Tout est prêt (ou presque) pour activer la copie privée sur Molotov.tv

Tout est prêt (ou presque) pour activer la copie privée sur Molotov.tv

La télé ré-réinventée

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Marc Rees

Publié dans

Droit

25/11/2016 6 minutes
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Tout est prêt (ou presque) pour activer la copie privée sur Molotov.tv

Molotov est intervenu mardi dernier en Commission copie privée (CCP) pour présenter aux membres son service d’enregistrement des flux télévisés. Un point d’étape, ponctué d’une série de questions épineuses.

Plus de quatre mois après la mise en route de ce service, Molotov n’a toujours pas atteint la plénitude de ses fonctionnalités. Le douloureux absent ? Son service de copie privée dans le cloud des programmes de TV, pourtant bruyamment annoncé dès juillet dernier.

Les choses sont sur le point de bouger. Jean-David Blanc, Pierre Lescure et Jean-Marc Denoual organiseront le 7 décembre prochain une conférence de presse. Au menu, les premiers retours d’expérience et surtout l’annonce de « prochains lancements », dixit le maigrelet communiqué envoyé la semaine dernière.

Mardi, en Commission copie privée, le trio est venu vanter la beauté de ce service, écorché depuis des mois d’une profonde cicatrice. TF1 et M6 craignent en effet une perte d’emprise sur leurs droits exclusifs (replay, VOD, etc.). Ils préfèrent monnayer l’option d’enregistrement dans le cloud, plutôt que de basculer sur le régime de copie privée. Et pour cause : de ce nuage, ces chaines ne touchent pas la moindre liquidité.

L’alternative du passage en force, arbitré par le CSA

Principe de réalisme oblige, Molotov n’a pas voulu passer en force en juillet dernier. La fonctionnalité a montré le bout de son nez avant d’être aussitôt désactivée.

L’article 15 de la récente loi Création pourrait théoriquement montrer ses griffes jusqu’alors rétractées. Pour mémoire, taillée pour Molotov, cette disposition autorise la copie privée dans le cloud des flux TV. Mais elle programme aussi « une convention conclue avec l'éditeur de ce service de radio ou de télévision » visant à définir les fonctionnalités de ce service de stockage. Les juristes sont divisés, mais selon la grille de lecture déroulée mardi, cet accord ne conditionnerait pas la mise en œuvre de l’exception.

En clair, ce contrat avec les chaînes doit se contenter du minima, traiter des protections techniques (DRM), du géoblocage et des capacités de stockage, mais sans écorner le principe même de l’enregistrement. Du coup, Molotov peut ouvrir son service de « bookmarks » (ou d’enregistrement) avec plusieurs chaînes, quitte à épingler l’attitude des réticents, dont l’absence sautera aux yeux des abonnés. Pour ces grincheux, in fine, le bras de fer se jouerait au Conseil supérieur de l’audiovisuel, couronné arbitre de la conclusion des conventions par le dernier alinéa de l’article 15. 

En pratique, il se murmure surtout que les uns et les autres ont bougé les lignes sur l’échiquier. Bref, on serait près d'une solution acceptable par toutes les parties.

Le barème Molotov : provisoire, définitif ou fantomatique ?

Cependant, tout n’est pas purgé et d’abord, la question des barèmes. Les tarifs actuels de la copie privée reposent sur une logique de « one shot ». Que ce soient les box, les disques durs externes, les clefs USB, les cartes mémoires, etc., le paiement n’intervient qu’une fois, très exactement lors de la mise sur le marché. Avec le service de Molotov, on plonge dans la logique d’abonnement. Impossible donc de cloner les taux existants.

Cette complication devrait se résoudre par l’adoption fin 2016, début 2017, d’un barème provisoire d’une année, lui aussi taillé pour la morphologie « Molotov ». Avantage d’un tel tempo ? La possibilité pour l’équipe de revenir dans quelques mois devant la même Commission, avec sous le bras de solides données sur les pratiques de copie. Un précieux carburant pour déterminer le barème définitif.

Et puisque le temps presse, un tel service pourrait même ouvrir sa fonctionnalité très rapidement, sans l’ombre d’un tarif provisoire. Le scénario est simple : d’un côté, activation immédiate d’une fonction d’enregistrement pour les utilisateurs. De l’autre, provision d’une certaine somme avec le consentement feutré de Copie France, aspirateur à redevance des sociétés de gestion collective. Ne restera plus qu’à purger le passé, une fois le barème voté, inspiré du tarif des enregistreurs numériques (PVR). Simple, non ?

L’heure de la remise à zéro des barèmes

Mais dans ce bas monde, le diable sait où se nichent les détails. Molotov plaide évidemment pour un barème horaire, nettement plus compréhensible pour le consommateur. Or, les tarifs actuels reposent sur des capacités. Des membres de la Commission veulent donc profiter de l’épisode pour enclencher – enfin – une remise à plat du calcul de la RCP. Une revendication aussi ancienne que constante des industriels.

