Identité réelle : la Chine resserre son étau sur Internet

Identité réelle : la Chine resserre son étau sur Internet

Gouverne mental

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Vincent Hermann

Publié dans

Internet

29/08/2017 5 minutes
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Identité réelle : la Chine resserre son étau sur Internet

La Chine resserre l’étau sur les internautes en imposant une nouvelle série de règles pour contrôler plus soigneusement qui fait quoi sur la Toile. Le pays force l’authentification réelle pour commenter en ligne. Une manière d'en finir avec l'anonymat. 

La Chine ne veut plus que l’on puisse masquer son identité sur Internet, quel que soit le service utilisé ou presque. L’action la plus récente en ce sens est le bannissement des réseaux privés virtuels. On se souvient qu’il y a quelques semaines, Apple a fait le ménage dans son App Store, provoquant la colère de certains éditeurs qui accusaient l’entreprise de faire le jeu de la censure. Du côté de Cupertino, on rétorquait bien sûr qu’il s’agissait de se mettre en conformité avec la loi.

Depuis plusieurs années, le pays requiert également que les services de messagerie comme WeChat exigent au moins le numéro de téléphone de l’utilisateur afin que ce dernier ne soit pas uniquement repérable par un pseudonyme. De même, l’identité doit être vérifiée pour obtenir et utiliser le numéro. Une traçabilité toujours plus poussée pour des questions de « sécurité ».

La Cyberspace Administration of China (CAC) veut désormais aller plus loin.

Généraliser l’identification réelle des internautes

Pour l’administration, il n’est plus question de laisser un internaute s’exprimer sur un site s’il n’est pas possible de le retrouver. Les nouvelles règles ont été publiées vendredi dernier et s’appliquent désormais à l’ensemble des sites et services en ligne. Elles entreront en vigueur le 1er octobre prochaine.

La nouvelle mesure centrale est on ne peut plus claire : « Les plateformes et fournisseurs de services ne devraient pas autoriser la moindre publication aux utilisateurs qui n’ont pas fourni d’informations permettant de les identifier ». En outre, si ces acteurs suspectent la moindre fausse identité, ils auront désormais obligation d’enquêter de manière approfondie, tout en mettant de côté toutes les données associées (métadonnées et contenus) pour une éventuelle inspection gouvernementale.

Une liste de sujets à éviter

Cette traçabilité devrait être particulièrement utile pour les enquêtes et pour lutter contre le terrorisme, puisque c’est bien sûr l’un des chevaux de bataille de la CAC. Cependant, c’est loin d’être le seul, l’administration ayant également précisé un certain nombre de comportements répréhensibles.

Il faudra donc éviter toute opposition aux principes de la constitution chinoise, ne pas porter atteinte à la sécurité nationale, révéler des secrets d’État, saper l’unité nationale, porter atteinte à l’honneur ou aux intérêts de l’État, inciter à la haine nationale à la discrimination ethnique, enfreindre les règles en vigueur sur la religion ou faire la promotion de cultes et de superstitions « féodales », propager des rumeurs, bouleverser l’ordre social, propager l’obscénité, la pornographie ou la violence, la terreur, aider à la réalisation d’un crime, insulter d’autres membres de la communauté, violer n’importe quelle autre loi ou régulation…

Des règles très lourdes, bardées d’expressions floues. C’est particulièrement le cas avec les « intérêts de l’État », comme nous l’avions déjà signalé à de multiples reprises dans la loi Renseignement en France. Des termes vagues permettant de déclencher des enquêtes et d’aboutir à des peines. En Chine, cette chape de plomb devrait inciter un peu plus les internautes à rester dans les clous définis par le gouvernement.

Un contrôle strict d’Internet pour éviter les problèmes

La presse chinoise estime de son côté que ces mesures sont tout à fait normales. Le Global Times notamment rappelle combien les espaces en ligne des pays de l’Ouest, qui font grand cas de la liberté d’expression, sont utilisés régulièrement par les terroristes, aboutissant à d’inévitables problèmes majeurs de sécurité.

Shen Yi, professeur au Cyberspace Research Center de l’université de Fudan, pense ainsi que « les critiques des médias de l’Ouest sont biaisées et ignorent les développements et réussites de l’industrie Internet de ces dernières années ». Il va plus loin : « La censure n’a créé aucun obstacle pour l’innovation et le développement, ce qui prouve que ces règles conviennent au moins à la Chine ».

