Combien l’État rembourse aux opérateurs au titre des interceptions judiciaires

Satisfait ou remboursé

Devenus de véritables auxiliaires de la justice et de l’État lorsque des enquêtes nécessitent par exemple de géolocaliser un mobile, les opérateurs de téléphonie et les fournisseurs d’accès à Internet bénéficient d’une indemnisation pour les services qu’ils rendent à la collectivité. Les remboursements alloués au titre de ces prestations viennent d’ailleurs d’être actualisés.

Ces nouvelles dispositions ont été validées durant l’été, mais elles viennent de paraître ce matin au Journal Officiel. Au travers de trois arrêtés datés respectivement du 21 août, du 23 août et du 24 septembre dernier, le gouvernement a mis à jour les montants remboursés par l’État lorsqu’il adresse des réquisitions aux opérateurs de téléphonie (fixe comme mobile) ou aux fournisseurs d’accès à Internet. En clair, il s’agit de l’indemnisation à laquelle peuvent prétendre ces différents intermédiaires techniques dès lors que les autorités exigent leur collaboration.

 

Par exemple, à partir de demain, l’État allouera 18 centimes d’euros (hors taxes) par IP aux FAI lorsqu’ils identifieront plus de 20 abonnés « à partir d'une demande dématérialisée conforme sur des adresses IP horodatées », et à condition que le fournisseur d’accès n’ait à effectuer qu’une recherche sommaire dans son système d’information. Il en coûtera en revanche 18 euros au Trésor Public si les autorités veulent obtenir d’un FAI les éléments d'identification relatifs à une personne physique (ainsi qu’à son installation, sa connexion, son contrat...), s’ils ne fournissent qu’une simple adresse IP horodatée et des « informations complémentaires ». Pour intercepter le trafic DATA/IP émis et reçu par un accès internet, l’État devra débourser 24 euros.

 

tarif interception mobile

Tarifs pour la téléphonie mobile

En matière d’interceptions de sécurité, il en coûtera désormais 3,06 euros aux finances publiques pour l’identification d'un abonné mobile à partir de son numéro d'appel, des caractéristiques techniques de sa ligne ou du numéro de sa carte SIM. C’est d’ailleurs le même prix pour obtenir l’historique d'attribution d'un numéro d'appel. L’État pourra également connaître - pour 4,08 euros - le point de vente à partir duquel un client s’est abonné, et ce si les autorités fournissent soit un numéro d'appel, un numéro de carte SIM, un identifiant d'abonné (IMSI) ou un identifiant de téléphone (IMEI).

 

Pour obtenir la localisation en temps réel d'un mobile, et donc suivre l’appareil à la trace, les autorités payeront 20 euros pour la mise en suivi, plus 8 euros par jour de fonctionnement.

 

tarif interception mobile

Extrait des tarifs applicables aux opérateurs de téléphonie mobile (montants hors taxes).

Tarifs pour la téléphonie fixe

S’agissant des réquisitions concernant des lignes de téléphonie fixe, le tarif de l’identification d’un abonné peut aller de 53 centimes s’il y a plus de 20 numéros à rechercher et si la demande est transmise par voix électronique, à 4,08 euros s’il n’y en a qu’un seul numéro à identifier. Pour obtenir la date, l'horaire et la durée de chaque communication effectuée depuis une ligne, l’État devra payer 10,20 euros pour obtenir le détail des appels entrants et sortants d'un abonné sur une période indivisible de 31 jours. Il lui en coûtera ensuite 1 euro supplémentaire par mois.

 

tarifs interception fixe

 

L’ARCEP salue avec « satisfaction » une clarification vis-à-vis des FAI

Si les tarifs n’évoluent finalement assez peu à comparer du précédent arrêté précisant ces tarifs (arrêté du 26 mars 2012), le principal apport de ces textes réside dans la fixation officielle des remboursements associés aux services rendus par les FAI. « Bien que les articles L. 34-1-1 et R. 10-13 du Code des postes et des communications électroniques imposent aux opérateurs la conservation [des données liées à l'utilisation d'internet], les tarifs des prestations dédiées à l'internet n'avaient encore jamais été fixés » relève ainsi l’ARCEP dans son avis rendu vis-à-vis de ces arrêtés, publié lui aussi au JO de ce matin. « La détermination et la tarification de ces prestations permettent ainsi aux opérateurs de connaître de manière précise et transparente les données qu'ils sont susceptibles de devoir fournir ainsi que les tarifs associés » retient le régulateur des télécommunications. Ce dernier salue d’ailleurs avec « satisfaction » cette évolution, qui apportera selon lui « plus de transparence et de lisibilité aux opérateurs de communications électroniques ».

 

Dans son avis, l’ARCEP note également que ces arrêtés « indiquent désormais que, pour les prestations ne figurant pas dans les tableaux annexés, le montant du remboursement ne sera plus uniquement déterminé sur devis mais pourra être déterminé en accord avec les opérateurs ». Autrement dit, l’État pourra s’engager bien plus facilement dans des marchandages avec les intermédiaires techniques, avec à la clé - on le devine - l’espoir de réaliser des économies. Car la facture s'est révélée salée pour le Trésor Public ces dernières années, comme le regrettait un rapport parlementaire paru l'année dernière (voir notre article). En cause, notamment, l'augmentation du nombre de réquisitions judiciaires au cours des dernières années. 

 

Le rapport saluait cependant la mise en place, prévue pour le courant de l’année 2013, d’une plateforme nationale aux interceptions judiciaires (PNIJ) afin de permettre « aux officiers de police judiciaire d’envoyer aux opérateurs de téléphonie mobile leurs réquisitions de façon dématérialisée et de valider, également par voie dématérialisée après réception de la prestation, le service fait ». L’objectif ? Des gains de temps mais aussi - et surtout - d’argent, le tout étant permis par l’automatisation de la nouvelle plateforme : « Les opérateurs, qui n’auront plus besoin d’établir de mémoires de frais, adresseront mensuellement et de façon dématérialisée leur facture pour paiement. Les frais seront payés au plan central, et non plus par les juridictions » indiquait ainsi le rapport Eckert. 

Et pour les FAI réquisitionnés dans le cadre de la riposte graduée ?

Alors que les FAI n’ont toujours pas perçu un centime au nom des identifications d’abonnés réalisées pour le compte de la Hadopi, la publication de ces arrêtés permet de se faire une petite idée de l’addition que pourrait avoir à régler l’État. Avec près de 2,35 millions d’abonnés avertis à la fin septembre, et en prenant le tarif le plus bas (18 centimes par IP), l’on en arriverait à un total de 423 000 euros minimum. Mais la facture est encore plus salée que ça, de l'ordre de plusieurs millions d'euros. Et pour cause : le ministère de la Culture n'ayant pas publié le texte permettant d'encadrer ces remboursements, les FAI ont appliqué un tarif libre. 

 

Quoi qu'il en soit, peu importe pour l'instant le montant de la douloureuse, la balle saute continuellement du ministère de la Culture à la Rue du Texel, chaque institution estimant que ce n’est pas à elle d'indemniser les opérateurs.

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