Earth Overshoot Day : pour se rappeler que les ressources de la Terre ne sont pas illimitées

L'Inde bon élève, bonnet d'âne pour le Luxembourg
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Earth Overshoot Day : pour se rappeler que les ressources de la Terre ne sont pas  illimitées
Crédits : Gutzemberg/iStock

L'Earth Overshoot Day 2017, c'est maintenant, mercredi 2 août. Sur les 213 premiers jours de l'année, nous aurions donc consommé l'ensemble des ressources naturelles que la planète peut renouveler en un an. Un message alarmiste s'appuyant sur des calculs parfois approximatifs, mais véhiculant une idée de fond.

Chaque année, l'organisme Global Footprint Network publie un indicateur : « le jour du dépassement mondial ». Il s'agit de la date à laquelle « l’humanité aura consommé autant de ressources naturelles que ce que la Terre peut renouveler durant l’année entière ».

Du 21 décembre en 1971, au 2 août cette année

Si tout allait bien à la fin des années 60, la situation ne cesse de se dégrader depuis. Du 21 décembre en 1971, nous sommes passés à début novembre dans les années 80, mi-octobre en 1990, fin septembre en 2000 pour finalement arriver au 2 août cette année. Il s'agit de dates actualisées et recalculées chaque année en tenant compte « des dernières données et conclusions admises par la science » précise l'ONG.

Si la méthode de calcul utilisée pour obtenir cette date fait débat (nous y reviendrons), elle permet à tout un chacun de se faire une idée de l'état de santé de notre bonne vieille Terre et de son exploitation. Global Footprint Network et WWF (fonds mondial pour la nature) tirent la sonnette d'alarme cette année encore, mais notent des « signes encourageants ». Ils en profitent pour lancer des idées que tout le monde peut mettre en œuvre.

Quand l'empreinte écologique se frotte à la biocapacité de la Terre

C'est fait, l'humanité vit donc à « crédit » en 2017 et elle utilisera cette année « environ 1,7 planète ». Pour arriver à ce résultat, Global Footprint Network utilise deux indicateurs : l'empreinte écologique des humains d'un côté, la biocapacité de la Terre de l'autre.

Dans le premier cas, il s'agit de mesurer la surface terrestre et maritime dont nous avons besoin pour produire les ressources que nous utilisons (produits alimentaires, bétail, poisson, matières premières, terrains à bâtir, espaces pour les infrastructures, etc.) et les forêts pour absorber nos émissions de carbone.

De l'autre, la biocapacité est la surface disponible pour fournir les biens et les services écologiques dont nous avons besoin (forêts, zone de pêche et de pâturage, etc.), y compris concernant l'absorption de tous nos déchets. Notez que seuls les besoins et les rejets de l'homme semblent être pris en compte, pas ceux des autres habitants de la planète, dommage.

Lorsque la biocapacité est supérieure à l'empreinte écologique, tout va bien, on parle alors d'une réserve écologique. Dans le cas contraire, il s'agit d'un déficit. Ce rapport peut être calculé au niveau d'une région, d'un pays et même de la Terre.

Des hectares globaux comme unité de mesure, des facteurs d'ajustement

La méthodologie n'est pas sans soulever plusieurs questions, notamment car elle mélange des choses différentes comme les champs terrestres et les océans. Souvenez-vous, à l'école, on expliquait qu'il ne fallait pas additionner carottes et pommes de terre, l'idée est un peu la même dans le cas présent. 

Pour contourner ce problème, des facteurs de rendement et d'équivalence sont appliqués afin de convertir tout ce petit monde en une même unité : « hectare global ». Par exemple, un hectare moyen de terres cultivées est multiplié par un facteur d'équivalence de 2,51 pour être converti en hectares globaux, alors qu'un pâturage aura un facteur de 0,42 seulement. Il n'y a pas forcément de bons ou de mauvais scores, simplement un calcul (qui n'est pas détaillé) permettant de faire rentrer tout le monde dans le même moule.

De son côté, le facteur de rendement permet de prendre en compte les différences entre les zones en termes de productivité sur un type de terrain précis. Ils sont différents pour chaque pays et calculés pour une année complète. En Allemagne par exemple, il est de 2,21 pour les terres cultivées. Multiplié par le facteur d'équivalence (2,51), on obtient ainsi un facteur de 5,6 environ. Cela signifie donc qu'un « hectare de terres cultivables est égal à 5,6 hectares globaux ». 

Une fois l'ensemble de la surface de la Terre et des océans répertoriés et triés en fonction de leur utilisation, il « suffit » d'appliquer les bons coefficients (rendement, équivalence) pour trouver la biocapacité totale de la Terre. Pour l'empreinte écologique, l'ONG compile des données provenant des différents pays et les transforme également en hectares globaux. Problème, les informations ne prennent pas toujours en compte les mêmes points et les protocoles ne sont pas forcément identiques.

Malgré ses défauts, il reste « un indicateur utile »

Cette méthode de calcul à plusieurs détracteurs, dont Michael Shellenberge du Breakthrough Institute, comme le rapportent nos confrères de Slate. Pour lui, les mesures sont « si trompeuses qu'elles ne devraient pas pouvoir être publiées dans un contexte scientifique sérieux ». Il rappelle aussi que, bien évidemment, « nous ne pouvons pas consommer plus de cultures que ce que nous en cultivons », le problème étant la pollution au dioxyde de carbone. Plutôt que l'empreinte écologique, Michael Shellenberge souhaiterait qu'on parle d'empreinte carbone.

