Sauf surprise, le Parlement devrait bientôt confirmer l’introduction dans notre droit d’un délit de « signalement de contrôleurs ». Tous ceux qui avertiront de la présence d’agents SNCF ou RATP, notamment via les réseaux sociaux, deviendront passibles d’une peine de deux mois de prison et de 3 750 euros d’amende.
Adoptée successivement par l’Assemblée nationale et le Sénat, la proposition de loi de lutte contre la fraude dans les transports publics s’apprête à être votée dans les mêmes termes par les deux assemblées. Un compromis a en effet été trouvé mercredi 10 février en commission mixte paritaire (instance composée pour mémoire de sept députés et sept sénateurs).
Le texte retenu par les parlementaires (consultable ici) introduit un nouvel article au Code des transports, en vertu duquel le fait de « diffuser » un « message de nature à signaler la présence de contrôleurs ou d'agents de sécurité employés ou missionnés par un exploitant de transport public de voyageurs » deviendra expressément puni de deux mois de prison et de 3 750 euros d'amende. Ce nouveau délit sera constitué quel que soit le « moyen » de diffusion de l’avertissement, et « quel qu'en soit le support » : SMS, tweet, message privé sur Facebook, email, pigeon voyageur, signaux de fumée...
Des dispositions jugées « disproportionnées » par le Sénat
Ces dispositions, introduites à l’Assemblée nationale afin de lutter contre les « mutuelles de fraudeurs », avaient pourtant été supprimées par le Sénat il y a quelques semaines. En commission, le rapporteur François Bonhomme (sénateur Les Républicains) s’était notamment élevé contre le caractère disproportionné des sanctions encourues par les contrevenants. L’intéressé faisait ainsi remarquer qu’une « simple » contravention de 5ème classe – jusqu’à 1 500 euros d’amende – était par exemple prévue pour ceux qui tentent de se soustraire aux contrôles routiers (fameux article R413-15 du Code de la route, invoqué dans l’affaire du groupe Facebook « qui te dit où est la police en Averyon »).
Jusqu’à 6 mois de prison et 45 000 euros d'amende pour les mutuelles de fraudeurs
Pour sanctionner ceux qui font directement la promotion des mutuelles de fraudeurs (ces collectifs qui remboursent les amendes de ceux qui se font prendre, grâce aux « cotisations » du groupe), la commission mixte paritaire a opté pour un léger toilettage de la loi de 1881 sur la liberté de la presse, comme l'avaient voulu les députés. Il deviendra ainsi interdit « d'ouvrir ou d'annoncer publiquement des souscriptions » ayant pour objet d'indemniser les contraventions dressées par la police des transports. La peine encourue : jusqu’à six mois de prison et 45 000 euros d'amende.
Le Sénat est désormais appelé à se prononcer sur ce texte le 2 mars prochain. Aucune date n’a encore été fixée du côté de l’Assemblée nationale, mais en principe les accords issus de « CMP » sont soumis aux parlementaires des deux chambres dans des délais très proches (le même jour ou le lendemain).