FTTH : l'ARCEP propose des tarifs progressifs pour les réseaux d'initiative publique

FTTH : l’ARCEP propose des tarifs progressifs pour les réseaux d’initiative publique

À la une, à la deux...

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Guénaël Pépin

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07/10/2015 7 minutes
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FTTH : l'ARCEP propose des tarifs progressifs pour les réseaux d'initiative publique

Le régulateur des télécoms doit aider les réseaux d'initiative publique en fibre à attirer les opérateurs. Il vient de lancer une consultation publique sur leurs tarifs de gros afin de les harmoniser et de les amener progressivement vers ceux des réseaux privés.

Cela pourrait bien être le vrai démarrage commercial des réseaux d'initiative publique (RIP) en fibre. Hier, l'ARCEP a mis en consultation publique ses lignes directrices pour leur tarification de gros. Elle sera ouverte jusqu'au 6 novembre pour une mise en place courant décembre. Le but : obtenir des tarifs cohérents entre les dizaines de réseaux publics en fibre qui seront montés dans les prochaines années sur la moitié du territoire, ainsi qu'avec les réseaux privés adjacents, mis en place par les opérateurs nationaux.

Aujourd'hui, les montants tarifés par les réseaux d'initiative publique aux opérateurs qui veulent s'y connecter sont à la relative discrétion des collectivités qui les gèrent. La principale règle qui leur est imposée est que les prix doivent être les mêmes pour tous, sans distinction selon la taille ou la cible du fournisseur d'accès par exemple. Cela peut tout de même mener à des incohérences ou à des prix tirés vers le bas, que ne manque pas de dénoncer Orange.

Assouplir les relations entre réseaux publics et opérateurs

En décembre, lors d'une série de tables rondes organisée par l'ARCEP, son secrétaire général Pierre Louette prévenait que l'opérateur n'hésiterait pas à attaquer les réseaux publics aux politiques tarifaires trop agressives. Une menace rappelée fin avril à l'Assemblée nationale : « Dans certains RIP [...] les tarifs sont si bas qu’ils nous semblent "prédateurs" ; Orange a donc indiqué qu’il les attaquerait s’ils passaient sous un certain niveau, car cela créerait une distorsion de concurrence ».

Ces lignes directrices pour les tarifs des réseaux publics en fibre sont une des nouvelles missions qu'a attribué la loi Macron au régulateur, en août dernier. L'ARCEP doit accompagner les dizaines départements et régions qui préparent, ou ont déjà lancé leurs réseaux, pour leur donner de la visibilité. Selon l'institution, une tarification harmonisée éviterait aussi que quelques acteurs nationaux (les FAI) puissent avoir un trop grand pouvoir de négociation face à une multitude d'acteurs locaux.

Dans l'autre sens, les tarifs deviendront aussi plus prévisibles pour les opérateurs privés qui voudront fournir leurs offres sur ces réseaux. Jusqu'ici, les quatre grands opérateurs nationaux sont très peu présents sur les RIP, alors que c'est une des clés pour leur rentabilité. Sans un grand nom comme Free ou Orange, les particuliers hésitent ainsi à passer sur le réseau public, qui ne proposerait que les offres de petits opérateurs. C'est même un levier de pression d'Orange sur les réseaux publics quand les projets lui déplaisent (voir notre enquête). En attendant, quelques solutions émergent, comme l'offre triple-play avec vidéo à la demande qu'a lancé Videofutur début octobre, sur quelques RIP justement.

Sécuriser les projets des collectivités vis-à-vis de l'Europe

Avec ce texte, l'ARCEP doit également donner une sécurité juridique aux collectivités qui déploient leurs propres réseaux, notamment vis-à-vis de l'Europe. De son côté, le plan France Très Haut Débit piloté par Bercy, dont dépendent directement les réseaux évoqués par l'ARCEP, n'a pas rempli cette obligation. Pour rappel, ce plan consiste à fournir du très haut débit à toute la population en 2022, dont 80 % via la fibre optique jusqu'à l'abonné (FTTH). Les collectivités doivent être subventionnées à hauteur de 3 milliards d'euros pour couvrir la moitié du territoire la moins dense.

