DStorage, qui édite le service d’hébergement 1fichier.com a échoué dans sa procédure lancée devant l’Autorité de la concurrence. Elle espérait faire sanctionner d’éventuels comportements anticoncurrentiels, elle qui est prise dans les mâchoires de l’approche « follow the money » chère au ministère de la Culture.
En septembre 2015, un comité était installé dans l’enceinte du ministère de la Culture où se retrouvent acteurs de paiement et ayants droit ou organisme de défense (ALPA, SACEM, etc.).
Fleur Pellerin, alors locataire de la Rue de Valois, avait détaillé ses rouages : « Les ayant-droits pourront ainsi signaler aux professionnels des moyens de paiement les sites qui contreviennent massivement aux droits d’auteurs et aux droits voisins, et réciproquement, chacun selon ses compétences et ses instruments. Autrement dit, des listes seront faites, les professionnels du secteur sensibilisés, et le retrait effectif sera suivi de près ».
En d’autres termes, ce comité a eu pour ambition de rapprocher les industries bancaires et culturelles pour inciter les premières à couper les vivres des services en ligne épinglés par les seconds. C’est l’approche dite « follow the money », qu’entend régénérer la future loi Hadopi 3 en plaçant l’autorité indépendante au centre de ces accords.
1fichier.com a justement été épinglé pour sa présence un peu trop fréquente sur les sites de téléchargement illicite, lui dont le métier est avant tout d’héberger des contenus. Après cette inscription sur liste noire par le comité, la société s’est vue miraculeusement privée des services des principaux établissements financiers.
Son éditeur a depuis démultiplié les procédures devant les juridictions, non sans entreprendre une tentative parallèle devant l’Autorité de la concurrence.
Une vaine action devant l'Autorité de la Concurrence
La société a ainsi soutenu « que ces refus et ruptures, qui l’ont privée d’une solution de paiement « vente à distance » (VAD) indispensable à son activité d’hébergement de fichiers, constituent des pratiques anticoncurrentielles au sens des articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce ».
Ententes, abus de dépendance économique, les accusations sont lourdes. Par ces décisions à la chaîne prises par les établissements, DStorage estime être finalement moins bien lotie que d’autres acteurs de l’hébergement comme Amazon ou Dropbox, Icerbox, Smash & Co, etc.
L’Autorité de la concurrence a toutefois repoussé l’une après l’autre ces accusations, non sans constater que DStorage ne représente qu’un faible pourcentage de parts sur le marché de l’hébergement payant.
Surtout, les décisions prises par les établissements résultent des contrats signés par chacun d’eux avec le prestataire d’hébergement, ici un « acteur majeur de téléchargements illicites de fichiers », dixit plusieurs rapports signalés par le document mis en ligne par l’autorité.
« Les pratiques mises en évidence dans la saisine ne concernant que Dstorage, aucun effet sensible ne peut, en toute hypothèse, résulter de celles-ci sur le marché de l’acquisition, la perte de ce seul client par une trentaine d’établissements étant sans effets sur la concurrence », soutient encore la décision.
L’ADC ajoute que « la circonstance que, pendant la période incriminée, de 2012 à 2018, plusieurs prestataires de services de paiement aient adopté le même comportement à l’égard de la société Dstorage et aient, de la même façon, résilié leurs contrats ou refusé de contracter, ne saurait suffire à démontrer l’existence d’une entente entre eux ».
L’abus de dépendance économique a lui aussi été rejeté. « Dans le cas d’espèce, la saisine ne concerne pas un fournisseur en particulier, dont la notoriété et la part de marché pourraient être déterminées, mais une catégorie de prestataires, réunissant des entreprises à la notoriété et aux parts de marchés diverses, ainsi qu’aux caractéristiques hétérogènes ». Tel n’aurait pas été le cas si le schéma avait concerné un acteur économique identifié qui aurait abusé de sa position.