Que faire de la Commission copie privée ? Après la démission de cinq des six représentants des « industriels » (importateurs, distributeurs), le ministère de la Culture réfléchit à un remodelage des règles de gouvernances.
Le 13 novembre dernier, la FEVAD (Fédération e-commerce et vente à distance), le SECIMAVI (Syndicat des entreprises de commerce international de matériel audio, vidéo et informatique), le SFIB (Syndicat de l’industrie des technologies de l’information), le SIMAVELEC (Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques) et le SNSII (Syndicat national des supports d’image et d’information) claquaient la porte de la Commission copie privée.
Des consommateurs parfois aussi « organisateurs de festival »
Les démissionnaires dénonçaient notamment les règles de gouvernance puisque les 12 ayants droit sont presque toujours assurés d’avoir gain de cause selon les règles de vote en vigueur en son sein. Et pour cause, comme l’expliquaient les industriels, parmi les consommateurs certains ont des « positions ambivalentes (organisateurs de festivals…) [et] votent systématiquement avec les ayants droit ». Rappelons qu’un quart de la copie privée vient justement financer les festivals ce qui peut générer quelques troubles dans l’équilibre des textes selon le sens des flux. « De fait, les ayants droit sont donc majoritaires et imposent leurs décisions, en ignorant la position du collège des industriels qui ne supportent plus de jouer les collecteurs d’impôts, au détriment des consommateurs. »
Plusieurs options à l’étude
Actuellement, le ministère de la Culture planche sur de nouvelles règles afin de rétablir la paix des ménages. « Nous étudions plusieurs options, mais aucun levier n’est à ce jour stabilisé » nous ont confié les services d’Aurélie Filippetti lors des rencontres cinématographiques de Dijon.
Une chose est sûre, la Rue de Valois rejette l’idée d’une structure composée d’un tiers d’ayant droits, d’un tiers d’industriels, et d’un tiers de consommateurs. « On se retrouverait en effet avec deux tiers de contributeurs, un seul tiers de bénéficiaires. C’est un rapport de force totalement défavorable aux ayants droit. »
Parmi les options envisagées, le ministère a le rapport Lescure en tête. Celui-ci propose par exemple que les barèmes soient fixés par décret. La commission deviendrait alors simplement consultative. « En cas d’accord au sein de la Commission à la majorité de ses membres, le gouvernement serait tenu de reprendre le barème proposé, sauf à solliciter une nouvelle délibération s’il jugeait la proposition manifestement déséquilibrée. À défaut d’accord, les barèmes seraient fixés par le gouvernement, au vu des positions exprimées par les différentes parties. Cette solution rapprocherait la France du mode de gouvernance le plus répandu dans l’Union européenne. »
Autre scénario, celui défendu par les ayants droit avec une commission où interviendraient plusieurs représentants de l’État pour lui faire gagner en légitimité. Mais ce n’est pas la seule autre piste.
Muscler la représentativité de la Fédération Française des Télécoms ?
Le ministère de la Culture pourrait aussi tenir compte du fait que les télécoms apportent 50 % des montants de la rémunération pour copie privée, soit près de 100 millions collectés. « Aujourd’hui il y a un seul représentant de la Fédération Française des Télécoms [qui n’avait pas démissionné, NDLR] au sein du tiers professionnels. Peut-être faut-il rééquilibrer les choses. »
Une surreprésentativité selon l’importance des contributeurs ? Ce rééquilibrage impliquerait le départ d'autres industriels. On peut aussi déjà anticiper la réaction au sein du collège des consommateurs dont certains membres pourraient militer pour plus de voix car ils ont une représentativité plus forte.
« Avec 30 000 adhérents, nous sommes la seconde association après l’UFC que Choisir » réagit la CLCV qui siège en commission aux côtés de l’Association de défense, d'éducation et d'information du consommateur (ADEIC), de l’Association études et consommation (ASSECO-CFDT), de Familles de France (FF), de Familles rurales (FR) et de l’Union nationale des associations familiales (UNAF). « La configuration actuelle, 12 contre 12, c’est tout sauf vrai, car parmi les consommateurs, les représentants ont des sensibilités différentes » regrette l’association qui souligne au feutre fluorescent que « nous, on défend les intérêts de consommateurs et uniquement eux. »
L’analyse est donc on ne peut plus contrastée : « Aujourd’hui, nous avons un peu le sentiment d’une surreprésentativité des ayants droit où le vote des tarifs est une formalité. Il ne manque qu’une voix à chaque fois. Peut-être serait-il ainsi préférable que des associations de consommateurs qui ne représentent que des consommateurs aient une voix plus importante. Or, la configuration actuelle est un peu biaisée. »