Les sénateurs ont visiblement du mal à digérer la fin de non-recevoir qui leur a été opposée en commission mixte paritaire, vendredi 6 avril. Le président de la commission des lois de la Haute assemblée, Philippe Bas, a fait savoir aux députés qu’il saisirait le Conseil constitutionnel.
Le compte rendu des échanges entre députés et sénateurs, qui n’ont pas réussi à trouver d’accord sur le projet de loi adaptant le droit français au Règlement européen relatif à la protection des données personnelles (RGPD), apporte de nouveaux éclairages sur les différends entre assemblées (voir ici).
On y apprend surtout que les sénateurs s’apprêtent à déférer le texte au Conseil constitutionnel. « Je ne vous cache pas que nous nous posons des questions quant à la constitutionnalité de certaines dispositions du projet de loi, que nous soumettrons au Conseil constitutionnel », a ainsi lâché Philippe Bas (LR) à l’issue des débats.
« Tout dépend de la façon dont les députés traiteront le texte »
« Nous n'avons pas encore pris de décision définitive, mais on l'envisage », tempère toutefois Sophie Joissains, la rapporteure du Sénat.
Contactée par nos soins, l’élue explique que tout dépendra des modifications qui seront retenues par les députés cette semaine (dès cet après-midi en commission, puis jeudi 12 avril en séance publique) : « Il est certain que si l’Assemblée revenait au texte initial, il y a quelques dispositions qui nous paraîtraient de nature à aller devant le Conseil constitutionnel. »
Par exemple ? Celles de l’article 14 sur la transparence des algorithmes (voir notre article), de même que celles relatives aux fichiers pénaux.
« On se décidera véritablement après le 12 », poursuit Sophie Joissains. Et pour cause, le Sénat sera certes amené à réexaminer le texte dans le cadre d’une nouvelle lecture, mais le dernier mot reviendra aux députés.
Pour déférer le texte devant le Conseil constitutionnel, il « suffit » que 60 sénateurs saisissent l’institution à l’issue de la navette parlementaire. Les « Sages » disposent alors d’un délai d’un mois pour statuer, ce qui pourrait poser des problèmes de calendrier, le RGPD étant applicable dans toute l’Union européenne à compter du 25 mai prochain. Le gouvernement pourrait néanmoins déclarer l'urgence afin de contraindre le Conseil à statuer sous 8 jours.