Le gendarme américain de la bourse attaque les organisateurs d'une ICO frauduleuse

Le gendarme américain de la bourse attaque les organisateurs d’une ICO frauduleuse

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Kevin Hottot

Publié dans

Droit

05/12/2017 6 minutes
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Le gendarme américain de la bourse attaque les organisateurs d'une ICO frauduleuse

Aux États-Unis, le régulateur boursier s'intéresse à une ICO lancée par un résident canadien. Celle-ci promet monts et merveilles à ses investisseurs, mais d'après enquête conjointe avec l'AMF québecoise, ses organisateurs ne seraient que des professionnels de l'esbrouffe financière.

Si vous suivez de près le milieu des crypto-monnaies, ou celui des ICO, vous avez probablement entendu parler de PlexCoin. L'initiative avait largement fait appel à la publicité sur les réseaux sociaux pour faire miroiter à d'éventuels investisseurs des rendements incroyables, de l'ordre de 1 354 % en seulement 29 jours. Une promesse trop belle pour être vraie, comme on pouvait facilement s'en douter. 

La SEC, le gendarme boursier américain s'est donc penché sur ce cas qui à première vue avait tout l'air d'une arnaque, et est arrivée à la conclusion suivante : PlexCoin en est bien une, et d'assez grande ampleur, puisque ses organisateurs sont parvenus à collecter plus de 15 millions de dollars. Une somme rondelette. 

Outre la promesse initiale, plusieurs éléments facilement retraçables ont permis à la SEC de vérifier à qui ils avaient affaire. Des précautions simples que n'importe quel investisseur, y compris en crypto-monnaies, devrait prendre avant de débourser des milliers de dollars dans l'espoir d'un gain quelconque. 

L'organisateur est un fraudeur multi-récidiviste

Dans sa plainte, la SEC explique être allée sur le site web de PlexCoin afin de voir ce qu'il s'y racontait. On pouvait y lire que derrière PlexCoin, on retrouvait PlexCorps, une entreprise « regroupant quarante personnes (développeurs, ingénieurs, spécialistes des crypto-monnaies...) toutes indépendantes, réparties partout dans le monde et orientées vers le même but : rendre accessible les crypto-services (sic) ».

L'identité de ces quarante âmes était tenue secrète. PlexCorps ne souhaitait pas les révéler pour « s'assurer que personne ne se fera harceler sur les réseaux sociaux ou recruté par d'autres entreprises du secteur des crypto-monnaies et éviter que le concept de PlexCorps soit copié ». Sur Facebook, la société va jusqu'à revendiquer plusieurs recrutements portant le total de ses effectifs à 48 personnes.

En réalité, il n'y a que deux personnes derrière le projet. Un couple formé de Dominic Lacroix, 35 ans, résidant à Québec, sujet à de multiples procédures au Canada pour des activités financières frauduleuses, et Sabrina Paradis-Royer, 26 ans, résidant également à Québec, elle aussi sous le coup de procédures diverses dans les mêmes domaines.

La SEC a pu vérifier cela en scrutant les moyens de paiement utilisés pour promouvoir les publications de l'entreprise sur Facebook. Elle indique également que sur un forum de discussions français (CryptoFR), un utilisateur avait retracé l'adresse IP associée à un compte ayant publié des messages au nom de PlexCoin.

Il avait alors rapidement retrouvé la trace de Lacroix et publié un message dans lequel il expliquait qu'au vu du casier judiciaire de son créateur, l'ICO de Plex Coin ressemblait davantage à une arnaque qu'à un investissement. Un message qui n'a pas plu à l'intéressé qui en a demandé la suppression menaçant le forum de poursuites. Il n'est depuis plus visible. 

Des rendements pharaoniques

Pour appâter le chaland, Lacroix et Paradis-Royer ont mis en avant des rendements surhumains pour leur ICO : jusqu'à 1 354 % en moins de 29 jours pour quiconque entrerait dans la danse suffisamment tôt. Comment arriver à pareils gains ? Le calcul est en fait assez simple (et trompeur). 