D’ailleurs, si la Chine faisait fausse route, pourquoi tant de pays chercheraient-ils actuellement à renforcer leur contrôle sur la Toile, toujours pour des soucis de sécurité nationale ? Pour l'enseignant, l’idée de souveraineté nationale doit s’étendre à Internet : « les pays ont le droit de mettre en place des règles pour gouverner leur propre cyberespace ». Même avis pour un autre professeur, Xie Jiangyong de l’université de Beijing : « Internet est un bien public qui peut être utilisé par les terroristes et criminels. Si un pays n’a pas une censure stricte et efficace pour le contrôler, le gouvernement ne pourra pas protéger ses citoyens ».

Au-delà de ces justifications locales, il faut effectivement rappeler les tentations croissantes de nombreux gouvernements sur les questions de sécurité. Si le chiffrement et l’anonymat sont pour beaucoup l’essence-même d’Internet, la situation pourrait évoluer au cours des prochaines années. Sur le seul domaine du chiffrement, comment ne pas penser aux multiples tentatives des États-Unis, ou même au récent plan May-Macron, copieusement  critiqué par la CNIL ?

Écrit par Vincent Hermann

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Généraliser l’identification réelle des internautes

Une liste de sujets à éviter

Un contrôle strict d’Internet pour éviter les problèmes

Commentaires (36)


Généraliser l’identification réelle des internautes : Certains élus doivent en rêver en Europe.<img data-src=" />


« Internet est un bien public qui peut être utilisé par les terroristes et criminels. Si un pays n’a pas une censure stricte et efficace pour le contrôler, le gouvernement ne pourra pas protéger ses citoyens ».



<img data-src=" /> (plutôt leur régime)








Ami-Kuns a écrit :



Généraliser l’identification réelle des internautes : Certains élus doivent en rêver en Europe.<img data-src=" />



&nbsp;



Quand on voit twitter, les commentaires du figaro, …. ça donne furieusement envie tout de&nbsp;même&nbsp;<img data-src=" />&nbsp;









Ami-Kuns a écrit :



Généraliser l’identification réelle des internautes : Certains élus doivent en rêver en Europe.<img data-src=" />





moi je suis pour.



l’anonymat est une plaie. Entre les insultes, les coup bas, le harcèlement, etc….. y en a franchement marre.

&nbsp;









jeje07bis a écrit :



moi je suis pour.



l’anonymat est une plaie. Entre les insultes, les coup bas, le harcèlement, etc….. y en a franchement marre.







Ils n’ont pas la même culture. L’européen a eu plus de liberté (le hooliganisme, punk, hippisme, etc). je considérerais Le chinois moins agressif (mais ce n’est pas une généralité)



Ce n’est pas déjà le cas en France pour le téléphone mobile ? J’ai l’impression que pour avoir un numéro, il faut forcement fournir une pièce d’identité…



Alors ok on n’est pas habitué à ça sur Internet, mais ce n’est pas si éloigné comme contrainte.



(je ne trouve pas ça normal hein…)








Wawet76 a écrit :



Ce n’est pas déjà le cas en France pour le téléphone mobile ? J’ai l’impression que pour avoir un numéro, il faut forcement fournir une pièce d’identité…



Alors ok on n’est pas habitué à ça sur Internet, mais ce n’est pas si éloigné comme contrainte.



(je ne trouve pas ça normal hein…)





Ca n’existe plus les mobicartes?



En quoi l’anonymat empêche les poursuites ?



L’anonymat ne protège pas de l’État mais de tous ceux (patrons, famille, relations clients,…) qui n’ont pas à savoir quelles sont tes inclinaisons politiques, religieuses, sexuelles, préférences ou compétences techniques (pour rester sur un sujet proche de ceux de NXI) et j’en passe.


Nous (occident) aboutirons inexorablement à la même chose, une poignée d’années plus tard sans doute.

Bien sûr il y aura des cris effarouchés, des articles éclairés, des contestations, mais au final tout cela sera balayé.

Les “professeurs” interrogés dans l’article ont raison : on a déjà pris la même voix que la Chine, sans oser se l’avouer encore. Ce n’est qu’une question de temps.




les pays ont le droit de mettre en place des règles pour gouverner leur propre cyberespace



Comment définir le cyberespace d’un pays ? Son intranet ?

Internet n’appartient pas à un pays…


L’anonymat sera de toutes façons très relatif sur Internet, vu les pouvoirs accordés aux services des états, à l’augmentation de la puissance de calcul/traitement et à la masse de données disponibles.



