Le nombre de contrôles du DAS par l’ANFR est en hausse en 2020, avec 95 smartphones contre 74 en 2019. Les vérifications ont conduit à neuf mises en demeure, dont des doublés pour Xiaomi et Nokia. Ce dernier écope même d’une amende administrative, tandis que Razer a jeté l’éponge et battu le rappel de son Phone 2.
C’est au tour de l’Agence nationale des fréquences de faire son bilan de l’année 2020. Sur cette période, l’ANFR a contrôlé les débits d’absorption spécifiques (alias DAS) de 95 téléphones provenant de plus d’une trentaine de marques différentes. Tous ont été contrôlés pour le DAS tronc, 10 ont eu droit au DAS tête et 59 au DAS membres.
Sur le total, quasiment 10 % dépassaient la valeur limite réglementaire sur le DAS tronc. Huit ont eu droit à des mises à jour correctives et un smartphone a tout simplement été retiré du marché : le Razer Phone 2. HMD Global (qui s’occupe des Nokia) a même eu droit à une sanction administrative de 7 500 euros.
Comme toujours, l’Agence est libre de choisir les terminaux qu’elle souhaite vérifier, mais elle s’attaque en priorité aux marques émergentes, aux plus grosses ventes du moment et aux fabricants ayant déjà un lourd passif sur le sujet. L’année dernière, elle revendique avoir « contrôlé les téléphones représentant 82,5 % des ventes en France selon l’indice GFK ».
Une centaine de contrôles
En moyenne, l’ANFR a contrôlé environ 70 smartphones les années précédentes – 74 en 2019, 68 en 2018, 69 en 2017.En 2020, changement de cadence avec 95 contrôles. Fin 2019, le gouvernement publiait quatre actions pour « limiter l’exposition aux émissions de certains téléphones mobiles et mieux informer le public ». L’une d’elles était l’intensification de 30 % des contrôles en 2020.
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D’aucuns diront qu’augmenter les vérifications de 30 % à budget constant pourrait être compliqué à mettre en place… d’autant que la période est relativement chargée avec le lancement de la 5G, les expérimentations sur les bandes millimétriques, le Wi-Fi 6E sur les 6 GHz, etc.
Fin 2019, l’ANFR nous expliquait que « le budget lui-même n'est naturellement pas en croissance, en revanche il y a des choses que l'on peut faire. Des priorisations internes et mettre en place un certain nombre de dispositions qui permettent de faire des gains de productivité sur telle ou telle activité ».
Dans tous les cas, il y a quasiment eu une centaine de contrôles en 2020 et l’objectif de 30 % est donc bien tenu, et ce malgré la crise sanitaire et les confinements. Espérons que 2021 continue sur cette lancée.
DAS tronc, tête et membres : rapide session de rattrapage
Nous ne reviendrons pas en détail sur les différentes mesures du DAS, que nous avons déjà longuement expliqué dans de précédents articles.
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Sachez simplement que le DAS tronc est mesuré à une distance de 5 mm (depuis avril 2016) lorsque le smartphone est porté près du tronc, c’est-à-dire dans une poche de veste ou un sac par exemple. Avec le DAS tête, le smartphone est collé à l’oreille (droite et gauche). Enfin, l’ANFR dispose depuis peu des outils pour vérifier le DAS membres lorsque le smartphone est tenu dans la main, dans un brassard sur le bras, dans une poche de pantalon, etc. La distance est alors de 0 mm.
Avant de commercialiser leurs produits, les fabricants doivent effectuer des mesures et s’assurer que leurs smartphones ne dépassent par les valeurs réglementaires : 2 W/kg pour les DAS tronc et tête, 4 W/kg pour le DAS membres. De son côté, l’ANFR prélève des terminaux mobiles dans le commerce et mandate des laboratoires pour effectuer des tests. En cas de dépassement de la limite, le fabricant est mis en demeure de corriger le tir ou de battre le rappel.
L’Agence rappelle qu’il « peut exister des différences entre les valeurs déclarées par le fabricant et les valeurs publiées par l’ANFR. Ces différences proviennent de plusieurs facteurs, et notamment de l’incertitude inhérente à ce type de mesures. La norme définit en effet un maximum de 30 % d’incertitude pour les valeurs mesurées ».
Tout va bien pour les DAS tête et membres…
Avant d’entrer dans les détails, commençons par les grandes lignes de 2020 et les évolutions par rapport aux années précédentes. Sur le DAS tête, « les valeurs mesurées varient entre 0,14 W/kg et 0,84 W/kg avec une valeur médiane de 0,23 W/kg », on est donc très loin des 2 W/kg à ne pas dépasser. Depuis 2012, la tendance est largement à la baisse puisqu’on est passé d’une médiane de 0,73 W/kg à 0,23 W/kg.
