Avec Contributor, Google veut financer les sites par le don

Avec Contributor, Google veut financer les sites par le don

Monetization Wars : l'Empire contre-attaque

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David Legrand

Publié dans

Internet

21/11/2014 7 minutes
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Avec Contributor, Google veut financer les sites par le don

Si Google propose déjà de nombreux services payants, il a récemment proposé aux adeptes de YouTube de soutenir les producteurs de contenus via des dons. Aujourd'hui, le géant du web lance Contributor, un service qui vise à faire pareil avec n'importe quel site web. Le but ? Ne pas laisser Patreon et ses dérivés se renforcer, tout en misant sur un modèle à la Flattr.

Google, roi de a publicité en ligne, commence à miser de plus en plus sur les services payants. Si cela n'avait rien d'étonnant pour Drive ou le Play Store, cette façon de faire commence à gagner un nombre croissant de services. On a par exemple noté l'arrivée de chaînes à accès payant sur YouTube, et plus récemment Music Key qui permet de retirer la publicité de certaines vidéos contre une facture mensuelle.

L'économie du don gagne du terrain, Google s'y intéresse

Mais avec Contributor, c'est un modèle différent qui est visé : celui du soutien à la manière de Flattr ou de Patreon. En effet, comme nous avions déjà eu l'occasion de l'expliquer, plutôt que de se financer par la publicité, certains producteurs de contenus ont cherché à le faire avec le soutien des internautes. Les plateformes de Crowdfunding ont un temps été une solution, mais elles visent à financer un projet précis à un moment donné, pas une équipe sur la durée. Hors, le but de celui qui met en ligne ses articles, ses podcasts ou ses vidéos est de le faire de semaines en semaines.

 

Dès lors, sont nées des solutions comme Patreon, ou Tipeee en France. Ces mélanges entre Kickstarter et Flattr proposent en fait à chacun de présenter son projet et de proposer à sa communauté de le financer, mais avec un revenu régulier : par mois ou par contenu publié. Le montant est libre, mais des contreparties sont proposées par paliers. Celui-ci peut être réservé aux soutiens, mais le plus souvent ce n'est pas le cas. Ceux qui payent permettent au créateur de vivre de ce qu'il fait et donc de proposer son contenu à tous.

 

Nous avions déjà évoqué le cas de Patrick Beja, qui a depuis décidé de « faire le grand saut » et de se consacrer désormais à cette activité. Il compte 664 soutiens, pour un peu moins de 2 150 dollars par épisode publié pour le moment. Geek Inc, qui avait tenté l'aventure du financement participatif, a aussi décidé de se lancer et compte pour le moment 181 soutiens pour 846 dollars par mois. De quoi financer le nouveau studio du podcast vidéo.

 

Financer les individualités est une bonne chose, mais à quand la mise en commun ?

Attention, il ne faut pas oublier de retirer la part touchée par la plateforme au passage et les éventuelles charges lorsqu'une partie est distribuée en salaires. Ces sites sont ainsi intéressants pour financer des aventures individuelles, un peu comme peut déjà le faire une rédaction avec ses journalistes : ses revenus servent à financer le travail que chacun produit, tout en mettant une structure et une équipe à sa disposition.

 

Il reste néanmoins des différences, puisque les plateformes de soutien sont surtout un intermédiaire financier et ne proposent pas (encore ?) d'autres services et des protections (notamment juridiques) à leurs membres. Il existe d'ailleurs encore assez peu d'interaction entre eux, alors qu'une mise en commun de ressources à la manière d'une équipe pourrait avoir un sens, à travers des moyens partagés ou la mise en place d'un tiers lieu par exemple.

 

Mais le concept marche, et plutôt bien. Ainsi, Patreon vient d'annoncer distribuer chaque mois pas moins d'un million de dollars à ses membres à travers ses 125 000 « Patrons », soit 8 dollars chacun en moyenne. Une importance qui commence à aiguiser les appétits, dont celui de Google qui cherche à ne plus dépendre que de la publicité pour ses revenus.

