#QPCHertz : la surveillance hertzienne audiencée le 11 octobre au Conseil constitutionnel

#QPCHertz : la surveillance hertzienne audiencée le 11 octobre au Conseil constitutionnel

Sans fil, sans filtre

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Marc Rees

Publié dans

Droit

22/09/2016 6 minutes
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#QPCHertz : la surveillance hertzienne audiencée le 11 octobre au Conseil constitutionnel

C’est ce 11 octobre à 9h30 que sera organisée au Conseil constitutionnel l’audience d’une question prioritaire de constitutionnalité importante. Elle concerne la surveillance des communications hertziennes, laquelle échappe actuellement à tout encadrement.

La mèche de cette affaire a eu pour allumettes l'an passé, les Exégètes, à savoir la Quadrature du Net, French Data Network, la Fédération FDN et l’association Igwan.net. Elle cible une disposition de la loi Renseignement qui puise ses sources dans l'article 20 de la loi de 1991 sur le secret des correspondances, autrefois codifiée à l’article L. 241-3 du Code de la sécurité intérieure. 

Désormais renuméroté L.811-5 par la loi Renseignement, le Code de la sécurité intérieure (CSI) explique que :

« les mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer, aux seules fins de défense des intérêts nationaux, la surveillance et le contrôle des transmissions empruntant la voie hertzienne ne sont pas soumises aux dispositions du présent livre, ni à celles de la sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre III du livre Ier du code de procédure pénale ».

Quand le sans fil se défile

Le livre VIII du Code de la sécurité intérieure mis à l'écart est celui intitulé « Du renseignement ». Il encadre donc toutes les opérations de surveillance… sauf celles empruntant la voix des airs. Et ce L.811-5 écarte également la sous-section du Code de procédure pénale relative aux interceptions de correspondances émises par la voie des communications électroniques. Il suffit que les mesures prises par les pouvoirs publics visent à assurer « la défense des intérêts nationaux » pour virevolter dans la liberté la plus totale, dès lors que les « intérêts nationaux » sont en jeu, et pas seulement ceux qualifiés de « fondamentaux ».

En pratique, ces opérations couvertes par le secret-défense n’ont pas à décrocher d’avis explicite ou implicite de la Commission de contrôle des techniques du renseignement (CNCTR), ce fameux verrou destiné, déjà sur le papier, à surveiller les surveillants. Adieu donc les borne à la récolte des données collectées. « Bye-bye » les mesures pour accompagner leur exploitation.  « Ciao » celles visant à garantir une conservation au-delà des limites du raisonnable… Et bien entendu, les citoyens ne disposent d’aucune capacité d’ester en justice puisque prévue par l'inapplicable livre VIII. 

Pour les « Exégètes », cela va donc nettement trop loin. Un tel régime n’a de dérogatoire que le nom puisqu’il « est susceptible de s'appliquer à toutes les communications mobiles », et donc entre un téléphone et une antenne, une liaison Bluetooth, Wi-Fi... Bref, ces multitudes de moyens utilisés par des millions de personnes chaque jour.

Maigre littérature, maigres garanties

La littérature sur le sujet est relativement mince. L’ancêtre de la CNCTR, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (ou CNCSI) avait expliqué dans son rapport annuel 2011-2012, que ces surveillances hertziennes sans aucune borne se « distinguent de toute recherche '"ciblée" de renseignement ou de toute situation de menace avérée et identifiée d’atteinte aux intérêts nationaux ». Au contraire, « ces ''mesures" générales et aléatoires, peuvent le cas échéant révéler une menace potentielle, que des "communications de données techniques" ou des "interceptions de sécurité" permettront, dans le respect du cadre légal dédié, et donc sous le contrôle de la CNCIS, de préciser ».

Du fait de l’usage de l’expression « surveillance et contrôle », elle précisait que dans son esprit, ce régime exceptionnel « ne peut s’expliquer que s’il s’agit de mesures par nature non intrusives non ciblées, prises en "amont" de celles justifiant la mise en œuvre des procédures relatives aux interceptions de sécurité et au recueil de données techniques préalables à l’interception ».

La  surveillance hertzienne ne serait donc qu’une surveillance générale et aléatoire des communications sans fil, calibrée pur relever une menace potentielle qui pourrait alors justifier des mesures plus ciblées.  La CNCSI soulignait qu’une telle mesure ne peut « servir de base à la mise en œuvre d’interceptions de communications individualisables et portant sur une menace identifiée » puisque « pareille utilisation reviendrait en effet à contourner les dispositions encadrant les interceptions de sécurité ».

Et le sénateur Philippe Bas d’ajouter l’an passé que cette disposition avait surtout pour levier « les capteurs hertziens des armées » ceux qui « permettent de recueillir des signaux techniques et des communications électromagnétiques émis depuis l'étranger, par exemple ceux engendrés par des mouvements de troupes, d'aéronefs ou de navires dans une zone donnée. Ces interceptions hertziennes qui résultent du balayage de l'ensemble des gammes de fréquences du spectre électromagnétique, ne concernent pas des identifiants rattachables au territoire national ». Tout en prévenant que les « capteurs correspondants peuvent être mis en oeuvre depuis le territoire national ».

Audience le 11 octobre, décision huit à dix jours plus tard

Seulement ces explications ne se retrouvent pas dans le texte commenté. Voilà pourquoi et le rapporteur public et le 22 juillet dernier, le Conseil d’État ont estimé nécessaire de transmettre la QPC des «Exégètes » au Conseil constitutionnel. Selon nos informations, l’audience est programmée 11 octobre prochain. L'intérêt ? L'épisode va contraindre le gouvernement à sortir du bois pour expliquer combien cette disposition est si respectueuse du bloc de constitutionnalité et notamment du droit fondamental à la vie privée. 

Contacté, le Conseil constitutionnel n’a pas voulu confirmer ce calendrier, mais il nous précise qu’une décision est généralement rendue « huit à dix jours après son audience ». De toute évidence, ce n’est pas un grand secret : dans une QPC, ses décisions doivent intervenir au plus tard dans les trois mois de la transmission du Conseil d’État (ou de la Cour de cassation), soit ici avant le 22 octobre.

Écrit par Marc Rees

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Sommaire de l'article

Introduction

Quand le sans fil se défile

Maigre littérature, maigres garanties

Audience le 11 octobre, décision huit à dix jours plus tard

Commentaires (3)


Merci pour cette remise en contexte bienvenue et bien documentée sur ce sujet sensible.


Je m’en fiche, je communique en morse (et en verlan) par CB ! <img data-src=" />








Alf_Bundy a écrit :



Je m’en fiche, je communique en morse (et en verlan) par CB ! <img data-src=" />





“attention papas 22 en mobylette”