Dans tous les cas, le jour du dépassement à l'avantage de proposer  un indice simple et imagé, malgré les défauts que nous venons de citer. C'est également l'avis de Léo Hickman, responsable WWF au Royaume-Uni : « Le concept d'hectare global est utilisé en référence depuis de nombreuses années et est calculé à partir d'une grande variété de jeux de données, mais je pense qu'il est préférable de le voir comme un indicateur utile plutôt que comme un chiffre absolu ».

Des conséquences immédiates, mais tout de même des signes encourageants

Chaque année, la date du jour du dépassement est recalculée pour toutes les années précédentes avec des données actualisées, afin de garder une cohérence dans la méthode. Par exemple, l'année dernière la date était fixée au 8 août, contre le 3 août 2016 avec la nouvelle formule. Un écart important (cinq jours) qui implique que les comparaisons ne doivent se faire qu'à périmètre constant.

Nous pouvons remarquer sur le graphique ci-dessous que l'évolution ralentit depuis 2011 : nous sommes passés du 5 au 2 août en l'espace de 6 ans. Pour la WWF, c'est un « signe que nos habitudes de consommation évoluent vers un modèle plus durable ».

Jour du dépassement mondial 2017

Pour Global Footprint Network, les conséquences ne se font pas attendre : « Les coûts de ce déficit écologique mondial sont de plus en plus évidents dans le monde, comme en atteste l’endommagement du capital naturel sous forme de déforestation, d’érosion des sols, d’appauvrissement de la biodiversité, ou encore d’accumulation de carbone dans l’atmosphère ».

Malgré le retrait annoncé par Donald Trump sur l'accord de Paris, « de nombreuses villes, États et grandes entreprises américaines ont redoublé leurs engagements » indiquent l'organisation. De son côté, la Chine – l'une des plus grosses empreintes écologiques nationales au monde – resterait engagée à construire une « civilisation écologique ». D'autres pays seraient également sur la bonne voie comme l'Écosse, le Costa Rica et le Nicaragua.

La consommation varie beaucoup d'un pays à l'autre

En plus d'un indice global, l'étude permet d'ailleurs de comparer le comportement des habitants de différents pays. Les cinq plus mauvais élèves sont : le Luxembourg, le Qatar, l'Australie, le Canada et les USA. Au contraire, si tout le monde vivait comme les Indiens, nous aurions une réserve énergétique puisqu'on ne consommerait que 0,6 Terre sur une année.

Si l'on ramène la consommation à l'échelle du pays, c'est la Corée du Sud qui arrive en tête avec un score de 8,8, suivi par le Japon avec 7,7. Pas forcément étonnant étant donné que les superficies des pays sont relativement faibles au vu de leur population. La France est pile dans la moyenne mondiale avec 1,7.

Jour du dépassement mondial 2017Jour du dépassement mondial 2017

Nicolas Hulot veut faire de nous des cosmonautes à bord du vaisseau Terre

La biocapacité de la Terre n'est pas extensible à l'infini, il faut donc diminuer notre empreinte énergétique pour faire reculer la date du dépassement mondial. C'est d'ailleurs le sens de l'annonce du jour de Nicolas Hulot qui surfe sur la vague Earth Overshoot Day.

« Si nous souhaitons laisser le temps à la nature de régénérer les ressources qui sont indispensables pour nous (notre air, notre eau, les stocks de poissons, les sols agricoles de qualité), on doit changer en profondeur notre manière de produire et de consommer. Nous vivons à crédit, forcément d'un moment à l'autre nous risquons de passer de la rareté à la pénurie » indique le ministre de la transition écologique et solidaire.

Il souhaite donc que l'on passe d'une « économie de cowboys, à une économie de cosmonaute ». Fini les ressources illimitées (ou presque), il faut faire place à un système quasiment sans déchet où tout est réutilisé, comme c'est le cas dans la Station Spatiale Internationale.

Des pistes pour changer nos habitudes

Armés du hasthag #MoveTheDate, L'ONG et WWF veulent encourager les personnes à changer leurs habitudes afin de faire reculer le jour du dépassement mondial. S'il était en régression de 4,5 jours par an, nous arriverions à l'équilibre en 2050. Problème, le dernier recul marquant date de 2009 : nous sommes passés du 16 au 20 août (soit 4 jours de répit). Il faut ensuite remonter au début des années 80. Bref, ce n'est pas gagné et cela demandera vraisemblablement de gros efforts.

Quelques pistes sont pour les particuliers. Privilégiez les véhicules propres, le vélo, la marche et le covoiturage, car les transports sont responsables de 28 % des émissions de gaz à effet de serre en France selon WWF. Deuxième axe, limiter sa consommation de viande. L'élevage est en effet responsable de 14,5 % des émissions et « produire une tonne de viande de porc nécessite 2 fois plus de surface productive qu'une tonne de céréales ». Bien évidemment, cette situation fait également écho à l'augmentation de la population mondiale qui suit une courbe de croissance très soutenue.

Enfin, privilégier les circuits courts et éviter le gâchis : « le secteur alimentaire est responsable de 18% de l’empreinte carbone mondiale. Environ le tiers de la production alimentaire mondiale destinée à la consommation humaine est gâchée ». Pour vous situer par rapport au reste du monde, Earth Overshoot Day propose un simulateur :

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