L’amendement écologiste visant à interdire définitivement les machines à voter en France n’a pas été adopté hier par l’Assemblée nationale. Sans grande surprise, le rapporteur Jean-Jacques Urvoas (PS) et le gouvernement y ont émis un avis défavorable, estimant notamment qu’en cas d’approbation, il pourrait se transformer par ricochet en cavalier législatif. La députée Danièle Auroi l’a ainsi retiré, sans qu’il ne fasse l’objet d’un vote formel.
Et si l’on interdisait définitivement les machines à voter, dont l’expansion a été stoppée net en 2007 suite à différents incidents ? C’est en tout cas l’objet d’un amendement écologiste qui devrait être débattu demain à l’Assemblée nationale.
Autorisées en France depuis 1969, les machines à voter semblent plus que jamais proches de la sortie. Un moratoire a en effet été introduit par les pouvoirs publics il y a huit ans, en vertu duquel aucune nouvelle commune n’est désormais habilitée à opter pour ces appareils électroniques. Et pour cause, plusieurs mésaventures ont été constatées en 2007, lors des élections présidentielle et législatives : écarts entre le nombre d’émargements et de votes, temps d’attente parfois très long pour les utiliser, etc. En 2012, on dénombrait malgré tout une soixantaine de villes qui utilisaient encore cette technique de vote, pour environ 1,1 million d’électeurs concernés.
Une soixantaine de villes continuent d’utiliser des machines à voter
Cette situation de « ni-ni » (ni interdiction totale, ni autorisation globale) commence cependant à faire grincer des dents. Les députés du groupe écologiste – à l’exception toutefois de Paul Molac – ont en effet co-signé un amendement visant à prohiber définitivement l’utilisation des machines à voter en France. Les quelques communes qui disposent encore de tels appareils seraient ainsi contraintes de les abandonner.
« Le rapport des sénateurs Alain Anziani et Antoine Lefèvre, publié l'an dernier, était très critique sur ces machines à voter, rappellent les parlementaires. Outre des difficultés d'usage et un coût élevé, les sénateurs notaient un défaut d'assurance technique qui permettrait de garantir la sincérité du scrutin. Ainsi, un dysfonctionnement de la machine, des rayonnements cosmiques ou la malveillance peuvent altérer le fonctionnement de la machine. De plus, il est impossible pour l'électeur de vérifier son vote. Cette absence de fiabilité du vote électronique a conduit l'Irlande à renoncer à l'utilisation des machines à voter, depuis 2009. »
Il y a un an, le gouvernement ne voulait pas toucher au moratoire de 2007
Si ces critiques sont bien connues, le gouvernement s’est toujours montré réticent à un changement radical sur ce dossier. Interrogé par la députée Isabelle Attard, le ministre de l’Intérieur soutenait il y a quasiment un an jour pour jour qu’il ne souhaitait pas revenir sur le moratoire de 2007, dans la mesure où « aucun dysfonctionnement remettant en cause la sincérité du scrutin [n’avait] été relevé par l'État ou le juge des élections depuis le début de l'utilisation de ces machines ».
« On en sait rien ! Et c'est d’ailleurs bien le problème de ce vote électronique... » avait rétorqué le sénateur Philippe Kaltenbach (PS), qui milite de longue date pour l’interdiction des machines à voter, lorsque nous l’avions interpellé au sujet de cette position de l’exécutif (voir notre interview). « Rien ne dit qu'il y a des fraudes, mais rien ne dit qu'il n'y en a pas non plus. Rien ne dit que tout est parfait, mais rien ne dit que ce n'est pas le cas non plus. C'est toute la difficulté. »
L’amendement des écologistes devrait être débattu demain après-midi dans l’hémicycle de l'Assemblée nationale, lors de l'examen de la proposition de loi de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle.