SFR, Motorola, Nokia, Sony unis contre la loi sur la copie privée

SFR, Motorola, Nokia, Sony unis contre la loi sur la copie privée

De la validité d'une loi de validation

Avatar de l'auteur
Marc Rees

Publié dans

Droit

09/01/2013 5 minutes
11

SFR, Motorola, Nokia, Sony unis contre la loi sur la copie privée

Le Conseil constitutionnel a entendu les différents arguments exposés par les parties dans la dernière question prioritaire de constitutionnalité visant la loi sur la copie privée. Le flux vidéo est désormais disponible. Cette QPC avait été lancée par SFR. Motolora, Nokia, Sony se sont joints au dossier.

conseil constitutionnel

 

L’affaire portée par SFR est née l’été dernier devant le tribunal de grande instance de Nanterre entre SFR et Copie France. L’organisme collecteur avait adressé plusieurs factures au FAI pour le disque dur intégré dans ses box. Ces factures avaient été calculées avec des barèmes votés le 17 décembre 2008 en Commission copie privée.

 

Le contexte n’est pas simple, mais son rappel témoigne de l’acharnement thérapeutique qui existe en ce secteur.

Des barèmes annulés car frappant les copies illicites

Les barèmes du 17 décembre 2008 avaient été votés après une annulation devant le Conseil d’État. Les douze ayants droit siégeant en Commission copie privée avaient pris pour mauvaise habitude de gonfler les études d’usages en tenant compte des sources licites et illicites. Ces études servent à déterminer le niveau des barèmes. Ainsi, plus le piratage explosait - l'affirmation en leitmotiv durant les débats DADVSI - plus les ayants droit estimaient que les particuliers et les professionnelles faisaient des copies illicites. Et donc plus étaient justifiés des barèmes en hausse. Or, pour le Conseil d’Etat, on ne peut mélanger les serviettes en soie (les copies licites) aux torchons (les copies illicites). Si les ayants droit veulent être indemnisés pour les copies illicites, qu’ils fassent des actions en contrefaçon, mais surement pas des ponctions sur les acheteurs de supports de stockage.

Des barèmes annulés car frappant les copies professionnelles

Le 17 décembre 2008, donc, la commission copie privée vote de nouveaux barèmes débarrassés des sources illicites. Surprise, ils n’ont pas évolué d’un iota ! Le secret de cette alchimie ? Les ayants droit prétextent tenir compte désormais d’une variable jusqu’alors dormante, le taux de compression des fichiers. Plus de compression, plus de copies. Et donc davantage d’indemnisation. Emballez, c’est pesé.

 

Mais patatras. Le 17 juin 2011, ces barèmes s’écroulent encore suite à une nouvelle annulation devant le Conseil d’Etat. Pourquoi ? Car s’ils ont purgé les sources illicites, les ayants droit ont oublié de bien lire la directive de 2001 sur le droit d’auteur : pas de copie privée sur les supports achetés par les professionnels. Le Conseil d’État repousse l’effet de sa décision d’annulation de 6 mois soit fin 2011, en réservant les actions en cours. Histoire de laisser le temps à l’édition de nouveaux barèmes.

Des barèmes sauvés par la loi sur la copie privée

Accalmie ? Loin de là. Fin 2011, nouveau bug ! Les ayants droit n’ont pas rendu leur copie. Le législateur est donc intervenu le 20 décembre 2011 pour voter un texte dont ils ont eux-mêmes rédigé les grandes lignes. Un double coup de baguette magique : la loi prolonge de 12 nouveaux mois les effets de l’annulation du Conseil d’État. Ce n’est pas tout. Dans un article (6-II), elle fait aussi revivre la chancelante décision du 17 décembre 2008 ! Et fin du fin, les rémunérations perçues sur sa base, mais qui ont été contestées restent valides malgré l’annulation de juin 2011.

Un sauvetage contesté par SFR, Motorola, Sony, et Nokia

En résumé, des barèmes illicites maintenus en vie, des actions en justice de redevables annulées comme par enchantement... SFR est évidemment agacée par ce tour de passe-passe qui vient contrecarrer son litige avec Copie France. Pour SFR, cette loi dite de validation porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs (la loi ne peut empiéter sur le pouvoir du juge), mais également à celui du droit au recours (remise en cause de recours existants).

 

La position de Copie France n’a pas été exposée oralement, mais le ministère de la Culture est lui intervenu pour défendre cette loi et affirmant l’exact opposé : cette loi est bel et bien constitutionnelle.

 

Motolora, Nokia, Sony, qui a déjà une QPC en cours, sont intervenues dans l’affaire SFR. En 2009, elles avaient attaqué la légalité de la décision 11 devant le Conseil d’État, mais également contesté plusieurs factures Copie France devant le TGI, calculées à partir de cette décision. En somme, les trois sociétés se retrouvaient dans un cadre similaire à celui de SFR : leurs actions sont menacées par cette loi.

 

Devant le Conseil constitutionnel, le trio conteste cette validation. La loi du 20 décembre a certes organisé le remboursement des professionnels au-delà, mais elle a sacralisé l’assujettissement de ces mêmes flux avant cette date. Assujettissement pourtant contesté par le juge administratif ! De même, les lois de validation ne peuvent être constitutionnelles que si elles répondent à un intérêt général suffisant. Or ici quelques affaires en cours sont menacées d’enterrement, non le budget du ministère de la Culture ! Pour Motorola, Nokia et Sony, consacrer cet enterrement va conduire finalement des sociétés à se voir priver d’un droit au remboursement de sommes qu’elles n’auraient pas dû payer !

 

On attend désormais la décision du Conseil constitutionnel lequel a déjà validé un premier article de cette loi. D'autres acteurs ont préféré opter pour un autre angle d'attaque devant les juridictions civiles. On relira spécialement l'angle d'attaque d'Imation (TDK, Memorex, etc.), particuliement intéressant.

Écrit par Marc Rees

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Des barèmes annulés car frappant les copies illicites

next n'a pas de brief le week-end

Le Brief ne travaille pas le week-end.
C'est dur, mais c'est comme ça.
Allez donc dans une forêt lointaine,
Éloignez-vous de ce clavier pour une fois !

Fermer

Commentaires (11)


Hé Bé ça sent bon tout ça…. Et SFR il paye quand leurs PVs pour entente sur les prix avec les deux autres…


C’est la qu’on voit bien que la différence entre un ministère de la culture de droite ou de gauche est une vaste fumisterie

<img data-src=" />








JoePike a écrit :



C’est la qu’on voit bien que la différence entre un ministère de la culture de droite ou de gauche est une vaste fumisterie

<img data-src=" />







Vous vous souvenez de feu vachealait.com en réaction de la loi Tasca (PS) qui lançait cette fameuse taxation des disques durs en 2000-2001 ?



A l’époque, la gauche avait lancé la loi taxa (pardon Tasca) et la droite s’offusquait en promettant d’abroger. Il faudrait reprendre les articles de PCi d’ailleurs à ce sujet …



Puis à l’époque de la droite, quand elle a lancé Hadopi, c’est la gauche qui s’offusquait. … et la droite n’avait pas pour autant détruit ce qu’avait fait la gauche car elle s’est contenté de faire pire avec Albanel (qui se retrouve placée/planquée chez Orange alors qu’elle ne doit même pas savoir ce qu’est un aboutement téléphonique).



Maintenant qu’on est repassé à gauche, autant certaines mesures de droites ont été tout symboliquement abrogées d’une façon limite démagogique et dans les 3 mois des élections, autant Hadopi n’a pas été abrogée comme par hasard.

Attendez-vous seulement à ce que ce soit encore pire.





Alors oui … tous copains, tous pourris.









luxian a écrit :



Alors oui … tous pantins, tous pourris.







fixed <img data-src=" />



Donc en gros des entreprises françaises perdent de l’argent en finançant copie france?

Des vendeurs de support perdent des clients qui vont commander à l’étranger?



C’est comme cela que l’on compte redresser l’économie française? Favoriser un secteur au détriment d’un autre?


de toute facon payé pour les disque dur sur les PVR est inadmissible, vu que les enregistreur de grande marque genre sony, samsung, LG, on ne peux jamais les graver ou les transformer en avi, vu ceci son soit inaccessible, et quand ils sont accessible, ils sont protégés et rendu inexploitable.










Gericoz a écrit :



Donc en gros des entreprises françaises perdent de l’argent en finançant copie france?

Des vendeurs de support perdent des clients qui vont commander à l’étranger?



C’est comme cela que l’on compte redresser l’économie française? Favoriser un secteur au détriment d’un autre?







Tu as tout compris: Intervention gouvernementale via interference des lobby.

Si seulement on pouvait laisser faire les choses…



Ah oui, y à SFR, Motorola, Nokia, Sony… wait, Sony? <img data-src=" />


kerven&gt;T’as copié, tu payes. Pour tout le reste, il y a la vaseline.









DUNplus a écrit :



Ah oui, y à SFR, Motorola, Nokia, Sony… wait, Sony? <img data-src=" />





Sony, en bout de chaine, ne doit toucher qu’une part infime du gâteau.









luxian a écrit :



Vous vous souvenez de feu vachealait.com en réaction de la loi Tasca (PS) qui lançait cette fameuse taxation des disques durs en 2000-2001 ?



A l’époque, la gauche avait lancé la loi taxa (pardon Tasca) et la droite s’offusquait en promettant d’abroger. Il faudrait reprendre les articles de PCi d’ailleurs à ce sujet …



Puis à l’époque de la droite, quand elle a lancé Hadopi, c’est la gauche qui s’offusquait. … et la droite n’avait pas pour autant détruit ce qu’avait fait la gauche car elle s’est contenté de faire pire avec Albanel (qui se retrouve placée/planquée chez Orange alors qu’elle ne doit même pas savoir ce qu’est un aboutement téléphonique).



Maintenant qu’on est repassé à gauche, autant certaines mesures de droites ont été tout symboliquement abrogées d’une façon limite démagogique et dans les 3 mois des élections, autant Hadopi n’a pas été abrogée comme par hasard.

Attendez-vous seulement à ce que ce soit encore pire.





Alors oui … tous copains, tous pourris.









Il faut remettre dans son contexte : Les principaux bénéficiaires sont des soutiens médiatiques de premier choix : Yannick Noah, Johnny Halliday, Gérard Depardieu, Pascal Obispo…



Alors oui, que l’entreprise de robotique du coin de la rue se fasse escroquer, on s’en fout car ca ne ferait perdre que quelques voix. Avoir un interprète de renommée nationale comme soutien officiel ou simplement officieux, c’est beaucoup plus porteur au niveau électoral.



C’est aussi ca la beauté de la démocratie



Excellent article, M. Rees, et très édifiant quant aux petites magouilles des gouvernants de tout bord.



De plus il m’a bien fait rire, surtout dans le premier paragraphe où on lit :



estimaient que les particuliers et les professionnelles





… mon Dieu, mais on a même des “professionnelles” dans cette affaire… eh bien, nous v’la bien. <img data-src=" />