Même l’énigmatique “Satoshi Nakamoto” n’a pas tenu plus d’un mois avant d’être identifié par les programmes de la NSA.


En plus l’anonymat n’est absolument pas le problème. Voir même l’inverse:

http://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/07/29/une-etude-demontre-que-les-inter…



A noter plusieurs niveaux d’identités:




  • Nom réel

  • Pseudnonymat

  • Anonymat partiel: pas de pseudo visible extérieurement

  • Anonymat total : rien de stocké coté hébergeur

  • Anonymat parfait: rien de stocké chez aucun intermédiaire (existe ?)



    Je suis pour le pseudonymat et l’anonyma partiel.

    Je réfléchis pas mal à la problématique de coupler pseudo et de garantir l’identité IRL si besoin (sans pour autant la rendre visible dans l’absolu, seulement si besoin juridique. Le même principe que l’anonymisation des requêtes whois dns: mon identité est vérifiable si besoin réel).

    FranceConnect pourrait être utile pour généré des token de garantie d’identité (mais qui ne dévoile pas l’identité à l’intermédiaire).


Cool. Ca va démocratiser un peu plus les réseaux Mesh. <img data-src=" />








jeje07bis a écrit :



moi je suis pour.



l’anonymat est une plaie. Entre les insultes, les coup bas, le harcèlement, etc….. y en a franchement marre.





Sauf que l’ID reel ne sera pas utiliser publiquement dans la plupart des cas, c’est juste une donné stocker pour les besoin des autorités.

Ton paradis de non anonymat n’est pas encore la.





127.0.0.1 a écrit :



Même l’énigmatique “Satoshi Nakamoto” n’a pas tenu plus d’un mois avant d’être identifié par les programmes de la NSA.





Ah ?! C’est qui ?



Nadine Morano pourra dire “enfin, cela fait des années que je demande ces mesures !”&nbsp; <img data-src=" />








2show7 a écrit :



Ils n’ont pas la même culture. L’européen a eu plus de liberté (le hooliganisme, punk, hippisme, etc). je considérerais Le chinois moins agressif (mais ce n’est pas une généralité)





le japonais tu veux dire!



La NSA n’étant pas très partageuse sur les fruits de son travail, on ne s’étonnera pas qu’elle préfère garder cette information pour elle. Savoir c’est bien, être le seul à savoir c’est mieux.








jackjack2 a écrit :



Ca n’existe plus les mobicartes?



Si, mais faut fournir une pièce d’identité pour l’acheter



La Chine et son “ouverture” au monde… Un nouveau tour de vis pour éviter la divulgation de problèmes gênant pour le gouvernement (Tibet, Falun Gong, corruption, pollution, scandales touchant les élites, etc…)…


+1. On sous-estime souvent l’importance du hippisme.








jeje07bis a écrit :



le japonais tu veux dire!







Peut-être bien pour le Japon.



En plus de 50 ans, le Maoïsme a rendu sûrement le peuple chinois plus patriote et chauvin.














127.0.0.1 a écrit :



+1. On sous-estime souvent l’importance du hippisme.







C’est tellement loin “Peace and Love” qu’aujourd’hui on refait le Vietnam sur sa console de jeu <img data-src=" />, on ne connaît même plus ses voisins <img data-src=" />



On peut encore acheter des cartes SIM pré-payés sans fournir son identité ! L’astuce c’est que la plupart demandent une pièce d’identité sous 15 jours après l’activation, il suffit juste de se servir de tout le crédit avant ^^


Je pense que l’anonymat doit pouvoir être levé dans le cadre (confidentiel) d’une enquête judiciaire. Sinon Internet est effectivement une zone de non-droit.



Le problème c’est la levée de l’anonymat dans le cadre (public) d’internet. Auquel cas, la pression sociale/morale obligera à une auto-censure de peur des répercussions de la société civile (employeurs, familles, voisins, associations pro/anti, …).



Les dérives sont aussi dangereuses dans le cas d’un Internet anonyme que dans celui d’une identification systématique.


Si t’es capable d’être raciste derrière un pseudo tu devrais l’être face à ton patron ou face à tes amis. Sinon c’est juste minable…


C’est exactement ce à quoi j’ai pensé en lisant la news.








wanou2 a écrit :



Si t’es capable d’être raciste derrière un pseudo tu devrais l’être face à ton patron ou face à tes amis. Sinon c’est juste minable…





Si t’es capable de dénoncer un régime autoritaire ou n’hésitant pas à emprisonner (voire exécuter) ses ressortissants sans preuve ni jugement, tu devrais l’être face à ton patron, tes amis ou la police. Sinon c’est minable.



