Droit à l'oubli : Google refuse le déréférencement mondial exigé par la CNIL

Un grain dans le moteur
Droit 3 min
Droit à l'oubli : Google refuse le déréférencement mondial exigé par la CNIL
Crédits : iStock/ThinkStock

Mi-juin, la CNIL a mis en demeure Google d’amplifier le « droit à l’oubli » à l’échelle mondiale, seule solution selon elle pour le rendre effectif chez les internautes. Seulement, le moteur américain ne partage pas cette analyse et veut circonscrire ce coup de gomme aux seules extensions européennes.

Ce « droit à l’effacement » ou « droit au déréférencement », termes plus appropriés, a été reconnu en mai 2014 par la Cour de justice de l’Union européenne. Les magistrats ont en effet qualifié les exploitants de moteur de recherche de gestionnaires de données personnelles. Conséquences douloureuses ? Les Google, Bing, Yahoo et autres Orange ou Qwant doivent appliquer les dispositions de la directive 95/46 sur la protection des données personnelles. Ainsi, les données à caractère personnel doivent être traitées « loyalement » et « licitement », ou encore être « adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées ». Le texte européen oblige aussi à ce que ces mêmes données soient « exactes et, si nécessaire, mises à jour » etc., sous peine de devoir être retirées à la demande des principaux concernés.

En d’autres termes, quiconque peut donc désormais exiger d’un moteur l’effacement des traces personnelles qu’il trouverait dans les résultats d’une requête, du moins si ces traces sont effectivement inadéquates, non pertinentes ou excessives. Au-delà de la subjectivité de ces leviers, un point oppose la CNIL et Google : c’est celui de la portée géographique du « droit à l’oubli ». Les positions sont simples : la CNIL exige un déréférencement mondial, et pas seulement européen, dès lors qu’un Français exposerait un motif légitime : .fr, .de, .es, .co.uk, mais également .org, .com, .jp, etc. En face, Google a toujours refusé une telle extension. Et mi-juin, ce bras de fer est monté d’un cran.

L'extension, un simple chemin d'accès pour un traitement unique

La Commission a ainsi adressé une mise en demeure au moteur pour casser sa résistance, expliquant que les différentes extensions de nom de domaine utilisées par Google ne sont finalement que « des chemins d’accès techniques » à un « traitement unique » (voir également cette actualité). Une demande doublée d’une menace d’amende pénale pouvant grimper jusqu’à 1,5 million d’euros pour ces infractions avec, en sus, 7 500 euros encourus pour chaque dossier refusé.

Hier, sur l’un de ses blogs, Google a révélé avoir ausculté 250 000 demandes de déréférencement concernant un million de pages européennes. Pour l’occasion, il a réitéré sa nette opposition à toute idée de nettoyage mondial, le moteur craignant de graves effets de bord. « Il y a d’innombrables exemples où des contenus déclarés illicites par un pays sont légaux dans d’autres. La Thaïlande criminalise par exemple les propos qui critiquent son roi, la Turquie sanctionne ceux qui s’en prennent à Atatürk, la Russie réprime les discours qualifiés de propagande gay. »

Le déréférencement mondial : inutile et dangereux selon Google

L’entreprise américaine anticipe ainsi une « course vers le bas » : « Nous pensons qu’aucun pays ne devrait avoir l’autorité de contrôler les contenus auxquels une personne peut accéder depuis un autre pays. Cette mise en demeure est disproportionnée et inutile, l’écrasante majorité des internautes français – environ 97 %  accèdent aux versions européennes du moteur, comme Google.fr, plutôt que par Google.com ou toutes autres versions. »

Peter Fleischer, responsable de la politique de confidentialité du moteur, a ainsi demandé à la CNIL de retirer sa mise en demeure. En face, la Commission pourra toujours rappeler à Google que le déréférencement actuel est déjà mis en œuvre à l’échelle européenne. De plus, il est relativement simple de savoir qui a demandé le déréférencement en Europe en comparant les résultats avec ceux d'une page Google.com : les traces invisibles dans le premier camp apparaissant dans le second. Ce différend devrait maintenant déboucher sur un nouveau contentieux, l’arrêt de la CJUE n’ayant pas clairement pris position sur la portée géographique du droit à l’effacement.

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