L’efficacité de la plateforme Pharos en question à l’Assemblée nationale

L’efficacité de la plateforme Pharos en question à l’Assemblée nationale

Plein pharos

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Xavier Berne

Publié dans

Droit

10/12/2013 5 minutes
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L’efficacité de la plateforme Pharos en question à l’Assemblée nationale

La plateforme de signalement Pharos dispose-t-elle des moyens suffisants pour être efficace ? Voilà la question que vient de poser une députée de la majorité au ministre de l’Intérieur, Manuel Valls. 

pharos

 

Pharos. Derrière cet acronyme pouvant paraître un peu barbare à premier abord, se cache la « Plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements ». Plus concrètement, il s’agit d’un site Internet géré par le ministère de l’Intérieur et destiné à recevoir les signalements de quiconque souhaiterait alerter les autorités d’un contenu ou d'un comportement illicite sur Internet. Les intermédiaires techniques peuvent eux aussi être amenés (voir obligés, dans certains cas tels que la pédopornographie) à l’utiliser.

 

Cette plateforme vient justement de faire l’objet d’une question écrite de la députée socialiste Seybah Dagoma, laquelle a été publiée ce matin au Journal Officiel. « Depuis quelques mois, on assiste à une libération de la parole raciste, qui trouve dans les moyens de diffusion électronique un canal présentant l'avantage de la facilité d'usage, de la gratuité, et de la viralité » commence par expliquer l’élue au ministre de l’Intérieur, Manuel Valls. La parlementaire fait ensuite valoir que quand bien même l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881 permet de sanctionner les auteurs de certains propos, y compris lorsqu’ils sont tenus sur Internet, elle « s'interroge sur l'adéquation des moyens disponibles et en particulier sur l'efficacité de la plateforme Pharos (...) pour agir dans un contexte où bien souvent, des utilisateurs opérant depuis la France, se cachent derrière des pseudos et utilisent des plateformes d'hébergement situées à l'étranger ».

Une poignée d'agents...

La députée ranime là un débat régulièrement soulevé, y compris dans ces colonnes. Car les moyens dont dispose l’OCLCTIC (Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication) pour s’occuper de Pharos paraissent relativement limités. « Une équipe d'une dizaine d'enquêteurs, composée à parité de gendarmes et de policiers, analyse et rapproche les signalements puis les oriente vers les services de police et unités de gendarmerie » expliquait le ministère de la Justice il y a quelques semaines, même si l'OCLCTIC nous confiait en septembre que vingt agents s'occupaient de cette plateforme.

Pour plus d'une centaine de milliers de signalements par an

Le problème vient en réalité du nombre de signalements reçus, qui paraît élevé à comparer du nombre d’agents en charge de les examiner. « Au cours de l'année 2011, 101 171 signalements ont été reçus par Pharos soit une augmentation de 30,3 % par rapport à 2010 » indiquait en octobre la Garde des Sceaux. En 2012, ce sont 119 788 signalements qui ont été effectués. Pour les sept premiers mois de l’année 2013, le nombre de notifications dépassait les 80 000 selon la ministre de la Justice.

 

Si l’on sort la calculatrice : 120 000 signalements pour 10 agents, cela donne 12 000 signalements par agent et par an. En essayant d’enlever les week-ends, les jours fériés et les vacances, l’on arrive à environ 200 jours ouvrés pour les fonctionnaires gérant Pharos. Ce qui nous donne une moyenne de 60 signalements par jour et par agent, soit près de 8,5 signalements par heure. Or l'on devine facilement l'effet mécanique de telles sollicitations : sous le poids d’un nombre trop important de signalements, difficile d’accorder le temps nécessaire à l'examen de chaque notification (vérification, qualification juridique, éventuelle transmission à des services d’enquête, etc.).

 

Il y a quelques mois, un rapport sénatorial expliquait ainsi que sur les près de 120 000 signalements reçus par Pharos en 2012, « seulement 1 329 ont été transmis à la police nationale et 3 970 confiés à Interpol pour enquête ». L'auteur de ce rapport, Virgine Kles, en déduisait que « ces statistiques soulignent les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre de ce type de dispositif en matière de tri des contenus portés à la connaissance des autorités compétentes ».

La députée Dagoma réclame des moyens supplémentaires

Sans se lancer dans une telle démonstration, la députée Dagoma a demandé à Manuel Valls « quels nouveaux moyens pourraient être mis en place pour traquer les publications électroniques à caractère racistes, antisémites ou d'appel à la violence sur la toile, et ainsi pouvoir pénaliser leurs auteurs ».

 

La parlementaire ne l’évoque pas non plus, mais la plateforme Pharos risque d’être bientôt sollicitée de manière encore plus importante. En effet, un arrêté publié en octobre vise à impliquer davantage les intermédiaires techniques face aux dénonciations effectuées par les particuliers sur Pharos, de la même manière que le projet de loi sur l'égalité entre femmes et hommes de Najat Vallaud-Belkacem et la proposiiton de loi sur la prostitution. Si ces textes sont adoptés, FAI et hébergeurs seront ainsi tenus d'agir activement à l’encontre des discours haineux, sexistes, homophobes et handiphobes qui leur auront été signalés. 

Écrit par Xavier Berne

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Une poignée d'agents...

Pour plus d'une centaine de milliers de signalements par an

La députée Dagoma réclame des moyens supplémentaires

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Commentaires (7)




La députée Dagoma réclame des moyens supplémentaires





Sur le principe sa demande n’est pas saugrenue. L’OCLCTIC est beaucoup plus utile que Hadopi et CSA.








amikuns a écrit :



Sur le principe sa demande n’est pas saugrenue. L’OCLCTIC est beaucoup plus utile que Hadopi et CSA.







Ouais mais c’est imprononçable ! <img data-src=" />



Depuis quelques mois, on assiste à une libération de la parole contre Internet qui trouve dans les hémicycles de nos Chambres Parlementaires un canal présentant l’avantage de la facilité d’usage, de la gratuité, et de l’impunité.



Je m’interroge sur l’adéquation des moyens disponibles et en particulier sur l’efficacité de la formation de nos parlementaires aux nouvelles technologies (…) pour agir dans un contexte où bien souvent, des élus opérant depuis la France, se cachent derrière des contre-vérités et utilisent la peur de la nouveauté avec des accents venant de l’étranger








caesar a écrit :



Ouais mais c’est imprononçable ! <img data-src=" />







Net Force est déjà sous copyright, mais sa aurait eu plus de charme.



Avant on pompait des info dans les bordels



Aujourd’hui, on pompera avec des lois rendant les outils informatiques comme puttes péripatéticiennes de services (<img data-src=" /> j’évite la grossièreté) <img data-src=" />



(aargh! moi aussi j’utilise le novlang :beurk:)








amikuns a écrit :



Net Force est déjà sous copyright, mais sa aurait eu plus de charme.





vu que ça se passe en France, Net Farce devrait passer <img data-src=" />



en tout cas ils ont assez de moyens pour s’occuper à menacer des blogeurs pour des blagues de mauvais gout (cf l’affaire pirate sourcil)