L'ONU se penche sur la supervision des agences de renseignement

sed quis custodiet ipsos custodes ?

L’activité fiévreuse autour du monde de la surveillance et du renseignement, dont le scandale a explosé suite aux multiples révélations d’Edward Snowden, prend un nouveau tournant avec l’implication des Nations unies. C’est le rapporteur spécial sur le contre-terrorisme, Ben Emmerson, qui plonge dans un dossier brûlant, entre sécurité nationale, liberté de la presse et information du public.

nations unies

Crédits : Paul VanDerWerf, licence Creative Commons

 

Le monde du renseignement est mis à rude épreuve depuis les premières révélations des documents dérobés par Edward Snowden. Le lanceur d’alertes a braqué les projecteurs sur les méthodes de la NSA, dont le vaste pouvoir de surveillance pose la problématique du respect de la vie privée. La lutte contre le terrorisme a déclenché dans les États-Unis post-11 septembre un déblocage de budgets colossaux ayant alimenté le développement d’infrastructures titanesques. Aujourd’hui, le pays et ses alliés proches (Royaume-Uni, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande) disposent de puissants outils pour trouver ses cibles et dessiner la carte complète de ses contacts, comme une toile d’araignée dont un moucheron ferait vibrer autant de fils.

Les Nations-Unis ouvrent une enquête

La multiplicité des affaires liées à ces informations a pris un tournant aussi économique que politique. Un exemple frappant en est la visite des locaux du Guardian par des agents du GCHQ, l’équivalent anglais de la NSA américaine. Intimidation et destruction de disques durs ont forcé le journal anglais à s’associer avec le New York Times pour continuer à publier sereinement ses articles sur les agissements du gouvernement britannique. Le Guardian a même été accusé de faciliter le travail des terroristes.

 

C’est ici qu’entre en piste le rapporteur spécial Ben Emmerson des Nations unies, en charge des dossiers sur le contre-terrorisme depuis 2011. Le responsable a annoncé qu’une enquête allait être ouverte sur les capacités de lutte anti-terroriste des agences de renseignement américaine et anglaise. Le stockage intensif des données personnelles, capturées par d’immenses filets manquant de granularité, inquiète. Emmerson s’intéresse également à la potentielle tromperie du gouvernement britannique par le GCHQ. Enfin, et c’est un élément crucial, l’enquête devra déterminer si les systèmes de supervision en place correspondent aux critères des Nations unies.

Entre liberté de la presse et encouragement du terrorisme 

Or, Ben Emmerson a déjà exprimé des vues très précises en ce qui concerne la liberté de la presse et les agissements du GCHQ. Dans un article paru hier dans The Guardian, il y indique qu’en dépit de ce que peut en dire le gouvernement anglais, les informations publiées par le journal sont « à l’apogée de soucis du public ». Il ajoute que le Guardian a non seulement le droit, mais également le devoir de publier les informations qu’il possède, héritées d’Edward Snowden, sur les activités du GCHQ et de la NSA.

 

« La stupéfiante suggestion que ce type de journalisme responsable peut être d’une certaine manière comparé à une aide ou à un encouragement du terrorisme a besoin d’être fermement muselé » n’hésite ainsi pas à attaquer le rapporteur. Il insiste : « C’est le rôle de la presse libre de demander des comptes aux gouvernements, et il y a pourtant eu des suggestions scandaleuses de quelques Conservateurs que le Guardian devrait subir une enquête criminelle. Il est décourageant de voir que quelques magazines à scandale ont donné de la visibilité à ce non-sens ». Que la suggestion ait été scandaleuse ou pas, le rédacteur en chef du Guardian, Alan Rusbridger, présentera cet après-midi des éléments devant un comité réuni spécialement pour l’occasion.

Pas de résultats avant plusieurs mois 

Ben Emmerson pointe également certaines inégalités dans les conséquences législatives entre les pays. Ainsi, aux États-Unis, où les informations de Snowden ont eu le principal impact, des coalitions de sénateurs travaillent sur d’importantes révisions du système juridique pour limiter les pouvoirs de la NSA et surtout augmenter la transparence de son fonctionnement. La situation sur le Vieux Continent est différente mais s’apprête selon à changer : « En Europe, la classe politique est en ébullition. De nombreux États ont manifesté de très sérieuses objections aux Nations unies, et on constate des mouvements diplomatiques vers un accord international sur la restriction des activités de surveillance ».

 

Qu’en ressortira-t-il ? L’enquête s’étalera sur plusieurs mois et sa durée précise n’est pas évoquée. Toutefois, les conclusions seront communiquées aux Nations unies l’année prochaine et seront suivies de recommandations. Une question reste de fait en suspens : quel sera le pouvoir réel des Nations unies en cas de modifications à faire apporter aux organes de supervision ?

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