Alors que François Hollande réclamait hier que les États-Unis fournissent « toutes les explications » relatives aux récentes révélations du Monde sur l'espionnage des communications de citoyens français, le directeur du renseignement américain vient d’affirmer que les informations du quotidien étaient « inexactes et trompeuses ». Sans toutefois préciser quel - mauvais - sens nos confrères auraient choisi.
« Les articles récemment publiés dans le journal français Le Monde contiennent des informations inexactes et trompeuses sur les activités du renseignement américain ». Cette réaction officielle est signée James Clapper, directeur du renseignement national des États-Unis. Par voie de communiqué, l’intéressé a effectivement fait savoir hier que « l’allégation selon laquelle la National Security Agency (NSA) aurait collecté plus de 70 millions ''d'enregistrements de données téléphoniques de citoyens français'' est fausse », comme le rapporte la BBC.
L’homme ne s’est toutefois pas davantage expliqué. Sans s’étendre sur les détails des activités de la NSA, James Clapper a simplement rappelé avoir déjà reconnu que les États-Unis rassemblaient des éléments de renseignement « du même type que ceux collectés par toutes les nations ». L’ensemble de ces propos laisse en fin de compte la porte ouverte vers différentes lectures. Les éléments mis en avant par nos confrères pouvant être faux, inexacts et trompeurs car ils sont surestimés, ou bien, au contraire, être sous-estimés...
Faux, inexact, trompeur... mais dans quel sens ?
Pour rappel, Le Monde révélait lundi - à l’appui de documents dérobés par Edward Snowden - que la NSA avait effectué 70,3 millions d'enregistrements de données téléphoniques en France du 10 décembre 2012 au 8 janvier 2013 (voir graphique ci-dessous). Une collecte visant des cibles non précisées, mais dont les contours demeuraient particulièrement larges. « Quand certains numéros de téléphone sont utilisés dans l'Hexagone, ils activent un signal qui déclenche automatiquement l'enregistrement de certaines conversations. Cette surveillance récupère également les SMS et leur contenu en fonction de mots-clés » expliquait ainsi le quotidien.
Capture extraite du graphique révélé par Le Monde.
L’exécutif est ensuite monté au créneau, le ministre des Affaires étrangères ayant convoqué l’ambassadeur des États-Unis dès lundi, puis en recevant hier John Kerry, le chef de la diplomatie américaine, au Quai d’Orsay. François Hollande s’est de son côté entretenu avec Barack Obama lundi soir par téléphone. Si le locataire de l’Élysée a fait savoir qu’il avait convenu avec son homologue « de travailler ensemble pour établir les faits et la portée exacte des activités de surveillance révélées par Le Monde », la Maison Blanche a pour sa part simplement indiqué que les deux présidents avaient « parlé des récentes révélations dans la presse, dont certaines ont déformé nos activités et d’autres soulèvent des questions légitimes pour nos amis et alliés sur la façon dont ces capacités [de surveillance, ndlr] sont employées ».
Des révélations qui impacteront le Conseil européen de cette semaine
Le Premier ministre a d’autre part été interrogé à ce sujet hier après-midi par le député socialiste Eduardo Rihan Cypel, qui lui demandait quelles réponses le gouvernement avait reçu jusqu’ici des autorités américaines. Jean-Marc Ayrault n’a cependant donné aucun élément nouveau, se contentant d’affirmer que ceci impacterait le Conseil européen de demain et après-demain. « Le Président de la République a demandé que cette question, qui est à la fois nationale et européenne, soit inscrite à l’ordre du jour. Nous devons nous protéger, exiger que de nouvelles règles soient posées. Cela implique que la France et l’Europe, dans un dialogue serein mais ferme et clair, travaillent avec les États-Unis. La sécurité est une exigence, mais elle ne doit pas être garantie à n’importe quel prix ; elle ne doit porter atteinte ni aux libertés ni à la vie privée. Telle est la position de la France ! » a-t-il déclaré.