maintenant dans une machine virtuelle. Mais ce choix met une partie des utilisateurs en colère, non seulement parce que ce mécanisme se paye par des performances moindres, mais également parce que l'ancien paquet deb n'est plus disponible.
Comment mettre à jour ?
Sachez d’abord que vous pouvez mettre à jour dès à présent, si vous êtes déjà décidé à récupérer la nouvelle version. La diffusion de la version finale a beau être prévue pour le 21 avril, elle n’en reste pas moins déjà compilée et prête : la télécharger aujourd’hui ou dans deux jours ne changera rien.
Auquel cas la commande est :
sudo do-release-upgrade -d
Le processus va prendre un certain temps. Il va calculer l’ensemble des modifications à apporter au système, peut poser plusieurs questions de type [o/n] et va ensuite télécharger les paquets pour les installer. Il y aura également un message très « old school » pour avertir du changement sur Firefox. Le processus prend environ 30 minutes, mais le temps peut varier fortement d’une machine à une autre en fonction des performances de la machine et de la rapidité de la connexion.
Mais attention, car il s’agit d’une solution « radicale », dans le sens où toutes les PPA (Personal Package Archives) configurées seront perdues. Ce peut être rébarbatif, car on peut accumuler de nombreuses PPA avec le temps, particulièrement sur les systèmes LTS, dont l’environnement change peu. Peu de choix dans ce cas, il faudra les réinscrire ou attendre.
Si vous attendez le 21 avril, la ligne de commande sera toujours utilisable, mais une nouvelle option s’offrira à vous. Rendez-vous dans les « Logiciels et mises à jour », dans l’onglet « Mises à jour ». La ligne qui vous intéresse est la dernière : « Me prévenir lorsqu’une nouvelle version d’Ubuntu est disponible ». Si vous avez installé directement Ubuntu 20.04 ou que le système date d’une LTS plus ancienne sans avoir modifié cette option, elle est par défaut sur « Pour les versions prises en charge sur le long terme ». Il suffit d’ouvrir le menu et de sélectionner « Pour chaque nouvelle version ».
Cette fois, le système cherchera immédiatement la disponibilité d’une version plus récente, hors LTS. Pour rappel, seule la version 22.04.1 au minimum sera considérée comme LTS. Changer ce réglage permet donc de sauter cette étape et de récupérer la 22.04 flambant neuve. C’est d’ailleurs la même manipulation qui permet de passer d’une version LTS à une non-LTS, par exemple dans six mois quand arrivera Ubuntu 22.10.
Attention, mieux vaut ne changer ce réglage que jeudi soir, quand Ubuntu 22.04 sera là. Sinon, c'est l'actuelle version 21.10 qui vous sera proposée.
Faut-il mettre à jour ?
Vous vous posez peut-être la question. Il est difficile parfois de décider, entre d’un côté la stabilité d’un système qu’on préfèrerait garder en l’état, et de l’autre des nouveautés qui s’accumulent depuis deux ans, voire davantage.
La question se pose d’autant plus que certaines habitudes seront cassées : GNOME 40 est passé par là. Même si les nouveautés seront vite prises en main, mieux vaut en être conscient avant de se lancer. D’un autre côté, on peut se dire qu’il faudra tôt ou tard migrer vers une version plus récente et donc affronter ces changements ergonomiques. Avec le risque qu’ils s’accumulent avec le temps.
La problématique centrale reste la stabilité. Un système neuf peut comporter des bugs, même si la validation par Canonical signifie que rien de bloquant n'a été trouvé. Un statut classique, qui ne signifie pas qu'aucun gros problème ne se cache dans un recoin. Un contrôle qualité, même efficace, ne peut pas tous les débusquer. Voilà pourquoi une version LTS attend la première version corrigée de la suivante pour proposer la mise à jour.
Dans tous les cas, si vous n’avez jamais touché aux réglages par défaut de votre installation LTS, le système vous posera la question dans quelques mois quand Ubuntu 22.04.1 sera là. Le « Non » est une option tout à fait viable : les correctifs continueront d’affluer jusqu’en avril 2025.
Un conseil reste valable quoi que vous décidiez : sauvegardez. Au minimum, placez vos données personnelles dans un stockage externe ou dans un cloud en qui vous avez confiance, idéalement les deux.