Comme nous le révélions ces dernières semaines, l'Union européenne refuse de valider le plan français. La montée en débit sur cuivre pourrait ainsi s'apparenter à une aide d'État à Orange, selon la Commission. En attendant, Bercy ne peut plus financer (sereinement) les projets des collectivités. Sur ce point, l'ARCEP se veut rassurante. « L'autorité a également tenu le plus grand compte du cadre européen, et notamment des règles européennes en matière d'aides d'État, de manière à sécuriser dans la durée les projets portés par les collectivités territoriales » écrit le régulateur dans son communiqué.

 Des tarifs adaptés selon l'avancement du réseau

Concrètement, le but de ces lignes directrices est d'obtenir des offres de gros équivalentes à celles fournies par les réseaux privés, notamment dans leurs conditions et dans leur flexibilité. Cela dans la limite des réseaux : certaines initiatives publiques peuvent avoir des architectures très éloignées des réseaux privés « modèles ». De même, le fait que les RIP couvrent les zones peu denses peut avoir un impact important sur les coûts de déploiement, alors que par définition les lignes sont plus rapprochées en zones denses. Les lignes directrices se penchent sur la zone entre le point de mutualisation et la prise de l'abonné, car « ce segment concentre en effet la plus grande part des coûts de déploiement et constitue donc la principale source de revenus de gros du réseau ».

Pour aligner les tarifs sur ceux de la « zone privée », l'ARCEP préconise une gradation des prix en trois étapes, du lancement à une situation pérenne. La première phase de lancement permettra aux gestionnaires d'adapter la tarification au déploiement du réseau, pour trouver un premier équilibre économique qui permette de financer la construction. Cette période devrait s'arrêter dès que la partie du réseau concernée atteint 20 % de remplissage, estime le régulateur. Selon l'autorité, 10 % de complétion correspond à la présence d'un opérateur, quand 20 % signifie qu'un opérateur national est arrivé ou que la concurrence entre deux petits est déjà suffisante. Ce recentrage vers les prix des réseaux privés pourra aussi intervenir au bout de deux ans d'exploitation.

La deuxième période, de « montée en charge », amènera les réseaux publics à rapprocher leurs prix des réseaux privés. « Une flexibilité autour des tarifs de la zone d’initiative privée est proposée pendant cette période » pour corriger d'éventuels écarts avec le plan d'affaires prévu par la collectivité, prévient l'ARCEP. Cette période ne devra pas excéder la septième année d'exploitation. Enfin, la troisième et dernière période consistera simplement à s'aligner sur les prix des réseaux privés.

Des prix alignés sur ceux des réseaux privés

Si une collectivité choisit d'appliquer ces trois étapes de tarification, la transition entre les différents tarifs doit être douce, prévient l'ARCEP. Pour le régulateur, il s'agit de prévenir toute modification brutale des offres de gros qui empêcheraient un fournisseur d'accès de proposer ses abonnements aux tarifs qu'il souhaite. Les prix préconisés par le régulateur sont très proches de ceux pratiqués dans la zone privée, parfois inférieurs, parfois supérieurs.

Dans l'absolu, les collectivités devront notifier à l'ARCEP leurs projets de grilles tarifaires, avec leurs plans d'affaires deux mois avant de les appliquer. Le régulateur pourra ensuite émettre un avis en vue qu'elles soient modifiées. Un avis qui sera potentiellement public. À voir si cette stratégie permettra de gommer les nombreuses disparités entre réseaux, qui existent déjà aujourd'hui et auxquelles l'institution semble particulièrement attentive.

ARCEP tarification RIP FTTH

Écrit par Guénaël Pépin

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Sommaire de l'article

Introduction

Assouplir les relations entre réseaux publics et opérateurs

Sécuriser les projets des collectivités vis-à-vis de l'Europe

 Des tarifs adaptés selon l'avancement du réseau

Des prix alignés sur ceux des réseaux privés

Le brief de ce matin n'est pas encore là

Partez acheter vos croissants
Et faites chauffer votre bouilloire,
Le brief arrive dans un instant,
Tout frais du matin, gardez espoir.