Contributor : un cheval de Troie, mais pas une réponse au tracking et à la publicité

Contributor fait donc son apparition, mais a plutôt choisi de s'inspirer de Flattr dans un premier temps, alors que le modèle peine à rencontrer un réel succès plusieurs années après son lancement. En effet, les internautes peuvent décider du montant à donner chaque mois, de 1 à 3 dollars, et l'ensemble sera réparti en fonction des sites visités. Un tracker sera donc mis en place et le bloquer bloquera les revenus touchés par le site en question. Une manière pour Google de continuer au passage de récolter des données.

 

 

Les éditeurs affichent un message de remerciement du soutien sur leurs pages, et peuvent remplacer un emplacement publicitaire par cet élément, mais rien ne semble obligatoire à ce niveau. En fait, Contributor est une alternative aux publicités AdWords de Google, qui ne sont pas celles qui rémunèrent le plus les sites, même si elles sont faciles d'accès aux petits acteurs. Et autant dire qu'avec 1 à 3 dollars répartis entre plusieurs éditeurs, cela viendra en complément la plupart du temps. Lorsque l'on voit le montant des abonnements mensuels d'un site de presse généraliste français, le plus souvent sans que la publicité ne disparaisse, ou même de médias plus spécialisés, on a bien du mal à imaginer que cela sera suffisant.

 

Pour le moment, six sites sont partenaires : Urban Dictionary, The Onion, Science Daily, WikiHow, Imgur et Mashable qui appartient au géant AOL. On ne peut donc pas dire que ce sont de petits acteurs qui sont visés. Mais la mise en place de ce modèle sera l'occasion de voir s'il pose le problème que tout le monde lui prête : favoriser les gros médias. En effet, chaque site devra inciter les utilisateurs à s'inscrire et à effectuer un don, mais seuls les plus visités toucherons leur part, tout dépend d'ailleurs si la répartition se fera au prorata des pages visitées ou non, auquel cas on sera bien loin de s'éloigner du modèle publicitaire qui mise tout sur l'audience.

 

Les choses devraient de toute façon évoluer, puisque Contributor n'est que dans une phase de bêta privée, avec accès sur invitation. Vous pouvez d'ailleurs demander la vôtre par ici.

Une première étape dans un dispositif de monétisation aux multiples facettes

Mais de toute façon, cette initiative n'est sans doute qu'une première étape pour Google. Ici, le but est de voir dans quelle mesure le soutien des internautes peut être une alternative viable aux publicités maison, tout en incitant les sites à miser sur une telle solution plutôt que d'aller voir ailleurs. Dans le même temps, le géant du web continue de déployer Play Kiosque pour les sites de presse qui veulent faire payer leur accès, et pourrait au final décider de joindre les deux bouts avec un modèle de type Blendle avec une pincée de Patreon.

 

Autant dire qu'après la guerre de la publicité qui fait actuellement rage, on va sans doute passer les prochaines années dans une guerre des modèles économiques où chacun tentera de proposer sa solution pour financer les sites en accompagnement ou en dehors du modèle publicitaire. Et une fois encore, ce sont les grands acteurs actuels ou en devenir de la Silicon Valley qui risquent de remporter la mise, et de contrôler cette économie. 

 

À moins que des initiatives locales ne réussissent à s'imposer entre temps, Tipeee aura donc tout son rôle à jouer et devra trouver une manière de se démarquer, alors que la presse devra sans doute chercher à se fédérer de manière intelligente si elle ne veut pas une nouvelle fois se retrouver ultra-dépendante de Google, notamment via des initiatives comme La Presse Libre que nous avons annoncée récemment.

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Écrit par David Legrand

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

L'économie du don gagne du terrain, Google s'y intéresse

Financer les individualités est une bonne chose, mais à quand la mise en commun ?

