Je t’ouvre mon catalogue, tu me refiles une participation dans ton capital. Voilà le petit deal qu’a passé Deezer avec trois majors, deal que détaille aujourd’hui BFM Business.
Universal Music, EMI et Warner Music ont conditionné l’ouverture de leur catalogue en échange de bons de souscription d'actions au capital du site de musique en ligne Deezer. Le deal avait déjà été éventé dans le passé, notamment dans le rapport Zelnik ou par l’Express. Selon BFM Business, toutefois, l’affaire est rondelette puisque les trois mousquetaires ont dans leur besace un potentiel chèque de 200 millions d’euros.
Explications. Ces BSA, dans le jargon financier, permettent aux porteurs d’acheter des actions à un prix déterminé par avance. Lorsque l’action s’envole au-delà de ce prix, l’instrument offre alors la possibilité d’une belle bascule. Et c’est ce qui semble être le cas pour les trois majors qui ont pu engloutir ces BSA à bas prix voire gratuitement. « En 2012, lorsque Deezer avait été valorisé un peu moins de 300 millions d’euros, explique en guise d’exemple BFM, Universal Music avait déjà chiffré son gain latent à 20 millions d’euros ». Puisque Deezer est évalué désormais à 1 milliard d’euros, Universal est assis sur 60 millions d’euros grâce à cette opération.
Un gâteau, mais peu d'invités
Ce n’est pas une spécificité française puisque Spotify est lui aussi détenu à 18 % par les majors. Seulement, à l’instar des conférences de presse Universal, la fête est très sélective. Ni les producteurs indépendants, ni les interprètes, ni les auteurs, ni les compositeurs n’ont droit à une part du gâteau Deezer. Les bénéficiaires s’octroient ainsi un pont d’or, laissant les autres patauger dans les règles traditionnelles, celles du partage des revenus en fonction de l’écoute notamment. Des règles qui profitent également aux producteurs.
On est en tout cas bien loin de la préhistoire, quand en 2007, Universal estimait que ses titres étaient exploités illégalement par Deezer, fraichement lancé. Et que Pascal Nègre était en quête d'un deal technique et financier avec la plateforme. Le deal désormais signé n’a finalement rien de choquant en lui-même, puisque comme nous le confie un acteur du secteur, l’argent reste d'une certaine manière dans l'univers culturel. Il reste que la transaction laisse bon nombre de créateurs de côté, les contrats de rémunération ne prenant pas en compte les gains générés par ces juteux BSA.