Si François Hollande avait promis en mars dernier « dissuasion et répression » sur les réseaux sociaux, le compte n’y est pas aujourd’hui. Tel est le message que vient de faire passer en substance une députée appartenant à la majorité socialiste. Cette dernière réclame auprès de l'exécutif davantage de moyens « pour traquer les sources des tweets haineux (...) et ainsi pouvoir pénaliser leurs auteurs ».
« Les 14, 15 et 16 septembre 2013, après avoir annoncé sa participation à une manifestation contre l'université du Front national à Marseille, une citoyenne française a reçu sur le média social Twitter plusieurs centaines de tweets racistes, antisémites, sexistes et appelant à la violence ». C’est à l’appui de ce nouveau fait divers mettant en cause des twittos que la députée socialiste Sandrine Mazetier a interpellé le ministre de l’Intérieur, et ce au travers d’une question écrite publiée ce matin au Journal Officiel. L’élue affirme s’interroger « sur l'adéquation entre les objectifs définis par la loi et les moyens mis en œuvre [par les autorités, ndlr] pour identifier les auteurs de publications illégales ».
La députée Mazetier veut davantage de moyens pour traquer les twittos
En effet, la parlementaire ne manque pas de souligner qu’en vertu de l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881, le délit de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence est également caractérisé lorsqu’il a lieu via un « moyen de communication au public par voie électronique », dont Internet. Ceci « concerne par conséquent les propos illégaux tenus sur le réseau social Twitter » relève ainsi Sandrine Mazetier. L’élue insiste au passage sur le fait que l’exécutif met régulièrement en avant ses efforts sur ce dossier : augmentation du nombre de signalements effectués sur la plateforme Pharos, instructions données aux Parquets, etc.
Mais la conclusion de Sandrine Mazetier résonne comme un profond désaveu : la députée demande à Manuel Valls « quels nouveaux moyens pourraient être mis en place pour traquer les sources des tweets haineux, et de façon générale de propos à caractère racistes, antisémites ou d'appel à la violence sur le web, et ainsi pouvoir pénaliser leurs auteurs ». Autrement dit, aux yeux de l’élue, les moyens actuels ne suffisent pas. Mais surtout, ils ne permettent pas de sanctionner les auteurs de messages illicites publiés sur Internet.
Quels résultats pour la plateforme de signalement Pharos ?
De son côté, le député Jérôme Guedj laisse lui aussi transparaître son impatience. Au ministre de l’Intérieur, il a demandé quels étaient « les résultats obtenus à ce jour par la cellule Pharos pour identifier et interpeller les auteurs de ces propos (...) et quels moyens lui seront alloués à l'avenir ». Car si l’on sait que la fameuse plateforme gouvernementale de signalement est saturée (120 000 contenus illicites notifiés en 2012, dont le traitement est assuré par 20 agents), l’on ne sait pas quelles suites ont précisément été données à ces signalements.
À la ministre de la Justice, Christiane Taubira, il a fait valoir que l’identification de plusieurs dizaines de twittos dans le cadre de l’affaire #UnBonJuif demeurait un résultat bien isolé. « Cette obligation reste pour le moment limitée à cette seule procédure » affirme ainsi le député. Jérôme Guedj a donc invité la Garde des Sceaux à lui expliquer « quelle législation permet aux magistrats instructeurs de diligenter des enquêtes pour identifier les auteurs de publications racistes et antisémites qui se cachent derrière des pseudos et des hébergement de sites à l'étranger alors qu'ils opèrent depuis la France d'où ils postent leurs textes ».
L’on rappellera néanmoins qu’Internet et les réseaux sociaux ne sont pas la zone de non-droit que certains décrivent parfois. Si le combat de l’UEJF contre Twitter a fortement été médiatisé - sans qu’il n’y ait eu pour l’heure de condamnation ou même de mise en examen - d’autres utilisateurs de réseaux sociaux ont déjà été condamnés en France pour leurs propos, jugés contraires à la loi. Le 31 janvier dernier, le tribunal de grande instance de Paris a par exemple puni deux utilisateurs de Facebook (l’un à 40 heures de travail d’intérêt général, l’autre à une amende de 300 euros) pour avoir tenu des propos provocants à l’égard d’un enfant handicapé sur le célèbre réseau social.