Outre l’acteur Jérémie Elkaïm, PC INpact a pu interviewer cette semaine dans le cadre du Festival du film de la Réunion Cédric Kahn, scénariste et réalisateur de nombreux films tels que L’avion (2005) ou Une vie meilleure (2012). L’occasion pour nous de l’interroger sur Hadopi et les questions liées au partage illicite de fichiers sur Internet.
Étant donné que le thème de ce festival tourne autour du thème du « partage », pourrait-on savoir ce que vous inspire le partage de films sur Internet ?
Oula... Le partage, c’est-à-dire le fait que l’on puisse accéder à des films gratuitement ? Le problème ce n’est pas tellement la gratuité, puisque de mon point de vue elle n’existe pas, c’est la rétribution. Les opérateurs, les canaux ne rétrocèdent pas. Ça pose un vrai problème puisque tout créateur, de film, de disque, de livre ne peut pas vivre de la gratuité.
Après, moi je trouve super que les gens qui n’ont pas d’argent puissent accéder à la culture de façon gratuite. Je n’ai pas de problème avec ça, fondamentalement.
Quand vos films sont téléchargés illégalement, qu’est-ce que cela vous fait ?
Je ne peux pas dire que ça m’atteigne directement parce que le cinéma, c’est une économie globale. Moi, je suis payé pour faire un film. Je ne peux pas dire que si quelqu’un télécharge mon film devant moi, il me prend de l’argent dans ma propre poche. Ce n’est pas un lien aussi organique.
Quelle est votre position sur la Hadopi et le dispositif de riposte graduée ?
Je ne sais pas... Je sais qu’il y a eu un grand débat « pour ou contre Hadopi »... Moi je pense qu’il faut qu’il y ait une redistribution. Les opérateurs, les canaux par lesquels les films sont pris doivent redonner de l’argent aux producteurs. Je ne sais pas quelle est la meilleure loi pour ça, mais je ne suis pas pour une impunité.
Sauf qu’Hadopi n’a aucun rôle en matière de redistribution, et n’intervient que pour sanctionner certains internautes...
Je ne suis pas pour une impunité, mais je ne suis pas sûr qu’Hadopi soit exactement la bonne réponse. Je pense que c’est le canal qui doit redistribuer, de la même manière que quand France 2 ou TF1 diffusent nos films, ils nous donnent de l’argent pour le faire. Donc c’est le « diffuseur payeur », et après, que le diffuseur s’arrange avec son consommateur. C’est la responsabilité du diffuseur de laisser en libre-service des œuvres. Donc si lui veut que le consommateur le rétribue, il n’a qu’à installer des systèmes de péage et de blocage, mais c’est le diffuseur qui est responsable de ce qu’il met en ligne.
Que pourraient faire selon vous les autorités pour lutter davantage contre le piratage de films sur Internet ?
C’est le même débat partout. Par exemple, quand on parle de prostitution et de punir les clients, c’est exactement la même chose. Est-ce qu’on s’attaque aux clients ? Je pense qu’il faut qu’on batte les réseaux. C’est comme la drogue : est-ce qu’on pénalise le consommateur ou le dealer ? Finalement, ce débat-là est partout. Est-ce qu’on pénalise le pauvre immigré qui n’a pas de papiers ou le mec qui exploite les clandestins ? Pour tout ça, je suis toujours pour poursuivre et condamner le mafieux.
Seriez-vous favorable à une forme de « licence globale » ?
L’équivalent de la redevance télé ? Pourquoi pas...
Merci Cédric Kahn.