Avec la Hadopi, les sites PUR investissent les salles de classe

L'autre principe de neutralité...

La Hadopi via sa direction de la communication et des relations extérieures, vient d’écrire à des délégués académiques pour le numérique afin de leur proposer la mise en place « d'atelier d'information et de sensibilisation » avec les chefs d’établissements. À cette occasion, elle propose de faire entrer des acteurs labellisés PUR dans les salles de classe.

spiderman école

 

« Afin de sensibiliser les internautes à un usage responsable de contenus culturels en ligne, l'Hadopi a également pour mission de les guider dans l’utilisation des œuvres ». Voilà ce que rappelle la Hadopi dans ce courrier adressé aux délégués académiques pour le numérique.

 

Dans sa missive, signalée par le blog de Michel Guillou, observateur du numérique éducatif et des médias numériques, la Hadopi aimerait ainsi que les élèves soient « sensibilisés au respect du droit d’auteur sur Internet, à la création culturelle et à l’offre légale. »

 

Toujours dans le courrier que nous avons pu consulter in extenso, la Haute autorité fait part de son souhait d’organiser des ateliers de sensibilisation qui « permettent notamment de comprendre le droit d'auteur, la chaine de création dans divers secteurs (musique, film, photographie, jeu vidéo, livre numérique etc...) et de découvrir les sites et service (sans s, NDLR) en ligne légaux qui font vivre la diffusion culturelle sur Internet. »

Des ateliers animés avec des sites PUR

Fait notable, la Haute autorité prévient que ces ateliers seront organisés avec des « acteurs de l’offre légale » : « Pour apporter un éclairage concret et accessible aux élèves, des acteurs de l'offre légale sont associés à ces ateliers : des sites et services en ligne populaires et respectueux du droit d'auteur, des artistes et divers professionnels de la création et de la diffusion culturelle sur Internet sont ainsi invités à présenter leur métier, leur univers culturel et leurs problématiques de façon interactive, ludique et adaptée au jeune publique » (public, NDLR).

 

Pour Michel Guillou, l’analyse est moins fleurie : « il s’agit en fait de faire rentrer dans les classes les marchands de biens de consommation culturels numériques en ligne ayant bénéficié du label PUR qui identifie l’offre légale. Label PUR attribué par l’Hadopi, les choses sont bien faites… »

 

L’intéressé, très impliqué sur les questions d’éducation, remarque dans le même temps qu’il n’est pas possible à cet instant « de vérifier que ces marchands ne mettent en avant, de manière privilégiée, face aux élèves, leurs plateformes labellisées de téléchargement légal » ce qui porterait ainsi « atteinte à la neutralité commerciale et économique de l’école ». Cependant, ajoute-t-il, « l’expérience montre que ce n’est jamais une bonne idée de faire entrer les marchands dans les classes, sans prendre de nombreuses précautions pour garantir la neutralité de la parole qu’ils portent ».

 

Le site de l'éducation nationale expose en effet que « la publicité est interdite dans l'enceinte de l'école. Ni les enseignants, ni les élèves ne doivent servir, directement ou indirectement, à quelque publicité commerciale que ce soit ». Quant au label PUR, celui-ci est censé aider « les internautes à identifier les plateformes proposant des offres en ligne respectueuses des droits des créateurs (films, titres musicaux, jeux vidéo, livres numériques, etc.)Les plateformes labellisées par l’Hadopi apposent le logo PUR sur leur site, indiquant ainsi  qu’elles proposent une offre dans le respect des droits des créateurs. »

La journée portes (entre) ouvertes

Eric Walter a réagi sur Twitter,  ergotant qu' « à aucun moment il n'est fait référence [dans ce courrier] aux sites labelisés, le n'importe quoi a des limites même un vendredi ». Le mail en question évoque pourtant l'association « d'acteurs de l'offre légale », « respectueux du droit d'auteur ». La Hadopi cite même son initiative menée en avril 2013 où elle avait déjà tenté de porter cette bonne parole aux jeunes. Fotolia France, Jamendo, Avecomics ou encore Wakanim, d'autres labellisés, étaient ainsi venus animer un atelier dans son sous-sol avec des élèves, à l’occasion de la semaine de la presse et d’une journée porte ouverte … fermée à la presse.  (ou presque.)