Le DAS membres ne peut être vérifié que depuis un an, mais 59 smartphones ont tout de même été soumis à cet exercice. Tous « ont montré des niveaux conformes », indique l’ANFR. « Les valeurs mesurées varient entre 1,02 W/kg et 3,84 W/kg avec une valeur médiane de 2,20 W/kg ». La limite réglementaire est pour rappel de 4 W/kg.
… mais plusieurs non-conformités sur les DAS tronc
Le DAS tronc suit la même tendance à la baisse que le DAS tête avec une médiane à 1,10 W/kg… mais un maximum qui dépasse allègrement la limite réglementaire de 2 W/kg pour atteindre pas moins de 3,48 W/kg pour le Nokia 7 Plus. Il obtient ainsi le troisième plus mauvais score de tous les temps, derrière le Nokia 6.1 à 3,58 W/kg et le Allview X4 Soul Mini S qui explosait les compteurs à 4,6 W/kg.
Les années précédentes, les médianes étaient à 1,16, 1,14 et 1,23 W/kg. Il est par contre impossible de comparer ces valeurs à celles de 2016 et avant puisque les conditions des tests n’étaient pas les mêmes. Les fabricants pouvaient en effet choisir une distance entre 0 et 25 mm pour mesurer le DAS tronc et l’ANFR devait donc faire de même pour ses vérifications. Les niveaux étaient largement inférieurs avec une médiane entre 0,47 et 0,57 W/kg sur 2012 à 2016.
Une amende de 7 500 euros pour HMD Global
L’ensemble des tests non conformes se trouve donc sur le DAS tronc. Sur les 95 smartphones, neuf dépassaient la limitation de 2 W/kg. Huit ont opté pour une mise à jour logicielle, dont l’efficacité est vérifiée par l’Agence nationale des fréquences. « Les contrôles ont été concluants, sauf pour le téléphone Nokia 7 Plus (TA-1046) qui a dû faire l’objet d’une seconde mise à jour ».
L’ANFR n’a pour rappel pas le pouvoir de sanctionner un manquement, mais uniquement « la réitération de l'infraction », nous expliquait son directeur général Gilles Brégant. Elle ne s’en prive d’ailleurs pas dans le cas du Nokia 7 Plus : son fabricant HMD Global écope de 7 500 euros d’amende.
Si vous suivez le compte, il reste un smartphone épinglé qui n’a pas été mis à jour : le Razer Phone 2. Il a « fait l’objet d’un retrait du marché et d’un rappel par le responsable de la mise sur le marché », explique l’ANFR.
Les neuf pris en faute, doublé pour Xiaomi et Nokia
Voici les neuf contrevenants, avec les mesures avant et après correctif :
- Nokia 7 Plus : 3,48 W/kg et 1,58 W/kg après la mise à jour
- Razer Phone 2 : 3,29 W/kg, pas de mise à jour et retrait du marché
- Sony Xperia 5 : 2,64 W/kg et 1,13 W/kg après la mise à jour
- OnePlus 6T : 2,56 W/kg et 1,17 W/kg après la mise à jour
- Xiaomi Mi Note 10 : 2,45 W/kg et 1,12 W/kg après la mise à jour
- Gigaset GS270 Plus : 2,37 W/kg et 0,898 W/kg après la mise à jour
- Nokia 3.1 : 2,73 W/kg et 1,82 W/kg après la mise à jour
- Logicom Le Hola : 2,58 W/kg et 1,61 W/kg après la mise à jour
- Xiaomi Redmi 7 : 2,01 W/kg et 0,951 W/kg après la mise à jour
On remarque que Nokia a deux smartphones dans cette liste (1er et 7e position) et que le fabricant n’en est pas à son coup d’essai. Les Nokia 3, 5 et 6 avaient déjà été épinglés pour dépassement des limites par le passé. Cela fait donc pas moins de cinq smartphones du constructeur pris en flagrant délit, dont le Nokia 7 Plus deux fois de suite.
Xiaomi réalise lui aussi un doublé avec les Mi Note 10 et Redmi 7. Le constructeur avait également été mis à l’index deux fois les années précédentes, avec les Note 5 et Mi Mix 2S. Cela fait donc un total de quatre smartphones en dehors des clous.
La France, suivant une recommandation de l’ANSES, souhaite que la Commission européenne durcisse encore la réglementation en faisant passer la limite de 5 mm pour le DAS tronc à 0 mm (au contact). Pour le moment, aucun changement n’a été mis en place à notre connaissance au niveau européen.