Tu n’as pas lu ou pas compris la dernière phrase du commentaire auquel tu réponds









127.0.0.1 a écrit :



+1. On sous-estime souvent l’importance du hippisme.





elle est bonne !




  1. Si tu as des propos raciste et que l’institution judiciaire peut facilement lever ton anonymat, alors ton anonymat ne te protégera pas… Mais dans tous les cas, c’est à la justice de décider si tes propos sont racistes (et pas à moi, à WhitePower88 ou à une association lambda)





    1. Que faire dans les cas où les propos touchent simplement à la morale, la religion, la politique ou tous les autres points de friction de la société ? On autorise le lynchage numérique et la discrimination de l’individu ? On mélange l’huile et le feu en espérant que ca se passe bien ?









2show7 a écrit :



Ils n’ont pas la même culture. L’européen a eu plus de liberté (le hooliganisme, punk, hippisme, etc). je considérerais Le chinois moins agressif (mais ce n’est pas une généralité)





Des libertés contrôlés.



Si c’est vrai, Kim Dotcom peut partir sur Mars par le prochain jet. <img data-src=" />


La chine quoi…

au moins il existe des alternatives intraçables



dans un autre domaine que je connais mieux, il y a l’application bitsquare par exemple. c’est un exchange de cryptomonnaies décentralisé, fonctionnant en P2P, et communiquant sur TOR.



&nbsp;

je vois bien le même principe pour une application de chat



ou pour d’autres choses moins louables mais mon pseudo est facilement reliable à mon identité réelle alors je vais m’abstenir…. on ne sait jamais quelles lois seront passés dans le futur&nbsp; dans nos démocraties occidentales, et internet à la mémoire longue :)



&nbsp;

&nbsp;Au fait, ce n’est pas dit dans l’article, mais est-ce que c’est rétroactif ?

&nbsp;du genre, est ce que les sites devront révéler l’identité des auteurs de posts passés ?

c’est la chine alors j’ai déjà ma réponse.

&nbsp;

Il y en a pas mal qui vont passer leurs prochaines nuits à effacer leurs comptes/ posts un peu partout ! sinon c’est le goulag.



&nbsp;


C’est toujours bon de suivre les nouveautés qui sortent dans un pays leader d’un domaine particulier. Ça permet de construire des projections réalistes sur l’avenir des suiveurs…



Je citerai donc J. Spartan, libre penseur fantasmé : “Et pourquoi pas une laisse dans l’cul ? C’était plus simple !”

Src : https://www.youtube.com/watch?v=KGA9GYvUeio



<img data-src=" />








127.0.0.1 a écrit :





  1. Si tu as des propos raciste et que l’institution judiciaire peut facilement lever ton anonymat, alors ton anonymat ne te protégera pas… Mais dans tous les cas, c’est à la justice de décider si tes propos sont racistes (et pas à moi, à WhitePower88 ou à une association lambda)





    1. Que faire dans les cas où les propos touchent simplement à la morale, la religion, la politique ou tous les autres points de friction de la société ? On autorise le lynchage numérique et la discrimination de l’individu ? On mélange l’huile et le feu en espérant que ca se passe bien ?





      1- Bienvenue dans la judiciarisation de la société. Franchement j’ai pas besoin d’un juge pour juger selon mes valeurs que des propos violent ma morale le dire à la personne. Elle sera d’accord ou non mais je lui dirais…* &nbsp;



      2- Franchement oui à moins de considérer que pouvoir se défouler sur internet évite les problèmes dans la vie réelle (les faits très récents de l’actualité prouve que non).





      *propos uniquement valable dans un état de droit sinon comme les 34 des personnes je collaborerai avec le pouvoir en place.




Le souci c’est lorsqu’un état de droit bascule dans le totalitarisme et que l’indépendance des institutions n’est plus garantie. La porte des enfers est alors ouverte.

Ce dernier siècle nous a montré que la chute est parfois rapide, très rapide (allemagne, turquie).

La principe technique est neutre (couteau) mais c’est son utilisateur qui pourra en faire quelque chose de mal.


Qu’en pense Paul Bismuth? <img data-src=" />