Voilà un peu plus d’un an, le décret « GendNotes » était publié au Journal officiel. Ce fichier de données personnelles accompagne le déploiement chez les gendarmes, d’une « application mobile de prise de notes » afin de faciliter les opérations sur le terrain.
Dans ces données, certaines concernent l’état civil des personnes, la photographie, la géolocalisation de l’auteur de la note. D’autres, les objets (identification du véhicule, sa photographie, etc.). Dans une zone de commentaires libres, peuvent figurer des données sensibles selon le RGPD, celles relatives « à la prétendue origine raciale ou ethnique, aux opinions politiques, philosophiques ou religieuses, à l'appartenance syndicale, à la santé ou à la vie sexuelle ou l'orientation sexuelle ».
La Ligue des droits de l’homme avait attaqué ce décret, avec d’autres associations (Homosexualités et socialismes et Internet Society France, les associations Mousse, Stop Homophobie, Adheos et Familles LGBT, l’association AIDES, le Syndicat de la magistrature et le Syndicat des avocats de France, le Conseil national des barreaux, la Quadrature du Net et la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme).
Les finalités de ce fichier visent certes à recueillir et conserver des données, pour faciliter notamment le prérenseignement d’autres traitements, mais également assurer la transmission de comptes-rendus directement par voie électronique au magistrat du parquet compétent. Problème, si GendNotes veut faciliter le recueil et la conservation des informations collectées par les gendarmes « en vue de leur exploitation dans d'autres traitements de données », cette expression a été retoquée par le Conseil d’État, jugeant le décret est trop taiseux.
Il « ne comporte aucune indication quant à la nature et à l’objet des traitements concernés ni quant aux conditions d’exploitation, dans ces autres traitements », indique la juridiction dans son arrêt rendu mardi. Une telle expression « ne satisfait pas à l’exigence d’une finalité "déterminée, explicite et légitime" », imposée par la loi de 1978.
Par contre, il n’a pas annulé la disposition relative à l’enregistrement des données sensibles. « Il est, d’une part, expressément précisé qu’elles ne peuvent être enregistrées qu’en cas de nécessité absolue ». « D’autre part, ces données sensibles ne peuvent être saisies que dans les zones de commentaires libres (…) et il est interdit de sélectionner une catégorie particulière de personnes à partir de ces seules informations »
Dans un communiqué, le cabinet ALTIJ qui a accompagné les associations Internet Society France et Homosexualités et socialismes dans ce recours estime que cette annulation partielle « est un signal fort pour limiter les interconnexions de fichiers de police et aider nos forces de l’ordre à bénéficier d’outils complets et compliants à la protection des données, conformes en matière de libertés publiques fondamentales ».