La Commission européenne annonce qu'un accord a été trouvé avec le Parlement et le Conseil de l'Union autour de la portabilité des contenus. Les Européens en voyage pourront consulter leurs contenus payés dans un autre État membre, néanmoins sans garantie de qualité de service.
Consulter ses contenus numériques dans un autre pays européen doit bientôt devenir aussi simple que dans son État d'origine. La Commission européenne annonce avoir trouvé un accord avec le Parlement et le Conseil de l'Union sur la portabilité des contenus, un projet en gestation depuis 2013. Son principe : pouvoir continuer à consulter un contenu acheté ou loué dans un pays lors d'un voyage dans un autre Etat membre. La condition est d'y être présent temporairement, un temps non-défini selon le texte préparé par les institutions européennes.
« Toute personne qui a souscrit un abonnement pour suivre sa série préférée, écouter de la musique ou assister à des manifestations sportives à domicile pourra en faire autant lorsqu'elle voyagera en Europe » résume Andrus Ansip, le vice-président de la Commission en charge du marché unique numérique, dans un communiqué. Le texte doit traiter deux questions qui empêchent habituellement cette portabilité : l'attribution des droits par les ayants droit et les pratiques des services.
Une portabilité pour services payants, sans obligation de qualité
Il ne faut pas s'attendre à une ouverture absolue des vannes. La mesure s'applique d'abord qu'aux services payants. Ceux fournissant gratuitement des contenus, comme la radio ou la télévision, auront le choix de limiter l'accès au seul lieu de résidence. Le blocage géographique dans ce domaine a donc encore de beaux jours devant lui.
Les services devront en outre vérifier le lieu de résidence de l'abonné. Plusieurs moyens sont à leur disposition, comme le contrat téléphonique, les moyens de paiement ou l'adresse IP du client, des informations dont peuvent déjà disposer ces entreprises. Les éventuelles clauses des contrats entre ayants droit et services qui limiteraient cette portabilité sont, elles, outrepassées par le texte européen.
Notons que les entreprises n'auront pas d'obligation de qualité de service en dehors du pays d'origine, pour éviter de revoir leur distribution, donc des « coûts excessifs ». Autrement dit, si un contenu est bien consultable en dehors du pays de résidence, la qualité de service n'est pas garantie. La société n'aura pas à déployer des serveurs dans toute l'Europe pour la distribution.
Cela ne devrait, en principe, pas poser de problème pour des services présents dans la majeure partie des États membres (comme Spotify), mais plus pour d'autres qui sont liés à un pays particulier.
Bataille autour de la protection du droit d'auteur
Depuis le début des travaux sur le dossier, une partie des ayants droit avaient lancé l'alerte sur une possible disparition de la territorialité des droits, qui est la base d'une part de leurs rémunérations... Cela même si le texte européen n'allait, en aucun cas, aussi loin.
L'État français avait lourdement milité contre le rapport de l'eurodéputée « pirate » Julia Reda, en faveur de l'ouverture des contenus au niveau européen (voir notre analyse). De même, les représentants français en Europe insistaient, en 2015, sur l'importance de préférer la portabilité des services à une remise à plat de la gestion des droits dans l'Union (voir aussi notre analyse). Pour eux, il fallait bien que ce droit de consulter des contenus numériques dans un autre pays soit « temporaire ». Une notion qui n'est toujours pas définie aujourd'hui.
Les futures règles doivent s'appliquer dès début 2018, neuf mois après leur adoption définitive par les institutions européennes. Elles doivent encore être validées officiellement par le Parlement et le Conseil de l'Union européenne, même si cela ne devrait plus être qu'une formalité.