Plexcorps souhaitait vendre 400 millions de jetons CoinPlex dans le cadre de son ICO. Les 50 premiers millions de jetons étaient vendus au prix de 0,13 dollar l'unité. Les 50 millions suivants à 0,28 dollar, puis encore 100 millions de jetons à 0,53 dollar, et les 200 derniers millions de jetons à 0,88 dollar pièce. Au-delà, le prix fixé est de 1,76 dollar l'unité. Passer de 0,13 dollar à 1,76 dollar réclame une augmentation du cours de 1 354 %... le compte est bon.

Par la suite, le site explique que « la valeur du PlexCoin atteindra alors 1,76 dollar, et à partir de ce moment-là, son cours devrait normalement grimper, car il sera disponible sur le marché ». Irréfutable. Seulement, cette logique ne tient debout que si les 400 millions de jetons sont bel et bien tout de suite vendus, ce qui représenterait alors une levée de fonds totale de 308 millions de dollars. 

Dans son livre blanc, PlexCorps avançait d'autres arguments pour aiguiser l'appétit des investisseurs. L'entreprise faisait miroiter des prévisions pharaoniques pour ses activités. Sur la cinquième année, elle espérait 77 millions de dollars de bénéfices nets, avec ses hypothèses les plus conservatrices. Les hypothèses les plus favorables elles, tablaient sur 6 milliards de dollars de bénéfices annuels après 5 ans. À titre de comparaison, Facebook, l'une des entreprises les plus florissantes du moment, émarge à 10,2 milliards de dollars de bénéfices annuels, après près de quinze ans d'existence.

Des fonds utilisés à mauvais escient

Selon les estimations de la SEC, environ 15 millions de dollars ont été récoltés par les malfaiteurs grâce à la vente de 81 millions de PlexCoin. Bien évidemment dans pareille affaire, l'autorité cherche à savoir où se trouvent les fonds soutirés aux investisseurs, et dans quel but ils ont été utilisés le cas échéant. 

Sur son site, PlexCorps promet que les fonds collectés pendant l'ICO « seront utilisés pour développer d'autres produits Plex Corps ». En pratique, ce n'est pas exactement ce qui s'est produit. Sur les 15 millions de dollars récoltés, 810 000 dollars sont stockés sur des comptes en banque appartenant au couple. Sur cette somme, « au moins 200 000 dollars ont été dépensés dans des frais personnels extravagants ». 

Parmi ces frais, il est notamment question de 100 000 dollars canadiens pour des services de jardinage, de peinture ou d'électricité. Également repéré par l'autorité, un chèque de 75 000 dollars canadiens pour du carrelage. L'autorité a également noté que plusieurs comptes ouverts chez le prestataire de paiement Stripe ont été gelés temporairement par ce dernier, et renferment environ 800 000 dollars. Tout l'enjeu de la procédure pour le régulateur tient d'ailleurs dans la possibilité de geler plus longtemps ces actifs, afin de pouvoir les retourner aux investisseurs. 

Quant au reste des sommes, selon la SEC, elles « pourraient être stockées sur la blockchain de Bitcoin ou d'autres portefeuilles que les accusés possèderaient », et qui sont difficilement traçables.

Dans cette procédure accélérée, l'autorité espère obtenir le gel complet des actifs du couple, ainsi que le transfert de l'ensemble des fonds obtenus auprès de clients américains sur un compte géré par le tribunal afin de pouvoir rembourser qui de droit. La SEC espère également faire condamner les organisateurs de l'ICO à rendre l'ensemble de leurs gains, dommages et intérêts compris. 

Écrit par Kevin Hottot

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L'organisateur est un fraudeur multi-récidiviste

Des rendements pharaoniques

Des fonds utilisés à mauvais escient

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Commentaires (1)


Pas trés doués les deux lascars, même un péquin lambda a réussi à les tracer et à retrouver le casier judiciaire de l’un d’eux   …

Ca a dû être un facile pour la SEC de les dénicher, maintenant pour récupérer l’argent volé, ça sera une autre paire de manches.

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P.S.

Quid du droit à l’oubli avec ce genre d’arnaqueurs ?