 

Quoi qu'en dise le secrétaire général de la Hadopi, cette expérience est clairement rappelée dans cette lettre adressée à des délégués académiques : « trois classes avaient pu approfondir différentes thématiques : la plateforme Jamendo avait fait découvrir les différentes licences Creatives Commons, la banque d'images en ligne Fotolia les avait initié (initiéS, NDLR) au droit à l’image et un diffuseur gratuit d'animation japonaise, Wakanim, avait présenté la chaine de création d'un manga ». Du gratuit, du libre, mais outre ces sites labellisé on trouve aussi derrière PUR des mastodontes comme iTunes, Orange Music Store, OFF TV d'Universal, etc. 

Code is law

Cette attention de la Hadopi pour les cours de récré n’est pas une nouveauté. En 2009, la loi instituant cette autorité, dont l’activité principale reste l’avertissement, avait modifié le code de l’éducation afin de faire inscrire cette disposition :

 

Article L312-9. Tous les élèves sont initiés à la technologie et à l'usage de l'informatique.

Dans ce cadre, notamment à l'occasion de la préparation du brevet informatique et internet des collégiens, ils reçoivent de la part d'enseignants préalablement sensibilisés sur le sujet une information sur les risques liés aux usages des services de communication au public en ligne, sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d'œuvres ou d'objets protégés par un droit d'auteur ou un droit voisin pour la création artistique, ainsi que sur les sanctions encourues en cas de délit de contrefaçon. Cette information porte également sur l'existence d'une offre légale d'œuvres ou d'objets protégés par un droit d'auteur ou un droit voisin sur les services de communication au public en ligne.

 

Depuis juin 2013, la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République a raboté les termes de cet article en optant pour une approche nettement moins anxiogène d’Internet :

 

Article L312-9 (nouveau) La formation à l'utilisation des outils et des ressources numériques est dispensée dans les écoles et les établissements d'enseignement ainsi que dans les unités d'enseignement des établissements et services médico-sociaux et des établissements de santé. Elle comporte une sensibilisation aux droits et aux devoirs liés à l'usage de l'internet et des réseaux, dont la protection de la vie privée et le respect de la propriété intellectuelle.

 

Toutefois, l'article L312-6 du Code de l’Éducation prévoit toujours des mesures similaires puisque dans le cadre des enseignements artistiques obligatoires, « les élèves reçoivent une information sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d'œuvres ou d'objets protégés par un droit d'auteur ou un droit voisin pour la création artistique. »

Manger à tous les ateliers

Alors que l’Assemblée avait voté ce projet de loi sur la refondation de l'école, la Hadopi avait déjà adressé un mailing ciblant cette fois les délégués à la vie lycéenne. Elle leur proposait là encore « d'animer au sein de votre académie un atelier de sensibilisation à l'attention des enseignants, référents TICE, documentalistes et personnel d'encadrement ». Dans le détail, le courrier précisait que « ces ateliers sont composés de différents modules pédagogiques qui visent à apporter à la communauté éducative un éclairage clair et précis sur des enjeux relatifs au droit d’auteur, à la création artistique et aux usages responsables sur Internet, mais aussi à répondre à des questions concrètes auxquelles les enseignants sont confrontés dans le cadre de leurs enseignements. »

 

La Hadopi a tout autant multiplié les études et marchés pour mieux approcher cette jeunesse tentée par le clic impur. Citons en 2009 son appel d’offres pour un plan comm' destiné à former les jeunes quant « aux dangers pour la création que comporte l'appropriation illicite d'œuvres protégées », en 2011 la fameuse campagne appuyée par les clips d’Emma Le Prince & co qui a englouti 3,2 millions d’euros d’argent public, ou en 2013 cette étude, fruit là encore d’un autre appel d’offres, visant les digital natives.

« Les élèves avait créé »

Dans sa lettre datant de fin octobre, la Hadopi insiste pour placer ses ateliers entre les murs des classes assurant qu’à l’occasion de sa journée portes ouvertes, « les élèves avait créé leur propre magazine en ligne grâce à un outil développé par un éditeur en ligne de bandes-dessinées numériques, AveComics. ». Avec une autre jolie faute sur « avoir ».

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