Pour mieux montrer la nécessité de créer un marché numérique unique en Europe, la Commission européenne a publié ce mardi son index numérique des pays de l’Union, censé montrer les fortes disparités qui existent entre voisins. Par 30 indicateurs, cet index place les pays nordiques en champions régionaux du numérique. La France, elle, est en retard sur plusieurs points.
Quel pays européen est le plus connecté ? C’est la question à laquelle tente de répondre l’index numérique, présenté aujourd’hui par la Commission européenne à l’occasion du forum « Digital4EU » qui se déroule à Bruxelles. Cet évènement, centré sur les usages numériques sur le vieux continent, est une nouvelle occasion pour la Commission de présenter son ambition d’un marché unique numérique.
Cet index doit donc contribuer à prouver son utilité en Europe. Il s’agit notamment de disposer d’une législation commune sur les données personnelles, de revoir à la hausse les ambitions du Paquet télécom européen, de modifier les règles du droit d’auteur (par exemple par les propositions de l’eurodéputée pirate Julia Reda), de faciliter la création d’entreprises et d’améliorer les connaissances numériques de la population.
Andrus Ansip, vice-président de la Commission en charge de ce marché unique, se veut d’ailleurs très médiatique. Avant le forum organisé à Bruxelles ce mardi, il a répondu hier à une série de questions-réponses sur Twitter, avec le hashtag #AskAnsip, où il a rappelé message après message l’importance de réduire les disparités entre voisins européens en matière de règles et d’usages numériques. L’index est donc une arme supplémentaire. « C’est l’outil analytique qui fournit les données brutes pour la mise en place de cette stratégie » écrit la Commission dans sa présentation.
Le Danemark, pays le plus « numérique »
Il se fonde sur 30 indicateurs « numériques », répartis en cinq domaines, calqués sur les objectifs de la Commission. Le calcul comprend d’abord la connectivité, soit la couverture Internet et les prix des forfaits. Viennent ensuite les connaissances numériques de la population, qui comprennent le taux d’usage d’Internet ainsi que le nombre de diplômés de cursus technologiques.
L’index mesure également les activités en ligne, dont la consommation de contenus, les outils de communications utilisés et les transactions commerciales en ligne. La Commission s’intéresse aussi à la diffusion des technologies dans les entreprises et l’importance du e-commerce. Enfin, la politique publique est jugée, des outils administratifs en ligne à l’Open Data en passant par l’e-santé.
Sur l’ensemble de ces critères, c’est le Danemark qui prend la première place, avec un score global de 0,68/1. Il est suivi de près par la Suède (0,66), les Pays-Bas (0,63) et la Finlande (0,62). Ce sont les quatre pays où le numérique est « jugé » hautement performant. Viennent ensuite les pays moyennement performants, de la Belgique à la République tchèque et enfin les pays peu performants, en majorité ceux de l’Europe de l’est.
Globalement, le rapport note que l’expérience du numérique varie fortement selon le pays dans lequel on habite. Au total, 75 % des Européens accèdent à Internet quotidiennement (contre 72 % en 2013), dont 49 % ont déjà regardé un film, écouté de la musique ou joué en ligne. Côté entreprises, le rapport regrette que seules 15 % des PME européennes vendent leurs produits en ligne, à cause de « barrières » à l’entrée. Enfin, « 33 % des internautes européens ont utilisé des formulaires administratifs en ligne, allant de 69 % au Danemark à 6 % en Roumanie » est-il détaillé.
La France, pénalisée par ses réseaux
La France, elle, est en plein milieu du classement, à la 14e place sur 28 pays, avec un score de 0,48, selon la fiche que nous a transmise la Commission. Soit entre l’Autriche et Malte. « Sur l'année passée, la France a amélioré son score général (de 0,45 à 0,48), mais a stagné en rang. La France a progressé (en score) dans chacune des cinq dimensions de l'index. Il a par contre baissé dans le classement en Connectivité (de la 14e à la 19e place), dû au progrès du reste de l'Europe » sur ce point, explique la Commission.
Car, selon le classement, la connectivité serait le domaine dans lequel la France souffrirait le plus de la comparaison avec ses voisins. Concrètement, l'hexagone serait entièrement couvert en Internet haut débit. Pourtant, « la France doit progresser sur le très haut débit : seuls 41 % des foyers sont couverts, et seuls 9,4 % y ont souscrit ; bien en-dessous de la moyenne européenne de 22 %, la mettant en 23e rang sur 28 pays » estime la Commission, sur la base de données de fin 2013, donc difficilement à jour et ne prenant que très partiellement en compte le VDSL2. Une des explications est, comme il est souvent avancé, la bonne qualité de notre réseau ADSL. La France a donc lancé le Plan Très haut débit, pour accélérer le déploiement et l’adoption de la fibre optique… Un plan assez unique en Europe, nous expliquait d’ailleurs l’IDATE il y a quelques jours.
Sur les autres indicateurs, la France est au 11e rang européen en ce qui concerne les usages d'Internet et le capital humain, en clair les connaissances de la population et le nombre de spécialistes du numérique. Le bilan est bien moins flatteur en ce qui concerne l’intégration du numérique dans les entreprises, avec une 16e place européenne, ce malgré un gain de 4 places sur un an.
Enfin, la France signe son meilleur score en matière de services publics numériques, avec une 8e place européenne, contre 12e un an avant. Au final, la France doit donc progresser sur sa connectivité et la numérisation des entreprises, deux chantiers déjà entamés par le gouvernement avec le Plan Très haut débit et la French Tech, dont les résultats ont une chance d’apparaitre lors du prochain index, l’année prochaine.