La démission de Manuels Valls, attendue d’ici demain, va-t-elle entrainer la fin de l’état d’urgence ? Pas si sûr, si on lit bien la loi de 1955 sur le sujet.
La dernière loi de prorogation du 22 juillet 2016 de l’état d’urgence a étendu de six mois ce régime. Fin novembre, l’AFP indiquait qu’une nouvelle loi serait adoptée le 21 décembre par les députés. Viendra ensuite le tour des sénateurs en janvier 2017.
Seulement, depuis, deux nouvelles ont endossé le rôle du gros grain de sable : on le sait, François Hollande ne briguera pas de deuxième mandat et, selon le Journal du Dimanche, Manuel Valls quittera Matignon d’ici mardi 6 décembre afin de se lancer sur la piste de la présidentielle.
De l’effet de la démission de Manuel Valls sur l’état d’urgence
Confirmée, cette décision politique ne sera pas sans conséquences juridiques. « La loi portant prorogation de l'état d'urgence, explique en effet l’article 4 de la loi de 1955, est caduque à l'issue d'un délai de quinze jours francs suivant la date de démission du gouvernement ou de dissolution de l'Assemblée nationale ».
Or, « la démission du Premier ministre entraine automatiquement celle du gouvernement » nous rappelle le constitutionnaliste Pascal Jan. Du coup, très logiquement, de nombreux commentateurs en déduisent que cet état exceptionnel, qui autorise notamment la confiscation et l’exploitation des données informatiques, prendra automatiquement fin.
Un tel scénario irait cependant à contre-sens du vœu de l’exécutif de prolonger l’état d’urgence jusqu’aux élections présidentielles. Une sordide impasse ? Pas si sûr.
Une caducité évitée par une nouvelle loi de prolongation
Selon la grille de lecture de cet agrégé de droit, la caducité – qui met un terme à l’acte législatif, sans rétroactivité – et le calendrier vont pouvoir empêcher cette issue fatale. « La loi dit seulement que l'état d'urgence est caduc, mais sous entendu, sous réserve de reconduction. Le vote de la loi de reconduction de l'état d'urgence devant intervenir le 21 de ce mois. Ainsi, 6+15 = 21, donc nous serons dans les clous » calcule l’enseignant.
En d’autres termes, l’intervention d’une nouvelle loi de reconduction d’ici le 21, votée aussi bien par les députés que les sénateurs, permettra d’assurer la continuité qui aurait dû s’interrompre avec la caducité. L’occasion permettra d’ailleurs au législateur de mettre à jour le texte que le Conseil constitutionnel a partiellement censuré la semaine dernière, s’agissant du sort des données informatiques rattachées à une menace, mais déliées de toute infraction.