Dans son projet de résolution sur la copie privée, qui doit encore être voté par le Parlement européen, Françoise Castex a soulevé le sujet de la légalisation des échanges non marchands. Elle a demandé à la Commission européenne de simplement plancher sur le sujet. Un projet déjà combattu par plusieurs eurodéputés qui ne veulent pas entendre parler d’une telle étude.
Au point 27 de son rapport sur la copie privée, l’eurodéputée Françoise Castex a demandé à la Commission européenne et aux vingt-huit États membres de l’UE « d'étudier la possibilité d'une légalisation du partage d'œuvres à des fins non commerciales », et ce « afin de garantir aux consommateurs un accès à une grande variété de contenus et un choix réel en matière de diversité culturelle ».
Castex rejoignait là le rapport Lescure ou encore Aurélie Filippetti, qui ont suggéré l’un et l’autre une telle étude, non contraignante, non engageante.
Pluie d'amendements de suppression
Sauf qu'un tel projet européen, qui ne prendra la forme que d’un simple rapport d’étude, n’est pas au goût d’autres eurodéputés. Les Français Marielle Gallo et Jean-Marie Cavada ou encore l'Allemande Angelika Niebler (PPE) et quatre autres parlementaires ont déposé des amendements visant à supprimer le point 27, afin de fermer la porte à ces réflexions.
Cette démarche n’est pas une surprise. Marielle Gallo l’avait dit sans détour lors d’une audition en commission des affaires juridiques sur le rapport Castex : « Je vais proposer la suppression du paragraphe 27 sur la législation du P2P ! Cette disposition ne fait l’unanimité de personne, ni les titulaires de droit ni la société civile ne le soutient » affirmait-elle.
Pour la Quadrature du Net, au contraire, « de tels propos bafouent les revendications de nombreuses organisations citoyennes qui, en France, aux Pays-Bas, en Pologne ou en Suède, demandent la légalisation du partage et la réforme du droit d'auteur. Marielle Gallo caricature également la position des titulaires de droits, puisqu'en France, des représentants d'interprètes musicaux ou de photographes se prononcent en faveur de la légalisation des échanges non-marchands ».
Selon l'association, il est « urgent d'adapter le périmètre du partage non-marchand des œuvres numériques autorisé entre individus aux réalités des pratiques numériques et au progrès des connaissances sur leur impact économique ». Et celle-ci d’appeler à la sacralisation du point 27 de la résolution Castex.
Utilisation non commerciale et transformation des oeuvres numériques
La députée Marietje Schaake (ALDE, Pays-Bas) a proposé pour sa part non l’étude d’une possibilité d’une légalisation des échanges non marchands, mais une évaluation des « incidences » d’un tel projet. Nuance. L'Autrichien Josef Weidenholzer (PS) a une démarche plus positive encore puisqu’outre le rapport commandé par Castex, il veut que la Commission et les États membres « proposent des solutions afin de permettre l'utilisation non commerciale et la transformation d'oeuvres numériques dans la vie quotidienne, sans procédure complexe d'octroi de licence ou sans accroître l'incertitude juridique. »
Augmenter la copie privée grâce au cloud ?
Plutôt qu’une étude sur la légalisation des échanges non marchands, l'eurodéputé Jean-Marie Cavada a d’autres idées en tête. Il rejoint sur ce plan la député Françoise Castex dans un article additionnel. Il souhaite en effet que la Commission européenne « évalue l'impact sur les régimes de copie privée des services informatique en nuages qui offrent des possibilités de reproduction et de stockage à des fins privées ». L'élu du Nouveau Centre veut ainsi que soit déterminé « comment ces copies privées d'œuvres protégées devraient être prises en compte dans les mécanismes de compensation », afin de gonfler le cas échéant les rendements de ces prélèvements.