Contributor : un cheval de Troie, mais pas une réponse au tracking et à la publicité

Une première étape dans un dispositif de monétisation aux multiples facettes

Le brief de ce matin n'est pas encore là

Partez acheter vos croissants
Et faites chauffer votre bouilloire,
Le brief arrive dans un instant,
Tout frais du matin, gardez espoir.

Commentaires (29)


J’avoue je ne sais pas trop quoi en penser. <img data-src=" />



Mais adblock c’est moins chère <img data-src=" />


Le concept est très bon…

Mais je suis entré dans une phase de saturation de Google, cette solution sera donc sans moi.


Vu qu’il n’y a pas de rapport entre la mise en place d’un financement par don et Adblock… qu’importe.


&gt;Un tracker sera donc mis en place et le bloquer bloquera

&gt;les revenus touchés par le site en question. Une manière

&gt;pour Google de continuer au passage de récolter des données.



Mouai … on reste sur du Google quoi … <img data-src=" />



Autant mettre un bon petit lien Paypal … au moins y aura pas de tracker !


Par rapport à ce que tu disais sur Twitter.

Selon moi l’idée est de proposer une alternative à l’affichage de pub sur les site web au cas où le vent de la publicité sur internet tournerait.

Grâce à ca, Google n’a pas tout les œufs dans le même panier et ce sera déjà un acteur si jamais la pub s’écroule. Surtout ce “contributor” pourrait être une simple option à activer pour les sites web, de facon très simple.

Je ne vois pas pourquoi les sites refuserai ce financement.


Parce que les sites n’utilisent pas tous AdWords, et que tous ne veulent pas dépendre de Google, même pour une campagne de don ? ;)



Si l’idée était de remplacer la pub dans son ensemble, crois-moi, on ne parlerait pas de 1 à 3 $ par mois partagés entre tous les sites sur un modèle volontaire.


L’idée n’est pas de remplacer la pub (Google ne va pas tuer son propre modèle) mais de préparer le terrain.

Pour ma question je parlait des sites qui utilisait déjà&nbsp;AdWords ;)








knos a écrit :



J’avoue je ne sais pas trop quoi en penser. <img data-src=" />



Mais adblock c’est moins chère <img data-src=" />





Le vol est toujours moins cher.



Tu peux aussi allez braquer une bijouterie, c’est moins cher que de payer une bague à ta femme.



Merci pour le conseil <img data-src=" />



Surtout en période de fête c’est important.


Comme je le dis dans le papier, c’est à mon avis plus complexe que ça. Google teste ici une façon de faire, mais le but in fine c’est de proposer un portefeuille de solutions de monétisation. Je doute que Contributor reste en l’état, d’où la phase de test, ou même que Google ne vise que les sites qui utilisent AdWords partiellement ou non. On voit se dessiner le modèle petit à petit, et ce ne sont pas les seuls à aller dans ce sens. Mais une fois de plus cela risque d’être ceux qui auront le plus de poids si tout le monde campe sur ses positions en attendant de se faire laminer <img data-src=" />


Pour moi c’est une bonne option pour ceux qui utilisent les pubs google, pour simplifier l’association d’un user “contributeur” a un utilisateur “premium de ton site…



bonne initiative de la part de google, ils réagissent à patreon et autres en l’associant à leur système de pub…&nbsp;


J’aurais plutôt dit “Google veut sa part du gâteau sur les dons” mais ça fait tout de suite moins positif et charitable comme titre. Donc en parlant de part, ils prennent combien ? 30% ?


Pas indiqué, mais sans doute dans ces eaux là oui. Pour le reste, réduire une actu à son titre c’est souvent la première des erreurs ;)








David_L a écrit :



Pas indiqué, mais sans doute dans ces eaux là oui. Pour le reste, réduire une actu à son titre c’est souvent la première des erreurs ;)







Perso je préfère la réduire à son sous-titre … <img data-src=" />



Sais tu combien un internaute moyen génère de revenus de pub sur le net par mois?








