Le député Lionel Tardy s’est saisi de cette problématique. Il vient de déposer une question parlementaire où il s’interroge « sur les montants exacts perçus dans le cadre de la rémunération pour copie privée ». Il demande ainsi à la ministre de la Culture de bien vouloir lui fournir « le montant exact et final de ce prélèvement pour 2012, ainsi que pour toutes les années comprises entre 2003 et 2012 ». Et pour l’avenir, il veut « également connaître les mesures [qu’Aurélie Filippetti] compte prendre afin d'harmoniser ces données (…) en fixant aux organismes précités une règle pour la prise en compte de l'ensemble des sommes versées ».
Il y a quelques jours, nous rapportions les chiffres du dernier rapport WIPO-Thuiskopie. Celui-ci compare chaque année le niveau de prélèvement de la copie privée dans plusieurs pays, dont la France, laquelle est placée numéro un en terme de montant total. Problème : les chiffres relevés ne sont pas exacts, dans notre pays en tout cas.
Selon le dernier rapport WIPO-Thuiskopie (la société de gestion pour la copie privée aux Pays-Bas), la France prélève le plus de copie privée en comparaison à 23 autres pays. La copie privée représente ainsi 2,65 euros par français. Nous sommes suivis de près par la Belgique (2,14 euros par habitant pour 11 millions de Belges). En Finlande, le niveau tombe à 1,31 euro par habitant, en Hongrie, 1,22 euro et en Italie, 1,18 euro.
La France pratique de fait le plus haut niveau de collecte, écrasant tous les autres pays grâce aux 172 millions d’euros collectés en 2012, bien loin du numéro deux, l’Italie et ses 71 petits millions ou même la Russie (29 millions). Problème, les chiffres, en France en tout cas, ne sont pas justes. Et sont peut-être largement en dessous de l’exacte réalité.
172, 203 ou 209 millions d'euros en 2012 ?
Certes, il y a bien eu 172 millions de perception si on regarde du côté du site de la Commission copie privée. Mais si on ouvre cette fois le dernier rapport de la Commission de contrôle des sociétés de perception, le montant évoqué est désormais de 203 millions d’euros en perception primaire. Mieux, du côté de Copie France, les encaissements bruts s’élèvent selon nos informations à 209 millions d’euros exigibles, toujours pour 2012.
172, 203 ou 209 millions ? Comme nous le supposions, ces différences qui s’étendent jusqu’à 35 millions d’euros, s’expliquent par le jeu des contentieux qui viennent apporter une grosse dose d’aléas. Les 209 millions exigibles du côté de Copie France sont des montants facturés en fonction des déclarations de stocks effectuées par les importateurs ou les fabricants. Seulement, ces chiffres évoluent selon les dépôts de bilan, mais aussi et surtout des contentieux qui viennent brouiller l’exacte réalité.
Ces contentieux sont parfois juteux. Free comme SFR ont fait par exemple chacun un chèque de 30 millions pour éteindre un différend qui concernait en partie la période considérée. De même, il faudrait déduire les remboursements réclamés par les professionnels, quoique leurs faibles montants ne devraient pas être trop perturbateurs puisqu'en France, il existe des freins dans cette procédure.
Alors certes, WIPO-Thuiskopie s’est appuyé sur les chiffres de la Commission copie privée, mais ceux-ci ne sont utilisables que s’ils sont correctement mis à jour. La remarque vaut aussi pour les autres pays, mais le niveau de prélèvement est tel pour la France qu’une sincérité totale des données s’impose plus fortement encore.