Un homme employé par une entreprise du Maine-et-Loire vient d’être licencié en raison de son usage abusif de Facebook sur son lieu de travail. L’occasion de rappeler quelles sont les limites qui ont été posées jusqu’ici par la jurisprudence dans ce type d’affaires.
Un salarié de 42 ans vient d’être licencié en raison de son utilisation de Facebook au travail, comme le révèle Ouest-France. L’avocat de l’employeur a effectivement expliqué à nos confrères que l’homme avait eu « un usage abusif [du réseau social] pendant [son] temps de travail », notamment en envoyant « 27 à 50 messages quotidiens ». L'entreprise estimait qu'une telle utilisation lui faisait perdre 30 minutes de travail par jour.
Également accusé de ne pas réaliser « les tâches que l’employeur lui demandait » et d’avoir des « moments de déconcentration et d’inattention », le comportement du salarié constituait aux yeux de son patron une cause réelle et sérieuse de licenciement. Il a ainsi été remercié après cinq ans passés dans l’entreprise.
Toujours selon Ouest-France, l’ancien employé a concédé avoir eu un usage « classique » de Facebook, de l’ordre de « quelques minutes par jour ». Mais si l’intéressé n’aurait pas encore saisi les prud’hommes d'après le quotidien, cette affaire appelle au vu des éléments en présence différentes observations.
Une jauge de tolérance évoluant au fil des litiges
De jurisprudence constante, les salariés bénéficient en effet d’un droit à la vie privée sur leur lieu de travail, lequel consacre notamment une certaine tolérance s’agissant de l’utilisation à des fins non professionnelles du matériel informatique mis à leur disposition. Tout dépend cependant de l’importance de cet usage, qui ne doit pas être considéré comme abusif.
La cour d’appel de Bordeaux a par exemple estimé le 15 janvier dernier que surfer une heure par semaine de travail (sur la base d’un temps partiel de 30 heures) sur Internet ne pouvait pas être considéré comme une période de consultation « déraisonnable et donc réellement abusive ». Les juges ont donc déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappelant au passage que pour être tolérée, une telle utilisation ne devait pas « affecter la sécurité des réseaux ou la productivité de l’entreprise » (voir notre article et la décision correspondante). Autre exemple : la cour d’appel de Lyon a jugé en 2011 que six connexions à Facebook en l’espace de deux mois ne constituaient pas non plus une cause réelle et sérieuse de licenciement.
En revanche, les exemples d’utilisations considérées comme abusives sont légion. Si celles permettant de justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse sont assez rares, beaucoup ont été validées par la justice lorsqu'il s’agissait de caractériser une faute grave. Ce fut par exemple le cas de cet employé ayant consulté Internet pendant 41 heures durant un seul et même mois, en décembre 2004. Ce fut également le cas de cette salariée remerciée sans préavis en 2009 après avoir effectué plus de 10 000 connexions à des sites dépourvus de lien avec son travail sur une période de 11 jours ouvrés.
Mais ce droit à la vie privée dont bénéficie le salarié concerne également ses correspondances personnelles. Si, lorsqu’il s’agit d’utilisation de la messagerie professionnelle, les juges considèrent que la mention « personnel » doit être apposée dans l'objet d'un mail pour que l’employeur ne puisse prendre connaissance de son contenu en dehors de la présence de son salarié, il serait intéressant de voir l’interprétation des juges s’agissant de messages privés reçus sur Facebook, comme cela semble être le cas s'agissant du récemment licenciement de ce quadragénaire.