Krogoth a écrit :



Sais tu combien un internaute moyen génère de revenus de pub sur le net par mois?







Ca dépends :



CPM ?

CPC ?

CPL ?

CPA ?



Dans le cas d’un CPA d’une valeur de 200 % à 5 % ca te fait 10 € … <img data-src=" />



Non, mais je suis assez au fait de ce que donnent des campagnes de don, ou même des abonnements sans limitation aucune ;) Et ce n’est en aucun cas apte à remplacer la pub dans son ensemble. Pour le reste, il suffit de voir les milliards que représente ce marché chaque année… (des études ont été faites sur la question, mais en général initiées par des régies)


Dans tout les cas pour se prévenir au maximum de la méga-récolte d’infos par Google, une excellente solution est Epic Browser: &nbsp;https://www.epicbrowser.com/



C’est a michemin entre un Firefox bardé d’extensions vie privée et un FF/Tor, le tout d’une utilisation enfantine.



L’essayer c’est l’adopter!



Enfin presque: il manque une extension type NoScript et une liste blanche pour autoriser la pub pour les sites “utiles” pour qu’il soit parfait pour moi.








kamomille a écrit :



C’est a michemin entre un Firefox bardé d’extensions vie privée et un FF/Tor, le tout d’une utilisation enfantine.



L’essayer c’est l’adopter!



Enfin presque: il manque une extension type NoScript et une liste blanche pour autoriser la pub pour les sites “utiles” pour qu’il soit parfait pour moi.





Désolé, mais même opposé à l’omniprésence de Google, je refuse d’utiliser ces outils que je juge déloyaux envers les sites que je fréquente et qui me rendent un service.



Et ca marche comment aux niveaux impots et taxes?

En Angleterre (et peut-etre ailleurs, mais je ne sais pas), les dons peuvent etre deduits des impots de celui qui donne.

Et pour celui qui recoit les dons doivent etre differents des revenus, non?




Urban Dictionary, The Onion, Science Daily, WikiHow, Imgur et Mashable qui appartient au géant AOL



Je ne savais pas <img data-src=" />


Tous les dons ?&nbsp;<img data-src=" />

Ca m’étonnerait… En tous cas, en France, les dons pour des associations déclarée d’intérêt général sont déductibles (ils fournissent un reçu fiscal pour le justifier). Les autres, non (succession etc…)

D’ailleurs, les dons à NXI ne doivent pas être déductibles à mon avis


Pas faux, peut-etre pas tous les dons, il faut que la companie soit enregistree entant que charitee.

&nbsp;Pour NXI ils recoient des dons? ou il ya juste des abonnements?


J’imagine que si tu leur envoies un chèque, ils ne diront pas non&nbsp;<img data-src=" />


Une entreprise ne peut pas recevoir de dons. Dans le cas de la presse cela peut passer par des associations reconnues par l’état comme “J’aime l’info”. Les titres reconnus “IPG” donnent droit à une déduction. De toutes façons, ici comme pour les autres solutions, c’est un tiers (ici Google) qui te rétribue via une commission, donc c’est un revenu comme un autre (ça permet de rendre le don possible). Mais comme dit dans le papier, l’économie du don a ses limites (et un site doit vivre tout le temps, pas seulement lorsque les donateurs sont au rendez-vous, voir les problématique de Wikipédia ou de la Quadrature chaque année…).


Effectivement, j’ai cité l’exemple de NXI un peu vite… Pour des raisons évidentes (corruption), les entreprises ne peuvent pas recevoir de dons.


C’est sûrement pas parfait, mais la première chose qui me vient à l’esprit, c’est “ne tirons pas sur l’ambulance”.&nbsp;

Si google essaye de trouver un meilleur compromise qu’ad-block, c’est une bonne chose. Même si c’est forcément&nbsp;intéressé&nbsp;de sa part.&nbsp;