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Commentaires (9)


13€ minimum pour une boucle locale? De quoi assurer encore de nombreux jours au cuivre si je comprends bien… 4€ de premium.

 

 Bitstream à 19€ ça fait quand même un peu cher il me semble (Bouygues aura du mal avec son offre à 20€, on est déjà à 23€ TTC…) il reste peu de marge pour les opérateurs télécom après ça…








jinge a écrit :



13€ minimum pour une boucle locale? De quoi assurer encore de nombreux jours au cuivre si je comprends bien… 4€ de premium.

 

 Bitstream à 19€ ça fait quand même un peu cher il me semble (Bouygues aura du mal avec son offre à 20€, on est déjà à 23€ TTC…) il reste peu de marge pour les opérateurs télécom après ça…





C’est pas plus cher que les offres de gros sur les réseaux fibres privés…



Probablement, mais là il s’agit des tarifs minimaux… Je ne trouve pas ça top, à moins que ce soit revu au fil des années… C’est à dire probablement quand Orange aura fermé son réseau cuivre sur les zones correspondantes…


PM : Point de Mutualisation

PBO : Point de Branchement Optique

source : Tutor Calvados - le déploiement de la fIbre optique jusqu’au logement (FTTH) - Schéma global (document PDF)



NRO : Noeud de Raccordement Optique

(correspondant au NRA - Noeud de Raccordement d’Abonnés dans la technologie DSL)


C’est vrai, bien vu, ces tarifs de gros paraissent difficilement compréhensibles. En même temps, vue l’atténuation DSL sur le réseau boucle locale cuivré, j’imagine qu’il n’y aura pas de mal à justifier quelques euros mensuels supplémentaires (meilleurs débits, stabilité de la connexion incomparable en fibre FTTH, symétrie des débits montants/descendants possible en FTTH). Mais, commercialement, un tarif plus élevé n’aidera pas au développement d’offres FTTH au détail, concurrentes du cuivre DSL, c’est sûr.



En tout cas, le plus urgent serait que l’Union européenne et la France trouvent un consensus pour valider le Plan France THD et pour résoudre le problème des projets d’Orange de fibre jusqu’au sous-répartiteur dans des zones rurales (avec le problème des subventions qui étaient prévues dans le financement).








joma74fr a écrit :



En tout cas, le plus urgent serait que l’Union européenne et la France trouvent un consensus pour valider le Plan France THD et pour résoudre le problème des projets d’Orange de fibre jusqu’au sous-répartiteur dans des zones rurales (avec le problème des subventions qui étaient prévues dans le financement).



J’ai pas vu ce soucis, c’est quoi l’histoire?



“Sécuriser les projets des collectivités vis-à-vis de l’Europe



(...)      

 Comme nous le révélions ces dernières semaines, l'Union européenne refuse de valider le plan français. La montée en débit sur cuivre pourrait ainsi s'apparenter à une aide d'État à Orange, selon la Commission. En attendant, Bercy ne peut plus financer (sereinement) les projets des collectivités. Sur ce point, l'ARCEP se veut rassurante. « L'autorité a également tenu le plus grand compte du cadre européen, et notamment des règles européennes en matière d'aides d'État, de manière à sécuriser dans la durée les projets portés par les collectivités territoriales » écrit le régulateur dans son communiqué."



source : 2e partie de l’article ci-dessus


Apparemment, on désigne ces sous-répartiteurs sous le nom de “NRA-MED” (MED : Montée En Débit).



Le NRA devient un NRO et la fibre arrive jusqu’à la sous-répartition qui devient un NRA-MED. Les abonnés sont reliés à ce NRA-MED par le câble en cuivre classique.



sources : Next Inpact et MeD … La Montée en Débit sur le réseau Cuivre - busyspider.fr

 



 


Ah par contre non, le NRA ne devient pas un NRO à moins que le FTTH soit déployé à partir de celui-ci il me semble. 

Sinon c’est vrai que j’avais zappé l’info. Administration stupide… Mais j’ai du mal à voir si l’ensemble des MED font partie du plan THD. Etant donné que c’est une pratique qui dure depuis déjà quelques années, je me demande si ça gèle l’ensemble des déploiementsou juste ceux dans le cadre du plan THD.