Sans même évoquer une affaire pendante à la CJUE, les difficultés s’amoncèlent encore. Pour les autres supports, plusieurs appels d’offres doivent actualiser les taux actuels en organisant une vague de quatre études d’usages. Or, programmées de longue date, elles n’ont toujours pas été lancées par le ministère de la Culture. Pourquoi Molotov trônerait-il en haut de la pile ?

Surtout, l’apparente simplicité du service cofondé par Pierre Lescure vient bouleverser un système peu habitué à une pluie de nouvelles variables. Dans le nuage, la copie privée sera calculée par une période de référence, le mois d’abonnement. On est donc loin de la logique actuelle, celle de l’achat définitif (ou presque, pour les box).

Des barèmes aux variables plus complexes 

Durant ce laps de temps, en outre, l’utilisateur ne va pas nécessairement consommer l’intégralité de son espace de stockage (une centaine de gigas). Faut-il du coup assujettir sur une base forfaitaire ou en s’appuyant sur le réel, armé des données molotoviennes ? Mieux, chaque mois, l’abonné va consommer une partie des contenus, les remplacer soit par du vide soit par d’autres programmes... Volatiles, ces copies seront enfin temporaires puisqu’au mieux limitées à la durée de l’abonnement, sans possibilité de téléchargement...

N’en jetons plus : on voit rapidement l'hasardeuse alchimie qui bouillonne dans l’éprouvette. Heureusement pour la jeune pousse, la Commission copie privée a su maintes fois se défaire des contraintes de la vraie vie. Rien de bien difficile en effet pour 12 ayants droit de griffonner sur un coin de table une « négociation » face à 6 industriels et 6 consommateurs.

Écrit par Marc Rees

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Sommaire de l'article

Introduction

L’alternative du passage en force, arbitré par le CSA

Le barème Molotov : provisoire, définitif ou fantomatique ?

L’heure de la remise à zéro des barèmes

Des barèmes aux variables plus complexes 

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Commentaires (12)


C’est intriguant. La fonctionnalité est très simple mais la mise en oeuvre…

En revanche le manque n’est pas insurmontable, surtout avec le replay qu’offre en général les chaines.


C’est le côté légal qui est un enfer… Mais si, moi, c’est clairement ce que j’attends, le “bookmarking”, comme ils disent. Le replay, tu ne sais jamais ce qu’il va y avoir dessus. Et typiquement, pour les films, le replay, ben ils ne sont pas dessus…


C’est intriguant <img data-src=" />



Intriguant qu’il faille toujours des millions de fric et de tartines légales pour quelque chose que l’on fait en appuyant sur enregistrer depuis l’invention du magnétoscope.



Ayants droit : Vous êtes nuls !!


Molotov c’est pas mal, et Captvty aussi.


Encore et toujours TF1 et M6 qui font de la résistance face au cocktail de Molotov <img data-src=" />


Android c’était pour bientôt ça aura mis trois mois. Le bookmark c’est pour bientôt on l’aura à pâques. Le chromecast ça arrive on l’aura pour le 1er décembre… 2017&nbsp;<img data-src=" />








psn00ps a écrit :



C’est intriguant <img data-src=" />



Intriguant qu’il faille toujours des millions de fric et de tartines légales pour quelque chose que l’on fait en appuyant sur enregistrer depuis l’invention du magnétoscope.



Ayants droit : Vous êtes nuls !!







C’est précisément ce que je trouve intriguant ! Mais entre ça et le magnétoscope il y a la révolution numerique, un autre phénomène “intriguant”..



La loi Molotov, la convention Molotov, le barème Molotov…



Si quelqu’un cherche le non du futur scandale Bygmalion, il y a des chances que ca commence par un M.


Pour faire évoluer la RCP de la VHS au numérique, il avait fallu attendre plusieurs années (avis favorable du Conseil d’État en 2000, premier barème des box adopté par la Commission en 2002).

S’il faut 6 mois à la Commission entre la loi Création du 7 juillet et le 1er barème provisoire des nPvr, ce sera plutôt pas mal.



En attendant, je reste sur&nbsp;Captvty…








wanou2 a écrit :



Android c’était pour bientôt ça aura mis trois mois. Le bookmark c’est pour bientôt on l’aura à pâques. Le chromecast ça arrive on l’aura pour le 1er décembre… 2017&nbsp;<img data-src=" />





Android oui. Android TV non.



Ça marche en installant manuellement le fichier APK puis en “fixant” l’affichage horizontalement. Bon, souris obligatoire donc au final c’est encore du caca de renard.



A croire qu’ils ne veulent SURTOUT PAS que ça se diffuse trop vite…



L’offre légale à l’air moins bien que Captvty.

Donc ça va disparaître.

On trouve tout en gratuit sur le Net et facile.

Pourquoi payer cher pour du plus complexe à utiliser ?



Enfin, si j’enregistre sur le disque dur du décodeur TV Orange (ne rigolez pas), j’ai payé quoi comme taxe ? Celle du disque dur qui est dedans ?