Contre les impressions 3D illicites, un numéro d’identification pour retrouver les clients des prestataires

Kim Dot Com au cube
Droit 6 min
Contre les impressions 3D illicites, un numéro d’identification pour retrouver les clients des prestataires
Crédits : Marc Rees (licence CC-BY-SA 3.0)

Une « Charte des bonnes pratiques dans le domaine de la fabrication additive et de l’impression 3D appliquées à l’art ». Voilà ce que vient d’officialiser le ministère de la Culture. Un document préparé au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, organe consultatif chargé de conseiller la locataire de la rue de Valois.

Le 8 janvier 2018, une mission avait été confiée à Olivier Japiot et Vincent Ploquin-Duchefdelaville au sein de cette instance composée d’une majorité de représentants d’ayants droit.

Son objet ? Rédiger « une charte des bonnes pratiques portant sur l’utilisation des procédés de numérisation et d’impression tridimensionnelles et visant à prévenir les utilisations illicites d’œuvres ». Les Kim Dot Com au cube se voyaient prévenus.

charte 3D

En 2019, Next INpact avait révélé une version de travail de cette charte. Le document vient d’être finalisé, sous les dorures du ministère, et la plume de la ministre ce 8 mars.

Cette version définitive vient d’être signée par deux organismes de gestion collective (l’ADAGP et la SAIF) et six prestataires 3D (Anjou Maquettes Prototypes, Art graphique et Patrimoine SARL, Do'in 3D, Initial SAS, Prodways SA, et Aloys Tech LLC, derrière l’enseigne « Lito »).

Des professionnels du marché de l’art ont également validé son contenu (la confédération européenne des experts d'art et le syndicat français des experts professionnels en oeuvres d'arts et objets de collection) outre des organisations d’artistes/auteurs (CAAP, SMDA CFDT, SNP, UNPI), sans compter plusieurs successions, dont celle de Miro ou Magritte.

« Ces entreprises s’engagent notamment à prendre connaissance des principales règles dans ce domaine et à faire un certain nombre de vérifications auprès de leurs clients avant d’accepter une commande afin de réduire le risque de contrefaçon ou de faux artistique », résume le ministère de la Culture dans un communiqué.

Des engagements inéquitablement répartis 

La charte n’est pas un document contraignant, mais elle veut concrétiser l’engagement des signataires. Dans ce pur produit de « soft law », un comité viendra contrôler justement le respect de ces engagements.

Que prévoit cette charte ? Dans une distribution des rôles, elle concrétise noir sur blanc une série de promesses faites par les uns et les autres. Autant le dire, elles sont inéquitablement réparties, en ce sens que les prestataires 3D sont plus lourdement engagés.

De leur côté, les organismes de gestion collective (nom 2.0 des sociétés de perception et répartition des droits) s’engagent par exemple à fournir aux autres signataires toutes les informations pertinentes sur les règles relatives au droit d’auteur « et à la fraude artistique ».

Les syndicats des artistes-auteurs promettent, eux, de coopérer, toujours avec les autres signataires, pour « faciliter la mise en œuvre » de la Charte, tout en fournissant les meilleurs efforts pour répondre à leurs questions.

Et les professionnels du marché de l’art ? Ils seront vigilants « quant au respect des règles légales en matière de droit d’auteur et de fraude artistique lorsqu’ils sont en présence d’objets fabriqués en impression 3D ».

Les engagements des prestataires techniques 

Le cœur de la Charte se retrouve dans le chapitre dédié aux prestataires de la 3D. Par exemple, ils ajouteront « dans le formulaire de commande (papier ou électronique) que doivent signer leurs clients que ceux-ci ont pris connaissance de ce résumé, qu’ils certifient que leurs commandes respectent les règles en matière de droit d’auteur et de fraude artistique, et en particulier s’il s’agit de la copie d’une œuvre existante, qu’ils ont obtenu l’autorisation de l’auteur de l’œuvre ou de son ayant droit pour effectuer une telle copie, qu’elle soit numérique ou physique à moins que l’œuvre n’appartienne au domaine public ».

De même, les six professionnels devront, sous l’égide de cette charte, demander au client qui demande la reproduction à l’identique d’une œuvre, « s’il a obtenu l’autorisation de l’auteur ».

Ils insèreront sur l’objet ou dans le fichier de numérisation une mention « Reproduction ». La mention devra être « clairement visible et indélébile sur l’objet en cas d’impression 3D », sauf si exceptionnellement sa taille ou la matière ne permet pas cette précision.

Anjou Maquettes Prototypes, Art graphique et Patrimoine, Do'in 3D et les trois autres devront toujours refuser de fabriquer la copie physique d’un exemplaire numéroté, « lorsque la matière, la finition et le numéro demandés par le client sont destinés à rendre l’apparence de la copie similaire à celle de l’exemplaire numéroté ».

Un contrôle renforcé est donc exigé de ces intermédiaires techniques, avant de presser le bouton « Imprimer en 3D ». En cas de doute, ils devront contacter les organismes de gestion collective.

La mesure est inspirée des propositions du Conseil économique, social et environnemental (CESE) qui en 2015 plaidait en faveur d’un marquage obligatoire des objets imprimés en 3D. Une mesure destinée à « mieux les distinguer des originaux et d’en faciliter le contrôle (acquisition des droits pour l’édition et la diffusion, conformité à l’usage auxquels ils sont destinés) comme cela se fait déjà couramment pour de nombreux produits au sein de l’Union européenne (étiquetage, marquage « CE ») ou même au niveau mondial (poinçon pour l’identification des métaux précieux). » 

Un numéro d’identification, un fichier clients ouvert aux agents

Au point 8, ils promettent aussi d’ajouter un numéro d’identification dans les fichiers de numérisation et dans les copies physiques (sauf impossibilité matérielle). Il devra être visible à l’œil nu (ou par rayon X ou échographie et autres techniques).

Le numéro permettra d’identifier le prestataire, mais également le client. Le point 9 prévoit en effet l’édition d’un registre avec le nom et les coordonnées du client ayant passé commande.

« Dans le respect de la réglementation sur les données personnelles », les entreprises signataires s’engagent à donner accès à ce répertoire « aux personnes autorisées par la loi à constater les infractions au droit d’auteur ».

En somme, les agents assermentés des sociétés de gestion collective ou des sociétés de défense pourront avoir accès à ces listings de données à caractère personnelles pour constater d’éventuels éléments matériels d’une contrefaçon.

Un label 3D-ART-Confiance

Pour inciter d’autres acteurs à adouber ce document, un label « 3D-ART-Confiance » sera délivré aux prestataires 3D signataires. Un Comité du Label est instauré à cette fin. Il comprend notamment des représentants des industries culturelles et des professionnels du marché de l’art, mais pas des prestataires. La charte institue enfin un Comité de Suivi, assuré par le ministère de la Culture. Son rôle sera d’évaluer la mise en œuvre de ces engagements, mais aussi à promouvoir le label auprès du public, des artistes et des musées.

La Charte est accompagnée d’une annexe qui résume « les principes et textes applicables à l’impression tridimensionnelle en matière de droit d’auteur et de fraude artistique ». Définition du droit d’auteur, périmètre, composantes, droit moral, sanctions etc.

L’exception de copie privée est citée, mais uniquement pour préciser qu’elle « ne s’applique pas à la reproduction d’une œuvre destinée à être utilisée à des fins identiques à celles pour lesquelles l’œuvre originale a été créée (exposition, vente, etc.) ».

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